Le dindon sauvage, ce natif du continent

France Ricard et Yves Cordeau, Le p’tit journal de Woburn, Saint-Augustin-de-Woburn, Mai 2022

 

Certaines traditions autochtones honorent le dindon sauvage. Elles qualifient cet oiseau de généreux parce qu’il offre toutes ses parties. En effet, sa chair permettait aux peuples autochtones de survivre. Ses plumes servaient à de multiples décorations, à des coiffes, tambours et
vêtements. On utilisait aussi ses os comme sifflets. Les premières colonies américaines ont survécu grâce aux dindons sauvages. Les États-Unis ont même considéré cet oiseau pour porter l’emblème national, avant de choisir l’aigle à tête blanche.

Après avoir disparu du sud du Québec au 20 e  siècle, le dindon sauvage est réapparu dans notre région il y a plusieurs années. Il prolifère tellement que le Gouvernement a dû établir un plan de gestion. Il fait le bonheur des adeptes de la chasse, mais aussi des ornithologues. Le
dindon sauvage rend aussi des services au monde agricole en dévorant des insectes et des plantes nuisibles.

Le dindon sauvage mâle peut atteindre 120 centimètres (4 pieds) et peser jusqu’à 9,5 kilos. Les femelles sont plus petites. Elles mesurent environ 95 centimètres (trois pieds) et pèsent jusqu’à 5 kilos. Le mâle a une tête bleutée rouge et une poitrine garnie d’une barbe noire. Seulement 15 % des femelles ont une barbe. Le dindon possède des zones charnues et bosselées qui pendent sous sa gorge et sur son bec. Ces excroissances se nomment des « caroncules ». Le plumage du corps est de couleur bronze irisé. Sa queue est rouille à bande noire. Les plumes de la femelle sont brunâtres et beaucoup moins colorées. Le mâle et la femelle peuvent vivre de 5 à 10 ans.

Le dindon sauvage se déplace souvent pour se nourrir. En été, il parcourt de 3 à 8 km 2 selon l’abondance de la nourriture. Omnivore, il mange une variété de matières végétales et animales selon leur disponibilité. Il consomme des noix, des baies, des glands, des feuilles de graminées et des plantes herbacées. Il gratte la terre et dégage des graines et des racines du sol avec ses pattes. En plus des bourgeons et des ramilles de hêtres et d’érables, il s’alimente d’insectes, d’amphibiens, de reptiles, de sauterelles et de limaces. Les jeunes se nourrissent principalement d’insectes.

L’hiver, le dindon comble la majeure partie de son alimentation par des grains de maïs et de soya restés dans les champs après la récolte. Il complète le tout par des bourgeons, des ramilles et des graines de plantes accessibles durant la saison froide, comme le chardon ou certains arbustes.

Il habite les milieux agroforestiers et visite régulièrement les régions peuplées de chênes à haute production de glands. Malgré sa taille, il se réfugie dans la cime des arbres pour dormir. Pour se protéger, il préfère les arbres entourés d’eau limitant l’accès par le sol. Il est surtout actif le matin et en fin de journée. Ses pattes sont équipées de trois doigts. Bon coureur, il peut aussi voler et atteindre plus de 50 km/h sur de courtes distances. S’il le faut, le dindon sauvage peut nager.

Le dindon est grégaire, mais la formation de groupes varie selon les saisons. Les mâles matures, les mâles immatures, les femelles sans petits et les femelles avec petits forment des entités séparées par période. En hiver, des individus de tous les âges et des deux sexes s’attroupent en grand nombre. Pendant la période de reproduction, ce sont des harems de quelques dizaines de femelles qui fréquentent un groupe formé d’un à trois mâles. Le dindon glougloute et la femelle glousse.

​La durée d’ensoleillement influence l’accouplement du dindon sauvage. L’accouplement débute chaque année autour du mois d’avril et peut se poursuivre jusqu’à la fin mai. Polygame, le mâle se reproduit avec autant de femelles que possible. Il glougloute pour attirer les femelles, puis parade pendant des jours. Il gonfle d’air son plumage, allonge ses ailes vers le sol, relève la queue et déploie ses plumes en éventail. Il émet des sons semblables à ceux d’un tambour et bouge rapidement ses pattes.

La dinde sauvage pond habituellement entre 10 et 18 gros œufs par couvée, de couleur brun roux. Une incubation continue dure habituellement de 26 à 28 jours. La femelle est vulnérable pendant la couvaison, car son nid est au sol. Il n’est pas rare qu’elle doive abandonner ses œufs. Une deuxième nichée moins nombreuse peut alors être tentée. Puisque les jeunes demeurent au
sol pendant au moins deux semaines, leur taux de mortalité oscille entre 70 et 80 %.

La chasse au dindon sauvage reste difficile. Elle nécessite un bon sens de l’observation, de la patience et une certaine maîtrise des vocalises. Le mâle réagit et répond à l’appel. Le dindon a une vue exceptionnelle à 300 degrés avec un facteur de grossissement d’environ 4x. Cette aptitude visuelle amplifie sa perception des éléments au sol ou des mouvements autour de lui. Il a un tempérament nerveux, toujours aux aguets. C’est un des plus gros gibiers à plumes de l’Amérique du Nord.

 

Photographie qui accompagne cet article :

Nom du fichier : Dindon sauvage glougloutant
Crédits : Photographie : France Ricard
Légende : Ici, posture d’un dindon sauvage qui glougloute.