La Fièvre, une formation montréalaise créée par deux Rimouskoises d’origine, Zéa Beaulieu-April et Ma-Au Leclerc.

La Fièvre

Mathieu Boucher, Le Mouton NOIR, Rimouski, le 7 février 2021

Vous connaissez peut-être La Fièvre, une formation montréalaise créée par deux Rimouskoises d’origine, Zéa Beaulieu-April et Ma-Au Leclerc, qui s’est hissée aux demi-finales des Francouvertes 2020. Leur dernier album du même nom, paru fin octobre, s’est fait remarquer, particulièrement pour son deuxième titre, « Faudra faire mieux ».

Cet engouement s’explique principalement par le ton engagé de la pièce. Il faut dire que cette chanson ne fait pas exception aux autres œuvres du duo dont la force réside dans le texte.« Personne ne souhaite faire de nous des marionnettes. » Ou encore « Personne ici n’est mon patron. Je mords trop fort, on ne m’approche pas. Tu déguises ta peur en mépris. Je vois clair dans ton jeu tu regretteras. » Et finalement : « Le bruit de leurs bottes fait trembler les murs, nous sommes entre leurs mains, s’éclipser serait dur. Comprends-tu? »

Les deux musiciennes partagent, en quelque sorte, leur vision du combat porté contre les préjugés, les tabous et les préconceptions, qui, dans l’œuvre, semblent représentés par une fièvre contagieuse qui s’étend, mais qui finira un jour par tomber. Elles s’adressent à ceux qui propagent des idéologies infondées, et leur disent que pour qu’elles s’arrêtent, pour les faire taire, il « faudra faire mieux ». Elles se montrent fortes, et entêtées, décidées à défendre leurs valeurs.

C’est selon moi un point fort : elles ne cherchent pas la provocation, mais la confrontation, car pour se battre, il faut forcément confronter.

Leurs idées, elles les expriment non seulement à travers leurs textes, mais aussi par un instrumental, surprenant. La musique, dans le style dark électro-pop, est assez agressante à la première écoute. Les tonalités dérangent, elles sont à la limite dissonante. Par contre, si on laisse une chance à l’œuvre, qu’on s’y ouvre à et qu’on la réécoute, l’oreille s’habitue et il est plus facile de comprendre tout l’intérêt.

L’aspect agressant est en quelque sorte voulu. De la même manière que les propos sur certaines questions sociétales bousculent, l’instrumental dérange, mais si on écoute attentivement ce que La Fièvre a à dire, on comprend vite l’essence du message lancé, qui, selon moi, est très beau.

Au final, La Fièvre offre une œuvre excellente qu’on doit prendre le temps de comprendre pour se laisser imprégner de son essence. Zéa et Ma-Au jouent habilement avec tous les aspects musicaux et narratifs pour exprimer leurs frustrations, mais aussi pour montrer qu’elles sont prêtes à déranger pour protéger leurs valeurs et leurs convictions. Les deux artistes font preuve d’engagement dans la croisade contre les inégalités et les injustices sociales. Comme La Fièvre le chante si bien : « Malheureusement pour nous faire taire, faudra faire mieux, faudra mieux. »

 

https://www.moutonnoir.com/2021/02/la-fievre