Le cri du cœur d’Antoine Charbonneau-Demers

Julie Renault, L’Indice bohémien, Abitibi-Témiscamingue, février 2021

C’est à l’âge de 22 ans que l’auteur rouynorandien Antoine Charbonneau-Demers écrit Coco, son premier roman, gagnant du Prix Robert-Cliche. Depuis, il a publié Good Boy, Daddy, le roman jeunesse Baby Boy, ainsi qu’une nouvelle intitulée La femme à refaire le monde. Il est également lauréat du Prix du roman gay pour l’adaptation française de Good Boy, parue récemment chez Arthaud. Diplômé du programme de création littéraire de l’UQAM ainsi qu’en jeu au Conservatoire d’art dramatique de Montréal, Antoine prépare actuellement une performance multidisciplinaire qui sera présentée par l’Écart en février.

Bien qu’il ne sache pas encore exactement quel sera le résultat final de sa recherche, Antoine est présentement plongé dans une résidence de création très personnelle. Pour lui, c’est une façon de transposer la littérature dans l’espace, de préciser ce qu’il veut dire à travers ses livres. Il aborde d’ailleurs l’écriture comme de la performance : « Mes livres sont une façon de me commettre. Le protagoniste, c’est moi. Ce n’est pas un personnage. »

Même si au départ, ses œuvres mélangeaient le réel et la fiction, la démarche artistique d’Antoine est plutôt devenue une recherche de vérité. « Ce que j’écris, ce ne sont pas des idées. C’est un cri du cœur. Je veux qu’on y croie. Je pensais être plus accepté par le milieu littéraire en écrivant de la fiction, en prouvant aux autres que j’avais fait un travail colossal. Mais au final, je m’en veux d’avoir menti. C’est dans la mise à nu que je me sens le mieux. Mes livres, c’est ma façon d’être 100 % honnête. »

La toile La femme à la cravate, du peintre Modigliani, est au centre de sa prochaine création. L’objectif est de la reproduire à l’infini. Pour Antoine, cette toile représente le pont entre la vérité, l’imaginaire et la famille. Elle symbolise également la maladie, thème prisé par l’auteur. « La toile que je vais reproduire est en fait déjà une reproduction. Mais pour moi, c’est l’originale. C’est un cadeau de mariage que mes parents ont reçu, mais je l’ai toujours détestée. Au fond, cette peinture est inoffensive, jusqu’à ce que je lui donne de l’importance, et ça fait boule de neige. Je cherche la précision à travers la reproduction. »

Quand il a vu l’appel de résidence, le jeune artiste a sauté sur l’occasion. Performer dans sa région natale, devant ses proches, est pour lui quelque chose de précieux, de symbolique. « On perçoit souvent le fait de présenter devant sa famille et ses amis comme quelque chose de négatif, mais pas pour moi. Ce que j’ai écrit s’adresse à eux, ça me touche qu’ils soient là. Tout ce que je veux, au fond, c’est qu’on me prenne dans ses bras. Même si, en ce moment, on ne le peut pas. »