Dans la région de Montréal, c’est au printemps et en automne que l’on a plus de chance d’observer le Bruant fauve. (Photo: Jean Poitras)

Le Bruant fauve, touriste splendide

Jean Poitras, Journaldesvoisins.com, Ahuntsic-Cartierville,
mars 2023

Durant quelques jours, en novembre dernier, j’ai eu le plaisir d’avoir ce visiteur dans ma cour arrière. Je dis visiteur, mais on pourrait aussi dire touriste, puisqu’il ne se pointe dans nos régions que lors de ses migrations.

Le Bruant fauve (Fox Sparrow – Passerella iliaca) est classé dans le genre Melospiza, qui comprend aussi le Bruant de Lincoln, le Bruant chanteur et le Bruant des marais.

Il présente une variété de plumages selon les régions de son aire nord-américaine, mais la forme «fauve» est celle que nous pouvons observer à l’est des Rocheuses.

Cet oiseau, d’une longueur de 18 cm, se remarque par sa longue queue rousse, ses zones grises et fauve sur la tête et le dos, ainsi que par sa poitrine blanche striée de taches rousses qui peuvent s’étendre jusqu’au ventre.

On note aussi deux minces bandes alaires blanches ainsi qu’un faible cercle oculaire. Son bec est bicolore, jaune dessous et gris dessus, avec une pointe noire. Des pattes brunes complètent le tout. Mâle et femelle ont un plumage identique.

Comportement et alimentation

Le Bruant fauve se nourrit d’insectes, de larves et de graines qu’il trouve au sol. Il débusque sa pitance en déplaçant les feuilles mortes d’une façon particulière. Il exécute un petit saut en projetant les feuilles vers l’arrière avec ses pattes. Le Tohi à flancs roux montre un comportement similaire.

Ce bruant est plutôt secret et farouche bien que son chant puissant révèle sa présence; c’est un «Tuuuîi-tî-tituu-touîii-izz» clair avec des variations. En période de nidification, le mâle chante du matin jusqu’au soir, perché dans un conifère ou un buisson.

Habitat et nidification

Il préfère de loin les régions d’arbustes ou de fourrés bas et denses, souvent inaccessibles pour l’homme, ce qui fait que son nid est difficile à repérer. Le célèbre ornithologue John James Audubon a été le premier à découvrir et à décrire un nid dans la région de Natashquan en 1833.

Ce genre d’habitat se retrouve au Québec dans les conifères rabougris et les forêts broussailleuses de la Côte-Nord, de certaines îles de l’estuaire du Saint-Laurent, dans les massifs montagneux de Charlevoix, de la Gaspésie et à l’île Anticosti. La taïga et les forêts qui la bordent lui conviennent parfaitement.

Il construit son nid au sol bien à l’abri du feuillage, ou alors bas dans un buisson ou un petit arbre. Celui-ci est composé de mousses, de lichens et d’herbages et sera renforcé à la base par des brindilles s’il est construit en hauteur.

Sa période de nidification débute entre la fin d’avril et la fin de mai. La femelle y pond de deux à cinq œufs, qu’elle couvera seule pendant une douzaine de jours. Les oisillons demeurent une dizaine de jours au nid et sont nourris par les deux parents. Après l’envol, ils resteront dépendants des parents pendant encore trois semaines, ce qui nous mène au début d’août.

On croit le Bruant fauve monogame, mais on a peu de données sur ce fait ni sur sa longévité. Comme décrit précédemment, son habitat préférentiel le rend difficile à étudier.

Territoire et migration

Le Bruant fauve niche dans une large bande de forêt subarctique et de taïga, qui s’étend de Terre-Neuve et Labrador jusqu’à l’Alaska. Cette population est celle qui est de coloration rousse-fauve. Un autre groupe de sous-espèces plus grises niche quant à lui le long des Rocheuses.

La sous-espèce rousse migre en octobre et en novembre vers le sud-est des États-Unis, du Texas à la Virginie sans toutefois inclure le centre et le sud de la Floride. Les sous-espèces grises se retrouvent en hiver le long de la côte du Pacifique, du Yukon au Mexique.

Dans la région de Montréal, c’est au printemps et en automne que l’on a plus de chances de l’observer. En vérifiant sur le site eBird, j’ai noté qu’en 2022, c’est à la fin d’avril et au début de mai, puis ensuite durant les derniers jours d’octobre et les deux premières semaines de novembre que ce bruant a été signalé. Les deux occasions, distantes de quelques années, où j’ai pu le voir dans ma cour arrière, étaient effectivement en automne.

Une autre observation me vient en mémoire, effectuée au site viking terre-neuvien de l’Anse-aux-Meadows au début de juin 2017. Il se trouvait alors en plein dans son territoire et sa période de nidification.

Abondance et tendance

Selon l’Atlas des oiseaux nicheurs du Québec méridional, le Bruant fauve est considéré comme un nicheur migrateur peu commun. Il y a deux raisons majeures à cela; la principale partie de son territoire de nidification se trouve hors des zones étudiées par les équipes de l’Atlas et son habitat de prédilection est difficilement accessible pour les ornithologues.

Par contre, en comparant les résultats compilés pour les deux périodes des Atlas, leurs auteurs en concluent que son aire est stable et que sa population serait peut-être en augmentation.

Tant mieux! On aura peut-être l’occasion de l’observer au printemps ou à l’automne prochain!