Baby-Sitter, une œuvre qui se démarque

Éric Cyr, Le Trait D’Union Du Nord, Fermont

Le théâtre de création en tournée Baby-Sitter, a été présenté à l’auditorium de la polyvalente Horizon-Blanc en collaboration avec Les Voyagements, le 4 octobre dernier. Cette représentation a attiré une foule nombreuse de 110 spectateurs, ce qui constitue un exploit étant donné que c’est habituellement l’humour et les spectacles de musique qui ont la cote à Fermont.

La dramaturge Catherine Léger, qui a reçu le prix Gratien-Gélinas 2006, dénonce avec cette pièce les positions convenues et envisage les rapports hommes femmes sous d’autres angles. L’auteure bouscule une vision bien pensante, rassurante et convenue des rapports sociaux conventionnels et explore la thématique du féminisme dans la marche vers l’égalité entre les sexes en passant par des sujets complexes souvent inconfortables, mais dont le débat s’avère nécessaire, comme la culture du viol, le sexisme et la misogynie souvent des phénomènes sous-jacents et banalisés de la société occidentale moderne.

Les acteurs lumineux livrent des interprétations brillantes dans un scénario qui atteint sa cible en réussissant à interpeller le spectateur et à le provoquer constamment en suscitant une réflexion. L’auteure de la pièce s’inspire d’une blague douteuse devenue une pratique fortement contestée pour son mauvais goût. Cette plaisanterie a créé une mode où des hommes s’amusent à interrompre des reporters féminins en direct à la télévision en disant à la caméra « Fuck her right in the pussy » d’où la première phrase percutante de la pièce « Fourre là dans l’cul ! » qui déstabilise le public et annonce avec panache et à tambours battants les couleurs de la trame qui s’amorce.

Cette comédie grinçante nous plonge au cœur de la question du féminisme et de la confusion qui l’entoure en ces temps où le féminisme fait parler de lui sur toutes les tribunes, accusé par les uns de vouloir écraser ou castrer les hommes, défendu bec et ongles par les autres qui l’estiment plus nécessaire que jamais.

Catherine Léger plonge dans le vif du sujet et réussit un coup de maître en épluchant toutes les facettes de celui-ci tout en réussissant à faire rire par des situations loufoques allant jusqu’à l’utilisation d’un godemiché par une actrice, la blonde du sportif de salon, qui vient d’accoucher et qui donne la réplique à la gardienne qui se métamorphose bientôt en boniche. Les comédiens sont empreints de nuances, constamment sur la corde raide entre vérité et caricature oscillant entre authenticité et mauvaise foi tout en faisant preuve d’autocritique. Victoria Diamond est particulièrement convaincante dans le rôle de la baby-sitter surtout considérant que le français n’est pas sa langue maternelle. Une pièce marquante qui ne laisse personne indifférent. Fermont peut être fière d’avoir accueilli cette œuvre à la fois unique, visionnaire et innovatrice. Quelques spectateurs ont participé à une discussion en compagnie d’un animateur et des comédiens après leur performance.