Vers 1909, création des voies du P’tit train du Nord. . photo courtoisie

L’origine du P’tit Train du Nord

Pierre Gingras, Le Sentier, Saint-Hippolyte, septembre 2023

Par tradition, s’il est un ministère à Ottawa qui s’imagine être « le grand frère qui sait mieux que les petits provinciaux  », c’est bien celui des transports. Et la liste des catastrophes qu’il a engendrées au Québec ne date pas d’hier.

Après avoir financé la construction des voies ferrées des autres provinces, alors qu’elle était la province la plus importante, le Québec a passé très près d’obtenir enfin un réseau quelque peu convenable, n’eût été l’intervention catastrophique du gouvernement fédéral, à la toute dernière minute, en 1909.

Le P’tit train du Nord qui transportait, à l’époque, les skieurs des Laurentides. photo courtoisie

Réseau ferroviaire du Québec

En effet, c’est à ses frais que la compagnie Canadien Pacific complétait, la même année, toujours en 1909, trois voies conduisant respectivement de Saint-Jérôme à Mont-Laurier, de Gatineau à Maniwaki et de Mattawa à Angliers. Pourtant, aucune de ces destinations ne justifiait par elle-même de tels investissements majeurs. Les deux premières lignes devaient se joindre à Grand-Remous puis joindre Val-d’Or, puis Rouyn, puis le réseau Pan-Canadien à Kirkland Lake. Angliers aurait été relié à Rouyn. L’ensemble aurait couvert très efficacement tout l’ouest du Québec avant de filer vers l’ouest du Canada.

Mais voilà qu’en 1909, le gouvernement du Canada décide de lancer son propre projet de transcontinental qui passera évidement par Rouyn et Val d’Or, sans se soucier de relier les trois tronçons déjà en place plus au sud, avec pour priorité de filer vers le port de Québec au plus court, seul port ouvert à longueur d’année, pour seul objectif d’expédier les grains de l’Ouest, ce qui coupe carrément l’herbe sous les pieds du Canadien Pacific.

Les trois lignes démantelées en 1980

Par conséquent, ces trois lignes ferroviaires sont demeurées inachevées, en cul-de-sac. L’ouest de Québec est demeuré non développé, l’Abitibi-Témiscamingue dépend toujours du dispendieux camionnage, il en a coûté un prix énorme pour déplacer ce maudit chemin de fer qui encombre la vallée de la rivière Saint-Maurice à chacune des six fois qu’il s’y est construit un aménagement hydroélectrique. À la fin du compte, les trois lignes ferroviaires construites par le Canadien Pacific ont été démantelées au cours des années 1980.

Pire encore, ce chemin de fer est resté inoccupé de 1917 jusqu’à la fondation du CN en 1923, aucune compagnie privée ne voulant alors exploiter une voie ferrée de 350 milles, sur laquelle ne se trouvait aucun client. Tout ce dégât, le « grand frère d’Ottawa qui sait toujours mieux que les petits provinciaux », l’a fait surtout avec l’argent des Québécois, de la province qui était à cette époque, la plus importante.

Maintenant Parc linéaire P’tit Train du Nord

J’ai été personnellement la risée du conseil de Développement régional des Laurentides au cours des années 1980, lorsque j’étais membre de ce comité, avant que l’environnement et la crise climatique nous frappent, alors que j’étais seul à, au moins essayer, de sauvegarder la ligne et parler de son prolongement pourtant déjà rentable. Mais alors que l’on était pressé de faire du « bicycle », le Canadien Pacific était pressé de vendre sur le marché ses 135 milles de rails usagés qui, à cette époque, valaient 1,5 million de dollars du mille et de vendre au gouvernement l’emprise au prix de onze millions et ce, sans être tenu responsable d’aucun impact sur l’environnement de la ligne ou de ses activités passées.