Alain Boudreau, Graffici, Gaspésie, juin 2023
Une proportion importante de Québécois s’adonne à des activités de loisir et à des passe-temps de toutes sortes sur une base régulière et c’est tant mieux. Nous n’en sommes pas à la société des loisirs tant promise, dans laquelle nous devions travailler moins et s’amuser plus, mais la population est de plus en plus consciente des nombreux bienfaits sur la santé physique et la santé mentale du fait de bien occuper ses temps libres.
Cependant, avec tout ce que nous savons en rapport avec les changements climatiques, nous avons à nous poser la question: mon activité de loisir est-elle verte? L’espace manque ici pour étaler toutes les activités qui se pratiquent en Gaspésie et de les examiner sous l’angle de leurs impacts environnementaux, mais tout de même, jetons un coup d’oeil sur certaines d’entre elles et voyons comment, dans certains cas, nous pouvons faire mieux pour la planète.
En général …
De façon générale, vous aurez deviné que les loisirs d’hiver sont plus « dommageables » que ceux d’été. L’hiver est une saison énergivore à cause principalement de la grande demande en électricité pour les centres de ski, les arénas, les centres aquatiques, le chauffage des bâtiments récréatifs et autres. C’est le propre des pays nordiques comme le nôtre.
Sans surprise, en toutes saisons, les sports motorisés sont plus polluants que toutes les autres activités qui requièrent de l’énergie humaine. Les motoneiges, les véhicules tout-terrain, les bateaux, les motomarines, les motocyclettes polluent principalement à cause des gaz qu’ils laissent échapper dans l’air ou dans l’eau. De plus, ils peuvent être bruyants, dérangeants et avoir un impact important sur la faune et la flore. Parfois, il n’y a pas d’autre choix que d’utiliser un véhicule à moteur dans nos loisirs, mais on peut certainement en réduire son usage. Heureusement, les technologies et les pratiques évoluent, mais en attendant la venue de véhicules complètement propres, les sports motorisés demeurent des loisirs pas tout à fait verts.
En hiver …
Les arénas sont reconnus comme étant des bâtiments gourmands en énergie. Leurs systèmes de refroidissement de la glace consomment beaucoup d’électricité et c’est sans compter les coûts de chauffage (pour une partie du bâtiment, les douches, l’éclairage, etc.). Les arénas récemment construits peuvent compter sur des systèmes plus performants mais il reste que ce sont des infrastructures loin d’être vertes. Vous pensez que les patinoires extérieures sont exemplaires sur le plan écologique? Sachez que pour chaque pouce de glace d’une patinoire standard (200 x 85 pieds), 12 000 gallons d’eau1, la plupart du temps de l’eau potable, sont nécessaires! Faites le calcul pour celles qui ont une épaisseur de quelques pouces…
Les centres de ski alpin ne sont pas en reste. Les canons à neige utilisés par beaucoup d’entre eux exigent de grandes quantités d’eau et d’électricité. De plus, étant donné le réchauffement climatique, il est fort probable que les canons à neige se multiplient dans l’avenir. Souhaitons que les nouveaux modèles soient toujours plus performants et moins énergivores. À ce propos, en Europe, certaines expériences sont menées pour la récupération des eaux usées pour le fonctionnement des canons à neige.
En été …
Malgré ses apparences de sport en plein air, le golf est une activité avec un impact important sur l’environnement. Pour aménager des terrains, des espaces naturels ont été sacrifiés. Pour l’entretien des pelouses, beaucoup de machineries et de produits chimiques sont utilisés. Toutefois, les gestionnaires
cherchent par différents moyens à réduire cet impact. La nouvelle génération de joueurs, sensibles à la cause environnementale, en fera certainement une exigence.
À une échelle plus locale, les piscines résidentielles extérieures ne sont pas à négliger. En plus du remplissage avec de l’eau potable, le fonctionnement des équipements et des chauffe-eau requiert une bonne quantité d’électricité. À la grandeur du Québec, on estime qu’il existe plusieurs centaines de milliers de piscines; on peut certainement présumer que la Gaspésie en dénombre quelques centaines. Avec un tel nombre, ça finit par compter comme une activité qui a un impact.
Les activités de plein air, de découverte et d’aventures peuvent sembler toutes désignées pour faire de vous un adepte de loisirs verts, mais ce n’est pas toujours le cas. Elles sont certes plus écologiques, en tout cas plus que les sports motorisés, mais souvent elles sont pratiquées dans des milieux fragiles. La randonnée pédestre, comme exemple, peut avoir à long terme un impact sur la faune et la flore lors des passages répétés des randonneurs. Et c’est sans compter qu’il a bien fallu perturber des milieux sensibles pour aménager les sentiers; on ne fait pas d’omelette sans casser des oeufs … C’est pourquoi, les adeptes de plusieurs activités de plein air à énergie humaine, déjà sensibles à l’impact de leurs activités sur l’environnement, adoptent une approche de plus en plus écoresponsable. On ne pratique pas n’importe quoi, n’importe où …
Les déplacements et petits équipements
Par nécessité, nous devons parfois nous déplacer en véhicule à moteur pour plusieurs de nos activités de loisir. En contrepartie, nous pouvons nous restreindre à l’utiliser seulement lorsque nécessaire, emprunter les transports en commun lorsqu’ils sont disponibles ou encore, favoriser le covoiturage.
Indispensables pour une foule d’activités, les petits équipements sportifs (skis, raquettes, vélos, etc.) peuvent aussi faire l’objet d’une remise en question. Est-il vraiment nécessaire de les remplacer? Sont-ils réparables? Est-ce que je peux en acheter des usagés? Est-ce que je pourrais les partager avec d’autres? Autant de questions qui pourraient vous permettre de prolonger la vie utile de vos petits équipements et faire de vous un utilisateur un peu plus vert.
Vous venez de terminer la lecture de cette chronique. Vous êtes résigné à faire votre part et à réduire l’impact de votre activité de loisir sur l’environnement? Alors vous vous dites, ce soir je reste calmement chez-nous avec mes enfants et je prépare un bon petit souper au BBQ sur la terrasse et des feux d’artifice en soirée … Et bien sachez que la cuisson sur le BBQ a pour effet d’émettre des particules fines dans l’air qui contribuent aux gaz à effet de serre, en particulier ceux au charbon de bois, et qu’en plus, si c’est de la viande que vous faites cuire, dont la production peut être dommageable pour l’environnement, alors là, vous êtes dans le champ!
Les feux d’artifice, quant à eux, si petits soient-ils, polluent de plusieurs façons; dans une certaine mesure, ils peuvent polluer l’air et l’eau, ils créent de la pollution auditive et parfois ils peuvent même avoir un impact sur la faune, en particulier sur les oiseaux à cause du bruit des explosions. D’ailleurs, il est probable qu’avec les années, même si le coût est élevé, les spectacles pyrotechniques seront remplacés par des technologies plus propres comme les drones munis de lumières à DEL. Bien sûr, votre souper au BBQ et votre petit feu d’artifice familial ne menacent pas exagérément la planète.
Enfin, vous vous dites, pourquoi je ferais un effort dans mes loisirs alors que l’an dernier, le monde du soccer s’est donné rendez-vous dans des stades climatisés en plein désert? Même si tout cela vous semble absurde, rappelez-vous la légende du petit colibri et que malgré tout, ce qui compte, c’est de faire sa part.
Ne mettez pas un frein à vos activités de loisir et vos passetemps. Continuez de bien occuper vos temps libres et prenez plutôt le temps de réfléchir aux différentes façons de réduire leurs impacts sur l’environnement. Ainsi, vous bénéficierez des bienfaits d’une vie plus équilibrée et d’une meilleure conscience environnementale!
Bon été!
1 Donnée tirée d’une formation de l’Association québécoise du loisir public sur la qualité de glace pour les patinoires extérieures.