Élisabeth Boil, L’Événement, Scotstown/Hampden, Février 2022
Un peu d’histoire
Le terme « érable », qui est apparu dans la langue en 1265, provient du terme hybride acerabulus, du latin acer et probablement du gaulois abalo, « pomme, pommier ».
Bien avant l’arrivée des européens, les amérindiens avaient découvert comment recueillir l’eau des érables et la faire bouillir. Il y a autant de légendes sur ce sujet que de tribus, ou presque.
Une de ces légendes raconte que Nokomis, grand-mère du héros Manabush, a été la première à percer les troncs d’arbres pour recueillir la sève, qui, à l’époque, était du sirop. Manabush dit à sa grand-mère qu’il n’était pas bon que les hommes puissent ainsi récolter ce délicieux sirop, qu’ils allaient devenir paresseux et ne plus l’apprécier. Pour faire travailler les hommes Manabush grimpa au haut d’un érable, chargé d’un contenant rempli d’eau, et y versa le contenu. Le suc dilué obligea les hommes à surveiller patiemment la cuisson de leur récolte pendant plusieurs nuits.
Les Algonquins appelèrent ce liquide chauffé « sinzibuckwud » qui signifie « tiré des arbres ».
Les Premières Nations reconnaissaient les vertus fortifiantes et médicinales de la sève d’érable et savaient la transformer en sirop. La récolte commençait durant le pré-printemps. Les techniques d’entaille de l’érable, appelé Michtan ou Couton, variaient selon les nations. Des goutterelles de bois, petites lamelles enfoncées au bas des arbres, permettaient l’écoulement de l’eau recueillie dans un mokuk (récipient d’écorce, de bois ou de céramique) posé à même le sol. Pour l’évaporation de l’eau, on y plongeait des pierres brûlantes, ou encore, l’eau était soumise à l’action du gel : il suffisait alors d’enlever la couche de glace qui se formait à la surface, et qui ne contenait que très peu de sucre, ce dernier, plus dense, se concentrant dans le fond. En répétant cette opération à plusieurs reprises, on finissait par obtenir un produit relativement concentré en sucre. D’autres nations, comme les Hurons et les Iroquois, utilisaient un chaudron de terre cuite suspendu au-dessus d’un feu.
Les Français utilisèrent au départ les techniques amérindiennes de récolte de la sève. L’entreposage et le transport du sirop étant malaisés, les chaudrons de métal, qui toléraient des températures plus élevées, permirent la fabrication du sucre d’érable dans des cabanes bâties sur place à cet effet. D’où, d’ailleurs, le nom de « cabane à sucre » que l’on donne à l’endroit où sont menées les opérations, et qui persiste encore aujourd’hui, bien que le sirop soit désormais beaucoup plus courant que le sucre. En 1700, Agathe de Repentigny, une femme d’affaires de Nouvelle-France, envoyait d’ailleurs des dragées de sucre d’érable au roi de France, Louis XIV, qui parait-il, s’en délectait.
Depuis, les techniques de cueillette et de transformation n’ont cessé d’évoluer. La goutterelle est devenue un chalumeau, le seau de bois est passé à la tubulure d’un érable à l’autre, le traditionnel chaudron de métal suspendu au-dessus d’un feu a été remplacé par un évaporateur (pour lequel les frères Small ont obtenu un brevet en 1889). Dans les années 1980, on inventa l’osmose inversée, qui permet de retirer une portion de l’eau avant la cuisson.
Ses bienfaits
Il faut environ 40 litres de sève pour produire 1 litre de sirop.
La sève est constituée en moyenne de 98% d’eau pure et de 2% de sucre. Le sirop contient 67% de sucre, tandis que, dans la tire, ce taux oscille de 83% à 86% et, dans le beurre, de 86% à 87%. Dans le sucre, il monte à plus de 87%.
Un des bienfaits dont les premiers consommateurs du sirop d’érable ont bénéficié, a été la guérison du scorbut dont ils souffraient à la fin de chaque hiver.
Au Québec, le sirop d’érable pur 100% naturel contient 100 composés nutritifs essentiels dont des minéraux, des vitamines, des acides aminés, des phytohormones et 67 polyphénols (puissants antioxydants ayant la capacité de réduire le stress oxydatif qui est à l’origine de maladies comme le diabète de type 2, l’obésité et les maladies cardiovasculaires).
Un quart de tasse de sirop d’érable comble 72 % des besoins nutritionnels quotidiens en manganèse, 27 % en riboflavine, 17 % en cuivre et 6 % en calcium, ainsi qu’une quantité appréciable de zinc (bon pour les systèmes nerveux et immunitaire, entre autres).
Parmi les 67 polyphénols contenus dans le sirop d’érable pur du Québec, 9 lui sont propres. L’un de ces polyphénols, appelé Québécol, se forme naturellement lorsque la sève est bouillie pour produire le sirop d’érable.
Le sirop d’érable est aussi privilégié par plusieurs sportifs puisqu’il fournit des glucides simples, qui se transforment facilement en glucose. L’INAF (Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels), de l’université de Laval, a effectué des études qui ont révélé que le sirop d’érable regorge d’antioxydants qui aident les cellules à absorber rapidement le glucose, le dotant ainsi d’un faible indice glycémique
D’après les études in-vitro effectuées par l’INAF, les acides abscissique et phaséique, produits par l’érable pour combattre le stress causé par l’environnement, se retrouvent dans le sirop d’érable. Ces deux molécules anti-oxydantes favorisent une plus grande et plus rapide captation du glucose par les cellules musculaires sans induire une importante sécrétion d’insuline. Selon André Marette, directeur scientifique de l’INAF et chercheur à l’institut de cardiologie et de pneumologie de Québec, un des avantages du sirop d’érable est qu’il se compose de sucrose et contient peu de fructose pur (rapidement capté par le foie). Les études in-vivo qui restent à venir confirmeront donc, peut-être, que le sirop d’érable a des effets bénéfiques sur la prévention du diabète de type 2.
Pour l’instant, les personnes diabétiques doivent garder en tête que même si le sirop d’érable contient des composés au potentiel prometteur, il demeure un aliment à consommer de façon occasionnelle et en quantité limitée, comme toutes les autres sources de glucides concentrés.
En ce qui concerne l’apport en énergie, une portion de 15 ml de sirop d’érable contient moins de calories qu’une même portion de miel ou de sirop de table.
En conclusion, le sirop d’érable pur de notre belle province peut remplacer avantageusement les produits sucrants dans notre cuisine. Consommé avec modération, c’est un aliment sain et énergétique.
Bien-sûr, il est important lire l’étiquette du produit pour s’assurer que l’on a affaire à du sirop d’érable pur. Les mentions « saveur d’érable » ou « arôme d’érable » ne constituent pas une garantie que le produit contienne du sirop d’érable.