Vous, iriez-vous dans un CHSLD ?

Jean-Pierre Lamonde, Au Fil de La Boyer, Saint-Charles-de-Bellechasse, juillet 2020

Prétendre qu’on ne finira pas ses jours dans un CHSLD est un peu présomptueux. Bien sûr, ce n’est pas le premier choix de quiconque. Surtout avec ce qu’on a vu ces derniers temps. Le 1erchoix pour mourir, c’est dans son lit, à  la  maison,  entouré  de  ses  enfants  et   petits-enfants   en   pleurs   devant   un  si  grand  drame,  comme  dans la chanson La Mamma  d’Aznavour ! Entre  cela  et  le  CHSLD,  il  y  a  peut-être  de  la  marge.  Il  y  a  cent  ans,  les  vieux  vieillissaient  et  mouraient  à   la   maison,   avec   leur   progéniture.  Plus  tard,  on  a  inventé  des  lieux  pour  que  les  parents  ne  soient  pas  à  la  charge  de  leurs  enfants.

Une personne entre dans un CHSLD quand  il  n’y  a  plus  de  place  pour  elle  ailleurs.  Même  pas  à  l’hôpital,  un endroit où on va pour être soigné et retourner chez soi par la suite. On entre  au  CHSLD  parce  qu’on  est  en  très grande perte d’autonomie, parce que sa santé physique ou psychologique, ou les deux, n’a plus d’espoir de  guérison  et  qu’il  faut  aller  là  où  des  personnes  qualifiées  s’occuperont de nous, pour tout, jusqu’à notre dernier souffle. Donc, rendus là, il n’y a pas de marche-arrière.

Depuis  des  décennies,  les  gouvernements  promettent  aux  personnes  vieillissantes    des    soins    de    type    maintien à domicile, ce qu’elles réclament  depuis  fort  longtemps  afin  de vieillir chez elles, dans leurs affaires. On  n’a  jamais  vraiment  donné  suite  à  ces  promesses.  L’argent  est  allé  à  d’autres  qui  criaient  plus  fort  et  qui  n’en avaient pas nécessairement plus besoin.  Des  personnes  âgées,  ça  ne  crie  pas  bien  fort,  et  surtout  bien longtemps. Aux prises avec la gestion de  la  pandémie,  le  gouvernement  actuel   a   promis   qu’il   donnerait suite à cette promesse, que cette fois serait la bonne. On verra bien !

Mon propos aujourd’hui est de vous suggérer de ne pas vous laisser vieillir trop vite afin de ne pas vous retrouver un  jour  dans  la  situation  où  la  seule  solution serait qu’on vous offre un lit dans un CHSLD. Ne pas vieillir trop vite,  cela  consiste  d’abord  à  cesser  de se convaincre qu’on est vieux, ou à tout mettre sur le dos de l’âge. Il n’y a pas d’âge pour être vieux. Avec la médecine  et  les  connaissances  que  nous  avons  maintenant  en  matière  de  santé,  on  sait  qu’on  peut  garder  son esprit et son corps en assez bon état plus longtemps. Pour cela, il faut rester actif, se préoccuper des autres, tenir sa maison et son environnement en  bon  état,  fièrement,  manger  sainement,  lire,  marcher,  jardiner,  aller  voir ses amis, s’intéresser aux enfants et petits-enfants, s’engager dans son milieu  aussi.  C’est  un  peu  tout  ça  l’autonomie.

Même vieillissante, la vie d’une personne  doit  avoir  un  sens,  une  utilité.  La   santé,   c’est   un   cadeau,   mais   généralement  ça  se  gagne  durement,   jour   après   jour.   La   bonne   forme aussi ça se gagne, pas devant la  TV  à  cœur  de  jour.  Un  cousin  à  qui  je  demandais  comment  vas-tu me répondit : « Je vais bien et je m’en occupe   personnellement   ».   Beau   parleur va, que je me suis dit ! Mais c’est  vrai  qu’il  faut  s’en  occuper,  et  personnellement. Et si un jour, malgré tout,  la  maladie  et  l’usure  du  temps  vous  terrassent,  il  faudra  peut-être  aller  ailleurs,  s’il  n’y  a  pas  d’autres  solutions. Souhaitons donc que l’État s’engage dans une politique pour les personnes  âgées  qui  reconnait  que  celles-ci souhaitent garder leur autonomie et demeurer à leur domicile le plus longtemps possible.

Cela  coûtera  moins  cher  à  l’État,  et  les  personnes  plus  âgées  continueront d’être utiles. Qu’en pensez-vous ?  Finalement :  «  Iriez-vous  dans  un  CHSLD »? Pas nécessairement, mais si nécessaire seulement !