Stéphanie Dufresne, La Gazette de la Mauricie, Trois-Rivières, Juillet 2022
Dans une volonté de densifier les milieux de vie urbains et d’offrir des logements abordables, certaines villes permettent la construction d’une seconde habitation, de plus petite dimension, sur un lot déjà occupé par une maison unifamiliale. Une vision urbanistique qui, à l’heure des changements climatiques, gagne en popularité.
Les unités d’habitation accessoires
Conçues généralement pour loger une ou deux personnes, les unités d’habitation accessoires (UHA) sont des espaces de vie autonomes, qui partagent le même terrain qu’une maison unifamiliale existante. Il peut s’agir d’une « mini-maison de fond de cour », d’un garage aménagé en logement ou d’une annexe à la maison principale.
En anglais, on les appelle affectueusement granny flats (qui se traduit « appartement de grand-mère ») puisqu’ils sont un moyen populaire — surtout en Ontario et dans l’Ouest américain — de loger ses parents vieillissants dans le cadre d’un projet de cohabitation intergénérationnel. Les UHA peuvent aussi servir de logement pour un(e) proche aidant(e) ou de jeunes adultes. Selon les réglementations locales, elles sont parfois offertes en location.
Ce type d’habitation s’est répandu au Canada au moment de la crise économique de 1929 et lors de la pénurie de logements suivant la Seconde Guerre mondiale. Elle a ensuite pratiquement disparu dans les années 1950-60, peut-on lire dans un guide publié par la Société canadienne d’hypothèque et de logement (SCHL).
Un modèle aux multiples avantages
Aujourd’hui devant la hausse du prix des habitations, la rareté des logements et les préoccupations de densification urbaine apportées par la crise climatique, les unités d’habitation accessoires connaissent un regain d’intérêt.
D’ailleurs, la toute nouvelle Politique nationale de l’architecture et de l’aménagement du territoire du gouvernement provincial souligne que l’accessibilité et l’abordabilité des logements passeront notamment par le développement de ce type d’habitation.
En plus de réduire l’étalement urbain, celles-ci sont susceptibles de répondre aux besoins de plusieurs populations : aînés, jeunes familles ou ménages à faibles revenus. Elles peuvent aussi fournir un revenu d’appoint aux propriétaires.
Contrairement à l’Ontario où les Accessory Dwelling Units sont autorisées presque partout, au Québec, peu de villes ont emboîté le pas.
La ville de Sainte-Catherine est citée en exemple depuis qu’elle est devenue, en décembre dernier, la première municipalité du Québec à autoriser l’implantation d’unités d’habitation accessoires. Ce mode de « densification douce du territoire » préserve les forêts et les terres agricoles, peut-on lire sur le site web de la Ville. Il transforme par ailleurs des quartiers peu denses et dépendants à l’automobile, ce qui soutient « la vie de quartier, l’offre de transports collectifs et les services et commerces de proximité ». Il s’agit par ailleurs pour Sainte-Catherine d’un moyen d’augmenter les recettes fiscales dans des secteurs de la Ville où les infrastructures sont déjà construites.
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À Québec, une démarche s’est amorcée en 2020 lorsque la Ville s’est dotée d’une vision de l’habitation qui ambitionne de soutenir, d’ici 5 ans, « la réalisation de 400 logements accessoires, en permettant notamment la construction de mini-maisons et d’annexes résidentielles. » Les quartiers de la première banlieue et ceux situés le long des axes de transport en commun sont les premiers visés.
« En plus d’offrir de nouvelles opportunités, ces logements accessoires pourront favoriser le maintien à domicile, la proche aidance et les rapprochements familiaux. » — Vision de l’habitation 2020-2030 de la Ville de Québec
Notant qu’il y a 1,8 million de maisons unifamiliales dans la province, l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) considère qu’il serait facile d’intégrer des unités d’habitation accessoires sur au moins 50 000 de ces lots. Alors qu’il manque plus de 100 000 logements au Québec et que les besoins en habitation sont criants, cela comblerait une partie des besoins, souligne le responsable des affaires gouvernementales à l’APCHQ, David Dinelle.
Trois-Rivières à l’étape de la consultation
Trois-Rivières n’échappe pas aux défis du logement. Elle devra, dans les prochaines années, augmenter le nombre de logements sociaux et abordables et densifier les milieux de vie.
Actuellement, les habitations séparées en cour arrière ne sont pas autorisées par les règlements de la Ville. Seul un agrandissement à même le bâtiment principal est possible. Selon Myriam Lavoie, urbaniste pour la Ville de Trois-Rivières, la question des UHA fera l’objet d’une réflexion dans le cadre de la nouvelle politique d’habitation.
Trois-Rivières s’ouvrira-t-elle aux « mini-maisons de fond de cour » ? « Cela va dépendre des besoins de la population, explique Myriam Lavoie. La décision revient au conseil municipal, mais si on voit une tendance ou un besoin dans la population trifluvienne, le règlement peut être adapté à mesure que la réalité change. »
La Ville a tenue, le 22 juin dernier, un premier atelier de consultation publique en vue de bâtir cette politique d’habitation. Des rencontres sont également prévues avec divers groupes communautaires du territoire ainsi qu’avec des spécialistes du domaine de l’habitation. L’administration municipale présentera le fruit de ce travail à la fin de l’année.