Quand les universités s’impliquent dans le communautaire : Concordia Day

ISABELLE RAYMOND, L’Itinéraire, Montréal

Depuis que je suis camelot-rédactrice pour L’Itinéraire, plusieurs opportunités culturelles et artistiques se sont présentées à moi : assister à des pièces de théâtre, visiter des musées, voir un concert et participer à des ateliers de lecture et de haïkus. Ce n’est pas tout le monde qui a cette chance, car plusieurs n’ont pas les moyens financiers nécessaires.

Par ailleurs, les horaires de certains musées ne sont pas adaptés pour les travailleurs, une opinion que je partage avec Israël Dupuis, chargé du cours de Design and community engagement, un cours inclusif de l’Université Concordia. Il est également organisateur de la journée Concordia Day, une initiative qui facilite l’accès à la culture aux étudiants et à des participants d’organismes communautaires. J’ai alors pris la peine de creuser la question du rôle des institutions pour l’accessibilité à la culture, tout en profitant de la visite au Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM). Je vous présente d’ailleurs à la page suivante, l’une des oeuvres qui m’ont le plus touchée de l’exposition permanente Art québécois et canadien.

 

Pourquoi le département de design de l’Université Concordia s’implique-t-il dans le milieu communautaire?

Pour le département de design de l’université, il a toujours été important que les étudiants puissent concevoir leur pratique comme partie prenante de leur environnement, et non comme une simple pratique commerciale. Mon cours concrétise cette direction par la réalisation de projets avec les organismes et leurs participants. Les étudiants, qui proviennent des différents programmes de la faculté des beauxarts, apprennent à développer une application communautaire de leurs arts. Au commencement, le cours s’appelait Concordia dans la rue. En partenariat avec l’organisme de Pop’s, le père Emmett Johns, ce cours donnait aux jeunes de la rue des moyens d’expression, de se faire voir et d’exprimer leurs voix. Par la suite, mes étudiants se sont impliqués dans plusieurs autres milieux.

 

Quel est l’intérêt de réunir des étudiants et des participants d’organismes communautaires dans le cadre de journée culturelle telle que Concordia Day ?

L’important ici est d’établir une rencontre et d’amorcer un dialogue. À travers les arts, on peut exprimer ses joies, ses angoisses, sa colère. De voir une oeuvre nous permet de comprendre que l’on n’est pas seul à vivre de telles émotions. En discuter avec les autres permet de briser l’isolement. Ça permet aussi de réaliser que peu importe notre milieu ou notre langue, on partage le même langage et on peut se comprendre. Nous tentons aussi d’amener les étudiants à se comprendre eux-mêmes afin qu’ils puissent être conscients de leurs propres biais d’interprétation, car certains préjugés nous empêchent parfois d’avoir accès au sens véhiculé par les oeuvres exposées. C’est le rôle de l’université d’apprendre à l’étudiant à développer un regard critique face au monde et face à lui-même.

 

Les institutions ont-elles pour rôle de faciliter l’accès à la culture au plus grand nombre ?

Les musées, par leur mission de conservation, sont essentiels si nous voulons garder nos artistes. Rendre les oeuvres accessibles aux publics est un juste retour des choses. Après tout, elles appartiennent à tous. La journée Concordia Day était une première et espérons que de telles occasions puissent se répéter plusieurs fois. L’université de son côté permet de mieux comprendre l’art. C’est important face à l’immense réservoir de créativité que nous avons au Québec. On ne réalise pas toujours l’importance des beaux-arts. D’être exposé à différentes formes d’arts est essentiel pour développer sa créativité. Malheureusement, il demeure aussi que la visite des grands musées est assez chère, donc limitée à un certain type de public. La simple question des heures d’ouverture est un problème, la plupart des musées ferment entre 17 h et 18 h presque tous les jours de la semaine. J’imagine que tout cela est faute d’un financement adéquat, il n’empêche que cela diminue l’accessibilité à monsieur et madame tout le monde.