Sylvie Prévost, Le Journal des citoyens, Prévost, le 17 octobre 2019
Ce sont deux excellents musiciens qui sont venus à Prévost, devant un auditoire malheureusement clairsemé. Quel dommage de les avoir manqués!
Quelles sont les chances pour qu’un pianiste de Trois-Rivières rencontre un clarinettiste d’origine portugaise? Assez minces, ma foi, mais la chose s’est produite, probablement sous l’égide d’un dieu mélomane.
Partageant le même intérêt pour le répertoire fin du XIXe siècle, début XXe, et pour la présentation vivante de la musique, les compères ont aussi en commun d’être habités de la même façon par les œuvres au point de présenter une gestuelle semblable. Ils respirent de concert et la danse de qui a la préséance est parfaitement rodée. Leur partenariat s’appuie aussi sur une entente exemplaire en ce qui touche les émotions et les images.
Le programme comprenait des compositeurs connus et d’autres moins, dans un déroulement harmonieux alternant douceur et fougue et demandant de plus en plus de virtuosité. Le pari est réussi.
La Première rhapsodie est un premier contact très accrocheur. La rêverie y est parcourue de passages plus actifs ou pleins d’humour dont la langue est claire et l’ensemble charmant. Les Trois miniatures exposent des contrastes percutants, parfaitement intelligibles et intéressants. Les atmosphères rose et feu des Schumann, la gentillesse lumineuse d’Horovitz, la sensualité de la Pièce en forme de habanera… Nous avons surfé toute la soirée, ravis et admiratifs.
La clarinette de Dias Da Silva a un son plein et doux tout en restant très articulé, même dans les passages demandant virtuosité. Elle frappe en plein au plexus solaire. Au piano, Hébert-Bouchard n’a rien à lui envier. Tous deux semblent s’amuser et vivre au centuple.
Les artistes ont pris le parti de présenter les œuvres de façon théâtrale, par de petites mises en scène et des changements de costume, mais parfois non. C’est l’aspect de ce concert qui me paraît être à la traîne. Le théâtre, c’est une excellente idée qui maintient l’intérêt du spectateur et lui permet de se préparer intimement à ce qu’il va entendre. Mais quant à aborder les choses ainsi, autant y aller franchement, avec éléments de costume et langage d’époque (par exemple, je doute que Schumann ait pu répondre « super » à la remarque d’un ami…). Il ne faudrait pas non plus passer de cette forme de présentation à une autre plus didactique. La rupture de ton disperse l’attention et rend l’ensemble un peu confus.
Cela dit, au point de vue musical, nous avons passé une magnifique soirée. Ne manquez pas votre chance la prochaine fois!