Vue par satellite des marais du lac Mégantic qui furent fatals à l’expédition Arnold.

La rencontre des Amérindiens et des Européens

Sébastien Giguère, Le p’tit journal de Woburn,Woburn

C’est au début de juillet 1629 que le lac Mégantic voit un visage pâle naviguer sur ses eaux pour la première fois. Envoyé par Champlain à la demande d’un chef montagnais, un émissaire remonte la rivière Chaudière et le lac Mégantic vers la Kennebec afin d’établir une alliance avec les Abénaquis, qui deviendront les alliés traditionnels des Français contre les Iroquois.

Peuple de la nation algonquine, les Abénaquis occupent à l’époque un vaste territoire correspondant grossièrement au Maine, au Nouveau-Brunswick et au Québec à l’est du fleuve. L’étymologie du terme abénaki est une association de « lumière » et de « terre », ce qui explique qu’on les nomme parfois peuple du soleil levant, du matin ou de l’est.

Dans les décennies qui suivent, Français, Anglais et Américains explorent et utilisent cette route sillonnée depuis des millénaires par les Amérindiens. Éclaireurs anglais, missionnaires français, espions, coureurs des bois et expéditions militaires défilent sur le lac Mégantic. La plus célèbre est celle du colonel Benedict Arnold, en 1775.

En plein cœur de la révolution américaine, George Washington tente d’envahir le Canada et de prendre Québec aux Anglais. La stratégie est d’attaquer par la vallée du Saint-Laurent puis de surprendre l’ennemi avec un second bataillon arrivant par la Chaudière. L’expédition d’Arnold va cependant s’enliser, littéralement, dans les marais du lac Mégantic qui ne figuraient pas sur sa carte. Des 1 100 hommes qui quittèrent Cambridge au Massachusetts au début de septembre, seulement 600 d’entre eux, affaiblis, parvinrent jusqu’à Québec deux mois plus tard. Le siège fut un échec et les survivants retraitèrent par la vallée du Saint-Laurent.

Pour les Abénaquis, décimés par les Anglais et encerclés par une présence européenne de plus en plus importante, l’heure est sombre. Leur population en déclin va graduellement cesser de circuler dans la région pour finir par se réfugier dans les villages d’Odanak, près de Sorel, et de Wôlinak, près de Trois-Rivières. Ces deux réserves amérindiennes abritent aujourd’hui près de 500 et 200 personnes respectivement, et l’on pense que la population de Wôlinak s’est constituée à partir d’une migration en provenance de la région de Mégantic.

Pour les Européens, comme pour les Amérindiens avant eux, la région des montagnes frontalières reste d’abord un territoire de passage. Son climat rigoureux et son relief accentué découragent l’établissement permanent. Ce n’est que dans la seconde moitié du XIXe siècle que des hommes et des femmes affronteront ces conditions difficiles pour tenter de prendre racine dans ce pays de montagnes et de froid.

 

Mégantic, un toponyme d’origine abénaquis

Le nom du mont Mégantic, emprunté à celui du lac, apparaît sous cette graphie et d’une façon continue dans divers documents depuis la seconde moitié du XIXe siècle. La plus vieille mention remonte à l’arpenteur F. W. Blaiklock qui écrit en 1863, dans sa description du canton de Marston : « … the north-east slope of Megantic Mountain ». Les sources les plus fiables font remonter ce mot à l’abénaquis. En 1884, le chef abénaquis Jos Laurent le tirait du mot namakottik signifiant « lieu où il y a de la truite de lac » ou « lieu où il y a beaucoup de truites ». La linguiste Janet Warne, à la suite d’un inventaire toponymique effectué en milieu abénaquis, proposait en 1979 l’origine Namagôntekw, signifiant « au camp des truites saumonées ». Une autre version provient du père Joseph E. Guinard, dans Les Noms indiens de mon pays, qui attribue en 1961 le nom à une corruption de Mangatik signifiant « gros bois » ou « gros arbre » en algonquin.

Le mont Mégantic fut aussi connu sous les appellations de Saddle Mountain, mont Saint-Léon, Saint-Joseph ou Chesham. D’autres lieux du Nord-Est américain portent des noms à consonance semblable, comme le lac Mooselookmeguntic et le mont Megunticook au Maine, qui, lui aussi, fait partie d’un parc et surplombe un lac du même nom.

La linguiste Janet Warne, à la suite d’un inventaire toponymique effectué en milieu abénaquis, proposait en 1979 l’origine Namagôntekw, signifiant « au camp des truites saumonées ». Une autre version provient du père Joseph E. Guinard, dans Les Noms indiens de mon pays, qui attribue en 1961 le nom à une corruption de Mangatik signifiant « gros bois » ou « gros arbre » en algonquin.

Le mont Mégantic fut aussi connu sous les appellations de Saddle Mountain, mont Saint-Léon, Saint-Joseph ou Chesham. D’autres lieux du Nord-Est américain portent des noms à consonance semblable, comme le lac Mooselookmeguntic et le mont Megunticook au Maine, qui, lui aussi, fait partie d’un parc et surplombe un lac du même nom.