André Chrétien, Le Pont de Palmarolle, juin 2021
Circulant sur la route 393, en quittant le village de Palmarolle, ma vue fut soudain sollicitée par un paysage inhabituel : un immense champ, divisé en couloirs latéraux inondés d’une belle eau limpide.
Je me suis tout de suite rappelé une intervention de madame Émilise Lessard-Therrien, députée de Rouyn-Noranda à l’Assemblée nationale, qui avait dénoncé l’appropriation des terres agricoles de l’Abitibi par des « prédateurs » chinois.
Voilà donc chose faite! Notre belle Ferme des Pics qui est passée aux mains de ceux-ci qui ont décidé d’y faire la culture du riz. J’ai immédiatement rangé mon véhicule dans l’une des entrées de ce champ pour voir et toucher de près ce phénomène. Oh! Mais surprise! Ce n’est pas de l’eau dans ces allées de belle terre brune, c’est une mince pellicule translucide qui les recouvre et sous laquelle on peut distinguer de petites jeunes pousses vertes. J’apprendrai plus tard, de la bouche des propriétaires, que ce sont des pousses d’un maïs destiné à l’alimentation bovine. Eh oui! Du « blé d’Inde » à Palmarolle, c’est possible grâce à cette nouvelle technique révolutionnaire importée d’Irlande.
Mais pourquoi du maïs pour nourrir des vaches laitières? À la Ferme des Pics, on cultivait de la luzerne depuis plusieurs années. Cette légumineuse est très riche en protéines essentielles à la production du lait, mais ne renferme pas tous les ingrédients nécessaires à une alimentation complète et équilibrée.
Ce maïs sera donc récolté et ensilé au complet : tige, feuilles et épis, avec les autres fourrages pour assurer une alimentation riche et complète, propre à la production laitière. Par cette production locale, on évitera donc d’importer à grands frais du maïs de l’Ontario et d’autres régions éloignées de la nôtre.
Mais ce n’est pas si simple que cela de récolter du maïs en Abitibi. À la Ferme des Pics, on est à l’affût de toutes ces nouvelles techniques permettant cette culture chez nous, en haut du 48e parallèle. On a la science et les connaissances de notre bord chez les Fontaine, Gaudet et Lalancette. Avec chacun et chacune un diplôme en technique et en agronomie, on est prêt non seulement à expérimenter, mais encore plus à prouver que c’est possible. Pour la première fois où on a enregistré des températures de six degrés au-dessous de zéro, on a prouvé que, grâce à ce nouveau procédé, de jeunes plants de maïs ont pu survivre facilement grâce à la protection thermique de cette mince pellicule de matière biodégradable.
Puisque que l’on frôle le sujet de l’écologie, il est important de répéter que cette membrane qui semble être en plastique commun est en fait composée de matière et de particules biodégradables, ce qui suppose que dans quelques semaines elle se confondra avec la terre qu’elle recouvre et ne laissera aucune trace de matériaux nuisibles ou nocifs à l’environnement. Inutile de dire que ce procédé exige des équipements mécaniques très perfectionnés. Et ces machines, la Ferme des Pics les a commandées d’Europe, plus précisément d’Irlande où l’on pratique cette forme d’agriculture moderne depuis quelques années.
L’équipe du Journal Le Pont souhaite à l’équipe de la Ferme des Pics une abondante récolte et, comme le disait l’abbé Proulx dans ses commentaires sur la colonisation : « Voyez ce colon heureux qui récoltera du blé à hauteur d’homme. »
À Palmarolle, cet été, on pourra donc récolter du blé d’Inde à hauteur d’homme et à hauteur de femme et ce ne seront pas des Chinois qui l’auront semé.