Lise Marcoux, D’un lac à l’autre, Lac Bouchette, mars 2021
Le lapin, qui symbolise la fécondité, le renouveau, et qui est si lié à la fête de Pâques, n’est qu’une façon de souligner la venue du printemps. Je vous présente ce mois-ci l’expression « poser un lapin » qui se veut un petit clin d’œil à ce temps de l’année, mais vous vous en doutez bien, aucune relation n’existe entre Pâques et cette locution.
Au fil des années voire des siècles, certaines définitions de mots ou d’expressions tombent carrément en désuétude. Ainsi en est-il du sens du mot lapin qui, au XVIIe siècle, désignait une histoire créée de toute pièce et qui suscitait des moqueries. On la tournait en dérision, affirmant : « Celle-là est de garenne », par référence au lapin de garenne, plus gros qu’un lapin ordinaire.
À l’opposé, d’autres continuent leur petit bonhomme de chemin, mais se modifient. Par exemple, dans sa forme première, à la fin du XIXe siècle, « poser un lapin » signifiait « ne pas rétribuer les faveurs d’une femme » et résulterait, semble-t-il, de l’accolement de deux termes argotiques : « faire poser », une expression de l’époque qui voulait dire « faire attendre » et « lapin » que Lorédan Larchey a défini, dans le Nouveau Supplément du dictionnaire d’argot édité en 1889, comme « un galant quittant les filles sans payer le prix convenu ». On prétend que c’est pour échapper à ce type de déboire que les femmes de petite vertu se sont fait, par la suite, rémunérer à l’avance pour leurs services. La formule « poser un lapin » fait référence « au lapin posé sur les tourniquets des jeux de foire, qui paraît facile à gagner et qu’on ne gagne jamais ».
Aussi, une autre expression avait cours en ce siècle, soit « voyager en lapin » dont le sens était « voyager clandestinement, sans payer » et qu’on a relégué aux oubliettes.
Pour la signification actuelle de « poser un lapin », il est probable qu’il y ait eu un glissement de sens, soit l’attente vaine d’un paiement vers l’attente tout aussi vaine d’une personne à un rendez-vous, puisque dans les deux cas, il s’agit d’un engagement non respecté, ce que confirme le Larousse universel de 1922, où il est spécifié : « Ne pas tenir un engagement, une promesse » alors qu’aujourd’hui, il est précisé : « Ne pas venir au rendez-vous fixé à une personne, le plus souvent à dessein, sans l’aviser. »
Eh bien voilà! Je vous dis à bientôt, car chose certaine, je ne risque pas de vous poser un lapin pour l’édition à venir…