Photo : Josué Bertolino

Beluga.mp3

Noémie Gagnon, Le Mouton NOIR, Rimouski, novembre-décembre 2018

Un groupuscule mené par deux femmes pénètre dans un complexe scientifique. Sa mission : trouver des fichiers sonores de bélugas classés secrets. Les deux « artivistes » arriveront-elles à accomplir leur mission et à faire passer leur message? Naviguant entre le réel et la fiction, l’humour et le suspense, Beluga.mp3, réalisé par Julien Boisvert, cherche à sensibiliser le public à la situation précaire des bélugas mais, plus largement, à inviter la population à prendre part à une lutte environnementale sur tous les fronts.

Produit à Rimouski dans le cadre du programme de résidence en cinéma et sciences de la mer Plan large de Paralœil, Beluga.mp3 a été présenté dans plusieurs festivals de films de la région, dont le Carrousel international du film de Rimouski et Les Percéides, mais aussi dans plusieurs festivals étrangers. En juin dernier, il a reçu le prix de La Compagnie des Réals au Deauville Green Awards (France). Ce prix souligne non seulement la qualité de la thèse environnementale du film, mais aussi la qualité et l’originalité de la réalisation. En effet, ce court-métrage réussit à instaurer un ton humoristique en récupérant les codes des films d’espionnage classiques dans un découpage simple, mais terriblement efficace. La justesse du montage ponctue adroitement le passage de la gravité sage du scientifique à celle pleine de candeur des deux espionnes.

Julien Boisvert dit à propos de son film que « c’était un projet à l’intersection du cinéma, de la musique et de la danse » et, lorsqu’on voit non seulement les retombées du film à l’étranger, mais aussi la richesse des œuvres qui ont découlé de l’initiative du réalisateur, on est prêt à lui donner raison. Pour la musique, Julien Boisvert a commandé à Antoine Létourneau-Berger, un multi-instrumentiste rimouskois, une pièce composée uniquement de chants de bélugas. Pour le contenu chorégraphique, le réalisateur a fait appel à la chorégraphe trois-pistoloise, Soraïda Caron, qui interprète une des « artivistes » aux côtés d’Emmamalin Larsson. Beluga.mp3 entre dans une tradition qui fait entre autres la force et la richesse de la scène culturelle bas-laurentienne, celle des foisonnantes collaborations. Des collaborations entre cinéastes et chorégraphes, chorégraphes et écrivains, écrivains et artisans, artisans et musiciens. Des artistes comme Julien Boisvert s’amusent à effacer les murs entre les disciplines et à les combiner, à les faire muter, à les enrichir.

En plus de reposer sur une riche collaboration artistique, Beluga.mp3 crée un pont entre l’art et la science, jumelage moins fréquent, mais extrêmement pertinent. Le film agit ici comme un véhicule ludique et accessible pour le message de Pierre-Henry Fontaine, remarquable biologiste et fondateur du Musée du squelette de l’île Verte. Fontaine parle de la situation des bélugas dans le Saint-Laurent et explique pourquoi il n’est pas suffisant de sauver des espèces si on ne fait rien pour préserver leur habitat. Il appelle à une mobilisation du public pour protéger l’environnement, mais le met aussi en garde contre les campagnes sensationnalistes de certaines sociétés de protection des animaux. À la fin du film, on cite Albert Einstein : « On ne résout pas un problème avec les modes de pensée qui l’ont engendré. » Pierre-Henry Fontaine en appelle à la sagesse et à la créativité dans les luttes environnementales et Julien Boisvert, avec Beluga.mp3, répond judicieusement à l’appel.

Visitez Paraloeil.com en 2019 pour être informé du lancement de Plan large et ses cinq courts métrages. Pour visionner Beluga. mp3 :

vimeo.com/nousmedia/beluga-mp3