Éric Cyr, Le Trait d’union du Nord, Fermont, 8 octobre 2024
Le projet d’édifier une ville nordique à Fermont a été envisagé par la compagnie minière Québec Cartier à la fin des années 1960 avec l’objectif de remplacer éventuellement celle de Gagnonville. C’est dans cette foulée qu’a germé l’idée de l’implantation d’un ouvrage architectural autonome moderne qui serait adapté aux aléas du climat tout en répondant aux besoins des gens qui y habiteraient et dans lequel ils pourraient évoluer à l’abri des humeurs de dame nature.
Architecture singulière
Le symbole emblématique qui distingue Fermont est sans conteste son célèbre mur-écran, un exemple unique de l’ingéniosité humaine face aux défis imposés par la nature. Véritable gratte-ciel horizontal, cet édifice multifonctionnel est devenu un incontournable associé à cette localité tant par son architecture audacieuse et futuriste que par son histoire exceptionnelle. C’est l’architecte et urbaniste suédois Ralph Erskine qui a inspiré sa création. Connu pour son expertise en architecture dans des environnements froids, ce dernier a conçu des bâtiments adaptés aux éléments climatiques extrêmes, notamment en Scandinavie et dans l’Arctique. Ses idées sur la protection contre les intempéries et l’intégration de la vie communautaire à l’intérieur des édifices ont influencé la conception de la bâtisse fermontoise qui a été érigée pour offrir un cadre de vie confortable malgré les conditions hivernales rigoureuses.
Embrasser la ville
L’architecte et urbaniste d’origine hongroise, Norbert Schoenauer, a conçu l’immeuble multifonctionnel. Cette innovation architecturale s’inscrivait dans une approche avant-gardiste pour une région aux conditions difficiles, où la protection contre le froid et les tempêtes de neige était essentielle pour assurer une qualité de vie optimale. Celui-ci, souhaitant améliorer le bien-être des habitants de ce type d’agglomération nordique tout en maximisant l’efficacité des infrastructures, a proposé un concept novateur de mur coupe-vent avant de travailler de concert avec son collègue, Maurice Desnoyers, à la concrétisation de cette installation protectrice en forme de flèche pointée nord-nord-ouest qui étend ses bras sur une longueur de 1,3 km devant les maisons de la municipalité. Inaugurée en 1974, la fortification fermontoise a été pensée pour abriter les résidents des facteurs météorologiques intenses en favorisant un microclimat plus clément tout en protégeant les habitations adjacentes des vents froids dominants. Cette innovation architecturale s’inscrivait dans une approche avant-gardiste pour une région aux conditions extrêmes, où la protection contre le froid et les tempêtes de neige était essentielle. De plus, l’aménagement, dont l’un des aspects les plus innovants est son centre commercial piétonnier intérieur à atmosphère contrôlée, a été conçu pour minimiser les pertes d’énergie. Le mur-écran ne se contente pas d’être le cœur des activités de l’endroit en favorisant les interactions sociales grâce à un rapprochement physique des citoyens destiné à combler l’isolement engendré par l’éloignement géographique, il s’est imposé par sa conception et son rôle essentiel comme une pièce maîtresse de l’identité fermontoise. L’un des atouts du mur-écran, où il est possible de vivre sans jamais mettre le nez dehors puisque cet espace commun intérieur abrite plusieurs services essentiels, réside dans son autonomie. Grâce à cette construction, les occupants peuvent vaquer à leurs occupations quotidiennes sans avoir à affronter les rigueurs du climat. Ce bâtiment colossal, qui peut atteindre jusqu’à 50 mètres de hauteur dans certains secteurs, abrite près de 500 logements, principalement des appartements de différentes tailles.
Genèse d’un lieu hors du commun
C’est au début des années 1970, que Québec Cartier entreprend de créer cette ville ultramoderne capable d’héberger ses travailleurs et leurs familles dans des conditions climatiques extrêmes. La priorité était de rendre la vie des futurs habitants aussi agréable que possible malgré les hivers longs et rigoureux. Après le déboisement et l’achèvement des plans, la construction des premières maisons préfabriquées commence dès l’hiver de cette même année à Saint-Jean-sur-Richelieu et à Noël de 1972, les premières familles emménagent dans leur nouveau domicile. L’érection du mur-écran commence en juin 1973 et s’échelonne sur une période de trois ans jusqu’en 1976. Les travaux s’avèrent complexes en raison notamment de l’isolement géographique et de la concurrence d’autres grands chantiers de l’époque, comme celui de la Baie-James.
En combinant esthétisme, fonctionnalité et innovation architecturale, le mur-écran, qui incarne l’esprit de la municipalité et la résilience de ses habitants face à un environnement hostile, raconte une histoire de défis et une vision futuriste devenue réalité. C’est cette singularité qui fait de Fermont un lieu hors de l’ordinaire.