Jocelyne Aird-Bélanger, Ski-se-Dit, Val-David, octobre 2021
Quand on est toujours derrière la caméra, il peut s’avérer un peu inquiétant de passer devant l’objectif et d’accepter qu’une autre personne choisisse les angles de vue, l’éclairage ou les épisodes. C’est pourtant le défi qu’a accepté aujourd’hui Nicole Deschamps!
Avant le cinéma et la vidéo…
Animatrice culturelle, Nicole a vécu 37 ans à Prévost où elle s’est occupée de nombreux dossiers avec tout un groupe impliqué en culture dans les années 1980. On leur doit, entre autres, la mise sur pied du Centre culturel et la préservation la gare de Prévost. Cet événement a été le déclencheur du mouvement de Sauvegarde des gares, qui est à l’origine du Parc linéaire tel qu’on le connaît aujourd’hui. Tout en travaillant à ces causes, elle et ses ami-e-s gardaient un œil sur Val-David, qu’ils visitaient souvent pour s’inspirer et pour assister à divers événements culturels. Il y a quelques années, elle fut invitée à rejoindre le CA de l’Atelier de l’île par la présidente de l’époque, Claudette Domingue. Elle a alors collaboré à la préparation et à l’organisation du 40e anniversaire de l’Atelier en 2015. Elle finit même par filmer cet événement unique.
Pour Nicole Deschamps, Val-David, c’est aussi la Butte à Mathieu, qui est restée une inspiration pour elle. Elle y était venue toute jeune adolescente, en montant sur le pouce et en campant chez l’habitant, pour assister à quelques spectacles dont elle avait entendu parler à Montréal, où elle habitait. Comme bien des Québécois, elle a alors été très impressionnée par le décor, l’atmosphère et les artistes qui y présentaient leurs spectacles. Pas étonnant que Nicole fasse aujourd’hui partie du comité du Musée de la chanson québécoise et de la Butte à Mathieu. Grâce à ce comité et aux innombrables artéfacts, affiches, documents musicaux et photographiques qu’a conservés Gilles Mathieu ainsi qu’à la documentation numérique accumulée par Nicole depuis 20 ans, au moins 11 500 personnes ont eu l’occasion de visiter tout l’été une réplique envoûtante de la Butte réalisée dans le cadre du centenaire de la municipalité et d’y rencontrer le fondateur, M. Mathieu lui-même, ou encore de visionner des vidéos d’artistes ayant chanté à cet endroit mythique.
Derrière la caméra…
Sa vie d’adulte a débuté dans les airs, bien loin des caméras et du cinéma, puisqu’elle fut parachutiste professionnelle pendant 7 ans, toujours sur les routes, à suivre les compétions de l’Ouest canadien à la Floride. Elle termina cette expérience comme instructrice de formations mixtes en chute libre! Tout un exploit dans un milieu au départ extrêmement macho! Après ce grand détour, elle sentit qu’il était temps de revenir sur terre et de retourner étudier en animation culturelle afin de s’investir dans sa collectivité.
Elle était bien loin alors de penser qu’elle deviendrait cinéaste. Son père, qui avait constamment une caméra photo ou vidéo à la main, lui avait naturellement transmis cette passion qui s’intensifia encore à l’adolescence. Un travail de pigiste à l’ONF l’a définitivement mise sur la voie qu’elle poursuit avec talent et conviction aujourd’hui. Cet emploi l’a amenée à côtoyer de nombreux cinéastes réputés. Inspirée par ces rencontres, Nicole fonda un ciné-club à Prévost où furent présentés de nombreux films produits à l’ONF en présence des cinéastes invités à échanger avec le public après la projection de leur œuvre.
Après ces expériences emballantes, elle dut cependant réduire ses déplacements pour s’occuper de Karine, sa petite fille. Elle profita de ce temps à domicile pour acquérir et approfondir ses connaissances en informatique et maîtriser l’expertise suffisante au développement d’un logiciel de bases de données. Elle mit alors au point une application pour la planification de tournage des aides-réalisateurs. En 1997, Nicole fonda sa propre compagnie de création et de réalisation de sites web et de web documentaires. Cet outil de communication numérique devait lui permettre d’intégrer un jour ses vidéos et ses productions personnelles sur le web. Comme de nombreux passionnés de cinéma, elle surveillait avec grande attention le moment où le numérique lui donnerait les moyens d’en arriver là. Peu à peu, la bande passante devint assez forte pour supporter les vidéos sur le web, et les caméras numériques, petites mais sophistiquées, donnèrent aux réalisateurs le plein contrôle sur leurs films. Nicole pouvait enfin filmer, télécharger, monter et diffuser son travail sur internet, toujours appuyée par son ami d’enfance Jean-Pierre Maher, son mentor en cinéma et montage avec qui elle a travaillé sur divers projets tout au cours de sa vie. Contrairement au monde du cinéma traditionnel, qui est complexe et compliqué et nécessite une grosse équipe et des moyens importants, le monde du numérique est léger et mobile, libérant ainsi la vidéaste et lui donnant plus de flexibilité et d’autonomie. Sa compagnie de communication fermée, Nicole se consacre depuis 2019 essentiellement à la production de vidéos traitant d’artistes et regroupements d’artistes, d’histoire, d’événements culturels et de gens ou collectifs engagés au mieux-être de leur communauté. Vidéaste professionnelle, elle est membre de l’Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec et des Réalisatrices équitables. Ses films se trouvent au www.vimeo.com/NicoleDeschamps.
Enfin résidente de Val-David…
Non seulement Nicole est-elle bénévole dans notre milieu qu’elle a ainsi appris à bien connaître, mais elle y demeure maintenant de manière définitive depuis deux ans. Sa fille Karine, ses deux petits-enfants, sa famille et ses ami-e-s sont les piliers de la vie de cette femme chaleureuse, inspirée depuis son enfance par les valeurs amérindiennes de communauté et d’entraide. Ayant toujours voulu habiter un village, de préférence dans les Laurentides, et rejoindre un groupe de créateurs pour poursuivre ses propres projets artistiques, elle est bien heureuse aujourd’hui d’avoir atteint ses objectifs et de vivre dans sa mini-maison-studio, sous les grands arbres, au pied des montagnes à Val-David.