André Jacques et « Ces femmes aux yeux cernés »

Marie-Andrée Brière, Le Cantonnier, Disraeli, décembre 2018

Né à Beaulac-Garthby, ancien professeur de littérature et d’histoire de l’art au cégep de Thetford-Mines, André Jacques, détenteur de nombreux prix littéraires, poursuit, dans son dernier roman intitulé « Ces femmes aux yeux cernés », les aventures de son héros Alexandre Jobin.

D’entrée de jeu, c’est le titre qui intrigue, et, tout au long de la lecture, nous cherchons qui sont « ces femmes aux yeux cernés ». La réponse sous-entendue viendra dans le dernier tiers du récit, et c’est avec le personnage d’Isolda que nous en comprendrons le sens. Le titre du roman aurait pu être « Isolda et ces femmes aux yeux cernés », mais l’auteur a préféré préserver le mystère !

Impliqué malgré lui dans une affaire de faux tableaux vendus à un caïd de la mafia russe, l’antiquaire Alexandre Jobin décide de remplacer un des faux par une vraie toile du maître pour sauver sa peau. Mais pour cela, il doit retrouver l’auteur des toiles originales, Jordi Carvalho, lequel semble avoir disparu. De Montréal à Barcelone, en passant par Paris, sa quête ne sera pas de tout repos et le retour de Pavie, l’héroïne de son dernier roman, soutiendra, d’abord dans l’ombre, la quête de Jobin pour être finalement celle qui réglera cette affaire. Une question se pose cependant : une fois de plus, la véritable héroïne de ce roman est Pavie, la fille de Jobin, et devant un Jobin déclinant, malade, en perte de vitesse, l’auteur prépare-t-il la succession de son enquêteur préféré ? C’est possible.

À travers les actions de Jobin, buveur invétéré de scotch à la santé précaire, ex-officier de renseignement devenu tardivement antiquaire sans véritable connaissance du milieu de l’art, nous retrouvons des paysages urbains familiers et les couleurs de Montréal, bien que l’histoire se déroule principalement à Barcelone.

Comme dans ses œuvres précédentes, l’art d’André Jacques est au cœur de l’intrigue. Le rythme est plus lent et quelques invraisemblances dans les liens de Jobin avec la mafia viennent affaiblir le récit qui aurait bénéficié d’une plus grande concision.

L’auteur termine son roman en nous laissant libres de réfléchir sur la fragilité de la vie. Certes, les personnages de polars meurent souvent, mais nous, personnages de nos vies, mourons aussi… « Memento mori… Souviens-toi que tu vas mourir », voilà une pensée profonde pour cette fin de livre.

Le lecteur est convié à suivre l’intrigue certes moins enlevante que celle des précédents ouvrages, néanmoins divertissante pour les amateurs de polars, lesquels y trouveront sûrement leur compte.