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Mélanie Gagné, Le Val-Ouest, Valcourt, janvier 2025
Voyager, c’est comme une deuxième peau pour moi. Une évidence. Une nécessité. J’ai commencé à parcourir le monde à 16 ans, et aujourd’hui, bien au-delà de mes 40 ans, mes amis me surnomment encore « celle qui voyage ». C’est plus qu’un simple loisir : c’est une identité. Même lorsque j’étais aux études, avec un horaire serré et un budget ultra limité, je trouvais toujours un moyen de partir.
À l’époque, je vivais en appartement, je travaillais à temps partiel et j’allais au cégep, puis à l’université. J’avais un budget strict : pas de sorties au cinéma, pas de vêtements neufs, pas de restos. Mon épicerie ? 100 $ par mois. Oui, c’était possible à l’époque, mais il fallait être créative ! Tout ça, pour une seule raison : je priorisais le voyage. Chaque sou économisé était un pas de plus vers l’inconnu, vers l’émerveillement.
Voyager, pour moi, ce n’était, pas seulement, découvrir des lieux, mais aussi me découvrir moi-même. Dépasser mes limites, surmonter mes peurs et relever des défis étaient autant de manières de grandir.
L’appel du monde
Afrique, Amérique latine, Asie, Europe… Mes pieds ont foulé des terres incroyables. J’ai vu les Masai danser sous le ciel étoilé de Tanzanie, vécu l’excitation d’un safari en Afrique du Sud, exploré les tunnels chargés d’histoire au Vietnam et marché sur les traces des Incas jusqu’au Machu Picchu.
Chaque voyage avait son lot d’aventures, et je dormais là où je pouvais : sur des toits d’auberges, chez l’habitant, en plein désert, dans des hamacs ou des lits superposés. Peu importe le confort ; c’était les rencontres humaines qui donnaient tout leur sens à ces expériences. Chaque échange, chaque sourire, chaque repas partagé devenait un trésor. Ces liens créés au bout du monde sont inestimables.
Tellement inestimables que j’ai décidé d’en faire ma vie. J’ai décroché mon permis et commencé à donner des conférences sur le voyage. J’ai accompagné des groupes, offert du coaching privé et enseigné l’art de voyager avec autonomie et authenticité. Ce n’était pas qu’un métier : c’était ma mission. Voir les étoiles dans les yeux des voyageurs que j’accompagnais était une récompense inégalable.
Le choc de l’arrêt
Puis la pandémie a tout arrêté. Comme tout le monde, je suis restée chez moi. Au lieu de faire mes bagages, j’ai écrit à mes amis à l’étranger, tissé des liens à distance et redécouvert ma maison… et mes chats. J’ai commencé à explorer le Québec. Voyage ton Québec, une section sur ma chaîne YouTube, est née de ces aventures locales. Et que dire de notre province ? Des paysages grandioses, des gens chaleureux, des histoires fascinantes.
Mais après la pandémie, les choses ont changé. Mon énergie, autrefois inépuisable, a commencé à s’épuiser. Je jonglais avec mille chapeaux : enseignante le jour, directrice d’un OSBL le soir, conférencière, animatrice en journal créatif, coach en voyage et, entre tout ça, cofondatrice d’un collectif d’écriture.
Et un jour, quelque chose s’est effondré en moi.
Quand le voyage s’éteint
L’automne dernier, j’ai frappé un mur. Le goût du voyage s’est évaporé. Complètement. La danse et la randonnée, deux autres grandes passions, ont suivi. C’était un signal clair : je devais ralentir.
Au début, j’ai ressenti de la honte. Comment une coach en voyage pouvait-elle ne plus vouloir partir ? Était-ce seulement possible ? Et que dire lors des événements que j’organise, comme La Halte des voyageurs ? « Quelle est ta prochaine destination ? » J’avais peur de répondre : « Aucune ».
Mais j’ai fini par m’accorder le droit. Oui, le droit de ne pas avoir de billet d’avion. Le droit de me reposer. Le droit d’être humaine.
L’espoir renaît
Puis, doucement, un murmure a refait surface. Une envie timide. Une lueur. « Peut-être que tu serais prête… » Ce n’était pas une décision impulsive, mais une petite voix, presque imperceptible, qui m’a rappelé pourquoi j’aimais tant voyager.
Aujourd’hui, alors que j’écris ces lignes, je n’ai pas encore réservé de vol pour partir en solo. Mais l’envie revient. Et avec elle, un rêve ancien : explorer la Scandinavie. Pour l’instant, mon budget ne le permet pas, ces pays étant particulièrement coûteux. Mais un jour, j’espère pouvoir vous écrire depuis ces contrées lumineuses, et partager avec vous les récits de cette nouvelle aventure.
En attendant, je prends le temps. Le temps de savourer l’élan qui renaît. Le temps d’honorer le voyage, à mon rythme.