Réal Boisvert, La Gazette de la Mauricie, Trois-Rivières, janvier 2019
Trois-Rivières n’a rien inventé en s’associant à Vision zéro. Il s’agit en effet d’un projet internationalement connu et qui vise à développer un réseau de transport sécuritaire. D’où l’appellation zéro décès et zéro accidents graves dus à la circulation routière. La ville de Montréal comme plusieurs autres villes dans le monde s’est jointe à ce mouvement et, parmi les mesures retenues, on compte notamment l’abaissement de la vitesse à 30 km à l’heure sur plusieurs rues du sud-ouest. On arguera qu’il est difficile à Montréal d’aller plus vite tant la congestion automobile est répandue… mais enfin. La question n’est pas là bien sûr ! L’idée générale est de rendre les déplacements sans danger partout sur un territoire donné. Personne ne peut s’opposer à cela.
Ce qui a principalement retenu l’attention en lien avec Vision zéro, c’est la protestation qui a entouré l’annonce, non pas de l’adhésion de Trois-Rivières à ce mouvement, mais la seule proposition de réduire à 40 km la vitesse sur certaines rues de la ville. C’était bien mal parti. D’autant qu’une vaste majorité de citoyens n’avaient jamais entendu parler de ce projet, d’aucuns se plaisant même à s’en moquer, parlant de zéro vision. Lors d’une assemblée du conseil municipal, un citoyen a fait observer qu’en matière de communication publique la ville ne pouvait faire pire. On ne saurait l’accuser d’avoir tort.
L’année qui commence nous invite donc à repartir sur de nouvelles bases dans cette affaire. De zéro il faudrait passer à 360. Car en matière de sécurité routière, il est nécessaire d’adopter une vue périphérique tant il importe d’avoir des yeux tout autour de la tête quand on vise à réduire à néant les accidents causant la mort ou des blessures graves. Au lieu de mettre l’accent sur une simple mesure, il faut donc envisager les choses dans leur ensemble et, de concert avec la population, se doter d’un plan global, lui-même adossé à des analyses rigoureuses d’où ressortent des mesures éprouvées.
Tout doit être pris en compte. Et plusieurs commentateurs l’ont judicieusement fait remarquer. Cela va de la configuration des artères routières jusqu’à l’adoption d’une surveillance accrue du réseau en passant par la promotion des saines habitudes de conduite, la prise en compte de tous les moyens de déplacement, l’inculcation d’une constante responsabilité citoyenne et d’un sens répandu de la courtoisie, le tout assorti d’une règlementation intelligente.
Une fois arrivé là, on gagne sur tous les plans. D’abord parce qu’habiter une ville plus sécuritaire est un atout inestimable quand vient le temps de se déplacer. Mais plus encore, le processus menant à l’adoption d’un projet rassembleur donne lieu à un exercice de participation citoyenne dont les retombées se feront sentir sur la qualité de la vie démocratique elle-même.
Et c’est exactement ce que l’on a vu à l’œuvre à Trois-Rivières, passé le couac suivant le 40 km/heure. Des centaines de citoyens se sont manifestés avec civilité, soit pour assister et intervenir lors des assemblées du conseil municipal, soit pour exprimer leur opinion sur les réseaux sociaux ou dans les pages du quotidien régional. Et les membres du Conseil municipal ont démontré un sens de l’écoute qui les honore et qui préfigure joliment bien pour la suite des choses, notamment au regard de la vaste consultation prévue au cours des premiers mois de l’année. Vivement une conduite sans fautes à Trois-Rivières, à pied, à vélo ou à moteur !