Lise Millette, L’Indice bohémien, Abitibi-Témiscamingue, octobre 2024
Vous la croiserez peut-être entre deux rayons de bibliothèque, le nez plongé dans un livre – avec une jolie couverture – ou encore, discrètement installée dans son bureau, penchée sur une carte représentant son imaginaire et les limites territoriales de ses personnages. Céline Lafontaine, conteuse, fait aussi de l’animation et de la médiation culturelle auprès d’un public de tous âges.
Menue et un brin timide, la conteuse surmonte sa gêne lorsqu’elle enfile une marionnette ou se retrouve sur scène en solo. Expressif, son visage s’illumine de mille mots et émotions et Céline Lafontaine, sans plus d’artifices, envoûte et captive.
« J’ai étudié en cinéma et j’ai été script de fiction où le travail consiste à connaître le scénario, les intentions du réalisateur et d’être au service du récit pour bien le transposer. J’ai quitté le cinéma parce que c’est extrêmement contraignant. Le conte, c’est là que j’ai trouvé une manière de faire vivre le récit avec liberté. Et il y a énormément de possibilités parce qu’il n’y a rien sur scène », affirme-t-elle.
Le décor minimaliste contribue à ce que l’attention soit portée entièrement sur les mots et la personne qui porte l’histoire. Souvent, il n’y a qu’une carte, pour situer l’histoire, mais aussi pour préciser la géographie, les contraintes, les obstacles, l’espace… La trame du conte qui, pour Céline Lafontaine, ouvre toutes grandes les portes à un monde de possibilités.
« Je m’intéresse beaucoup aux contes anciens et traditionnels. C’est fascinant de voir que plusieurs ont traversé les époques et qu’avec leur transmission dans le temps, le sens original s’est complètement transformé. J’aime aussi trouver une façon pour les rendre contemporains et faire en sorte qu’ils puissent encore résonner aujourd’hui », mentionne-t-elle.
Céline Lafontaine se plaît à souligner que le conte n’est pas qu’une histoire, mais qu’il peut aussi prendre la forme d’un avertissement ou d’un savoir à transmettre. Les contes peuvent également présenter des symboles forts qui en font des œuvres universelles, voire spirituelles, au sens où certaines sont porteuses de sagesse.
« Tout ça, c’est tout jeune que je l’assume. Ça ne fait que cinq ans et tout est allé tellement vite ici en Abitibi-Témiscamingue. J’ai été si bien accueillie », précise-t-elle alors qu’elle vient de participer au Festival de contes et légendes en Abitibi-Témiscamingue. De plus, se dessine un autre projet collectif, Les exilées sont des louves, avec Marta Saenz de la Calzada et le Petit théâtre du Vieux-Noranda, sous la thématique des immigrantes.
CONSTRUIRE DES MARIONNETTES
Si elle prend plaisir à broder de mots ses histoires, Céline Lafontaine trouve tout autant de bonheur à créer elle-même ses marionnettes. Elle peint, coud, dessine, fait des retouches en plus de créer ses propres décors. Cette fabrication fait partie de son processus créatif.
« Mes marionnettes naissent dans un contexte particulier, dans un moment. La marionnette crée des ponts et c’est une belle façon d’être en lien avec les autres. Je suis toujours impressionnée quand je sors une marionnette et que je suis assise près d’un enfant. Celui-ci parle directement à la marionnette, pas à moi. C’est un moment un peu magique », confie-t-elle.
SA MISSION : FAIRE VOYAGER LES LIVRES
En marge de la scène, Céline Lafontaine s’investit comme bénévole responsable de la bibliothèque de Cléricy. Elle y accueille le service de garde, reçoit des groupes et anime, entre autres, l’heure du conte et un club de lecture estival.
À la bibliothèque municipale de Rouyn-Noranda, elle tente aussi de faciliter le contact avec les gens des quartiers ruraux, les enfants des centres de la petite enfance (CPE), mais aussi les personnes des centres d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) ainsi que de groupes d’aînées et d’aînés.
« On accueille les CPE une fois par mois, on développe des outils de lecture, des trousses pédagogiques. Tout pour que le livre se vive et sorte de la bibliothèque. Je me déplace dans les résidences pour aînés et dans les CHSLD, pour les gens qui ne peuvent se présenter. Tout pour créer des liens entre les gens et l’univers culturel », résume-t-elle, insistant sur ces moments privilégiés où la culture devient une inspiration même dans les lieux où l’accès y est moins facile.