Moins ça change, plus c’est pareil

Émilie Corbeil, Le Journal des citoyens, Prévost, le 17 avril 2020

On aura beau se désoler pour nos aînés, nos emplois, notre économie et pour tout ce que nous connaissions du confort jusqu’à il y a quelques semaines à peine, on aura beau se dessiner des arcs-en-ciel et se dire que tout ira bien, on aura beau attendre patiemment un retour à la « normale », tout cela est bien vain si le changement ne vient pas.

 

Note sur les zoonoses

La COVID-19 est une zoonose : une maladie d’origine animale qui se transmet à l’humain. La tuberculose bovine, l’influenza, le VIH, la fièvre jaune, la maladie de lyme, la rage, la morve, la peste en sont, à titre d’exemple. Il est estimé que 75 % des maladies humaines émergentes sont des zoonoses.

Les zoonoses nous guettent de partout et nous ont de tout temps menacés. Il n’y a rien de nouveau avec le virus SRAS-COV-2, rien en tout cas qui n’était pas attendu. Le problème actuel vient du fait que nous ne changeons pas. L’histoire se répète parce que nous refusons d’en retenir les leçons.

 

On se souvient ?

Au début de 2019, une épidémie virale sévère a fait des dégâts majeurs : la peste porcine africaine. Qualifiée « d’apocalypse » dans les médias, cette maladie, déjà bien connue, est devenue hors de contrôle pour avoir atteint la Chine, qui n’a pas pris les mesures qui s’imposaient.

Sans danger pour l’homme, elle décime par contre les porcs d’élevage de manière fulgurante et risque d’atteindre le Canada, qui compte toujours sur la transparence et la coopération de la Chine pour l’aider à prévenir une éventuelle propagation.

Zhan Su, professeur en gestion des affaires internationales à l’Université Laval, expliquait le désastre chinois en ces mots à Radio-Canada : « Le principe adopté par le gouvernement chinois, c’est toujours d’essayer de rassurer les gens. En d’autres termes, s’il y a de mauvaises nouvelles, il vaut mieux ne pas les rendre publiques ».

Cette explication semble s’appliquer tant pour la santé animale que pour la santé humaine et, malgré les bévues passées, se montre toujours d’actualité.

 

SRAS-COV, prise II

En 2003, la nature a béni l’humanité d’une première vague d’un coronavirus, moins contagieux que son successeur, mais causant des symptômes plus sévères. Originaire de la province de Guangdong, au sud de la Chine, SRAS-COV-1 aurait pu être une belle pratique. Le régime avait caché l’épidémie, qui s’était répandue rapidement. Nous étions passés à un doigt de la catastrophe parce que Pékin avait préféré enterrer le problème.

Mais le pardon fut accordé, les dommages mitigés et les échanges commerciaux se sont intensifiés. Or, rien n’a changé.

Le secret chinois nous a encore privés des précieuses premières semaines qui auraient pu nous permettre, en 2019, de contenir l’épidémie de SRAS-COV-2. Fin décembre, Li Wenliang, ophtalmologue à Wuhan, a bien tenté de sonner l’alarme. Mais le Régime l’a forcé à se rétracter en signant un document statuant qu’il avait fait de fausses allégations. Les citoyens chinois, qui voyaient leurs proches mourir, risquaient des années de prison s’ils avaient osé parler. La loi chinoise est ainsi faite.

 

Made in China

Je me souviendrai toujours d’un de mes cours de géographie économique. Le professeur nous avait demandé de faire la liste de tout ce que nous avions avec nous qui était étiqueté « Made in China ».

Sitôt l’inventaire terminé, il nous avait demandé de nous en départir sur-le-champ. La réaction unanime n’a pas tardé à venir : « Monsieur, si on fait ça, on va se ramasser tous nus ! »

Le prof l’avait bien vu venir et c’est à partir de là qu’il nous avait fait la leçon : avides de biens bon marché, nous nous sommes rendus dépendants de la Chine au point de nous retrouver tous nus en son absence.

La Chine, à l’heure actuelle, détient le monopole des terres rares, indispensables à la fabrication de tous nos produits technologiques. Elle est en passe de devenir la pharmacie de la planète.

Comment sévir face aux cachotteries du régime, alors que notre dépendance envers lui atteint des niveaux stratosphériques ?

Devrait-on réfléchir aux tenants et aboutissants de cette dépendance, alors que l’on sait qu’il règne en Chine un autoritarisme peu enclin au respect des droits humains ?

 

Changer

Nos liens commerciaux devraient être conditionnels au respect des règles les plus élémentaires de bon voisinage. Plus encore, nous devons repenser nos relations économiques en vue de favoriser l’émergence de réelles démocraties et de systèmes économiques plus justes et moins polluants.

Cela signifie de consommer des biens durables, produits par des travailleurs bien rémunérés dans des pays libres.

Il va falloir changer pour faire changement, parce que l’histoire se répète lorsqu’il en est autrement.