Anthony Côté, Journal des citoyens, Prévost, septembre 2023
Il y a plus d’un an, du paillis forestier avait été répandu dans les sentiers multifonctionnels du Haut St-Germain pour améliorer la surface de la piste lorsque détrempée, voire boueuse. L’été 2023 a mis à l’épreuve ce produit. L’expérience fut-elle concluante ?
Dans l’ensemble, le paillis forestier dans les sentiers multifonctionnels a éliminé plusieurs trous de boue. Il assèche très rapidement la surface des sentiers après une pluie. Pour les marcheurs et joggeurs, le paillis donne une surface de marche « moelleuse ». L’appréciation de ces derniers : « Excellent ! ». Pour les cyclistes, elle varie entre l’indifférence et l’appréciation d’une surface de roulement avec moins de boue et de racines exposées. Mais cela n’a pas réussi partout : parfois la pluie réussit à déplacer le paillis. Quand le drainage dans le sentier est déficient, l’eau de ruissellement reste dans le sentier plutôt que d’être évacué vers le côté. La situation doit être corrigée. Enfin, un inconvénient non négligeable : nous devons en rajouter presque annuellement, puisqu’étant organique, il pourrit petit à petit et s’intègre au sol sous-jacent.
Limiter sa vitesse à vélo dans un sentier multifonctionnel
La demande de renouvellement du paillis cet été a réanimé le débat sur sa pertinence. Pour les gestionnaires de la Forêt Héritage, ils sont inflexibles dans le rejet de ce produit organique. Selon le président d’Héritage Plein Air du Nord, Philippe Marchessault, « Aucun organisme (Rando Québec ou Vélo Québec) ne préconise l’installation de paillis dans les sentiers pour la simple raison que le sentier devient instable pour l’utilisateur. »
Dans les faits, que préconisent Vélo Québec et Rando Québec dans leur guide sur l’aménagement des sentiers ? Tiré du guide d’aménagement de sentiers de Rando Québec : « En principe, tout le sol organique devrait être retiré de l’aire de marche d’un sentier. » Pourquoi ? « Le passage des marcheurs et surtout des cyclistes crée un effet de compaction sur le sol. Le sol organique est plus compressible, retient l’humidité… ». En effet, la terre organique agit comme une éponge. « Immanquablement, il y aura création de passages boueux et toute méthode de contrôles des eaux de ruissellement deviendra inefficace. ». Ainsi, pour répondre aux normes, nous devrions retirer le sol organique. Mais, hélas, la majorité des sentiers multifonctionnels de la Forêt Héritage (sentiers de ski de fond à l’origine) et de l’aire de marche/roulement a toujours été sur sol organique. Ça ne causait pas de problème à leur création : ils ne servaient que l’hiver. Maintenant, on les parcourt à l’année. Retirer le sol organique (lire : creuser les sentiers) n’est pas une option. Ce faisant, nous allons créer des dépressions et nous allons briser les racines des arbres en bordure de piste. Nous allons devoir remplir ces dépressions avec de la terre minérale, tel que décrit dans la norme, ou encore de la criblure de pierre. Questionné sur le sujet lors d’une formation en début d’été, le formateur et auteur du guide d’aménagement de sentiers chez Rando Québec, Jean Lacasse, a admis que le paillis forestier pouvait être un compromis « acceptable » pour des sentiers avec l’aire de marche sur sol organique.
Pour la référence de monsieur Marchessault à un sentier « instable pour l’utilisateur », le jupon de monsieur Marchessault dépasse : je soupçonne que l’« utilisateur » ici fait référence à un amateur de vélo de montagne. En effet, le freinage d’un cycliste sur du paillis peut être problématique s’il roule trop vite. La solution est du côté du cycliste : limiter sa vitesse dans un sentier multifonctionnel. Pour le vélo, ce type de sentiers devrait être à usage limité, c’est-à-dire pour se rendre vers les sentiers réservés aux vélos de montagne (en descente et sans paillis).
En conclusion, jumelée à un drainage adéquat, l’utilisation du paillis forestier représente un compromis acceptable pour l’aménagement de sentiers multifonctionnels durables sur sol organique, à défaut de pouvoir utiliser de la terre minérale à grande échelle.