Une entrepreneure qui n’a pas froid aux yeux

Guillaume Rosier, Le Trait d'union du Nord, Fermont, le 7 septembre 2015

Cette année, Pousse Partout! fête ses 15 années d'existence. L'histoire de cette entreprise unique en son genre est indissociable de celle de sa fondatrice, Francine Marcoux. Cette Fermontoise volontaire et déterminée est allée jusqu'au bout de sa passion de toujours, l'horticulture.

Qui l'eut cru? Au nord du 52e parallèle, dans une ville surtout connue pour son industrie minière, se trouve une oasis de verdure et de couleurs : la jardinerie de Pousse Partout!. Les Fermontois pourront en témoigner; il est bien agréable de flâner au milieu des arbustes, fleurs et autres plantes. Les bonnes odeurs de thym, romarin ou marjolaine viennent chatouiller les narines. On passe à côté d'hémérocalles, ces fleurs comestibles au gout d'endive sucrée. Plus loin se trouve du mizuna, cette nouveauté culinaire qui s'apparente à la roquette. Ce mirage n'aurait pu devenir réalité sans la détermination d'une personne, Francine Marcoux.

 

La genèse

 

Diplômée de l'Institut de Technologie Agroalimentaire, avec une spécialisation dans les fruits et légumes et la production en serre, Francine Marcoux arrive à Fermont en 1985. Elle est embauchée par le Club social, qui vient de monter six serres en vue de produire des fruits et légumes pour la population. Francine gère la production, composée essentiellement de tomates et de concombres. En plus de Fermont, les villes de Labrador City, Wabush et Sept-Îles sont approvisionnées. Cependant, le succès n'est pas toujours au rendez-vous. Francine Marcoux se souvient : « À l'époque, nombreux étaient ceux qui préféraient payer 1,10 $ une livre de tomates du Mexique plutôt que de débourser 1,25 $ la livre de tomates fermontoises, pourtant fraichement cueillies et sans produits chimiques. La conscience environnementale n'était pas aussi développée qu'aujourd'hui. »

En 1987, en raison notamment de couts de chauffage trop importants, le Club social vend les serres à la Ville de Fermont. Francine reste en poste et encadre le développement de 84 jardins communautaires, qui ont été tirés au sort parmi les Fermontois. En 1990, en raison du contexte économique difficile, la Ville cherche à réduire ses couts. Les serres sont démontées et finissent par déménager à Saint-Jean-Chrysostome. « Je suis tout de même restée à l'emploi de la Ville et je me suis notamment occupée de l'entretien des espaces verts », explique Francine Marcoux.

 

Lancement à partir de presque rien

 

À la fin des années 1990 et au début des années 2000, la Ville coupe dans ses budgets d'aménagement paysager et d'entretien. Francine, toujours à l'emploi de la Ville, est contrainte d'échanger sa pelle à planter contre un camion dix roues. Cependant, très rapidement, la passion pour l'horticulture reprend le dessus.

En 2000, la grande aventure commence. Francine Marcoux décide de créer Pousse Partout!. Ses premiers contrats seront pour le centre de santé, l'école ou encore la compagnie minière Québec Cartier. Elle s'occupe entre autres de l'entretien de platebandes et installe des bacs à fleurs. L'horticultrice fermontoise raconte : « J'ai démarré avec presque rien. Pour me déplacer j'empruntais le pickup de mon compagnon. Je disposais d'une tondeuse et d'un sécateur. Je n'avais pas un sou en poche à investir. »

Au fil des ans, Francine enchaine de nombreux contrats d'aménagement paysager et d'entretien. Pousse Partout! se développe rapidement. En 2009, la Fermontoise loue un local sur la rue du Parc, lui permettant ainsi de vendre des plantes à la population. Trois ans plus tard, la jardinerie déménage dans le parc industriel et Pousse Partout! enregistré devient incorporé. « C'est un peu devenue mon ado », plaisante Francine. En 2013, l'entreprise se lance dans la production de légumes. Le succès est au rendez-vous. Cet été, de nombreuses familles fermontoises se sont abonnées afin de recevoir des paniers de légumes frais tout au long de la saison.

Afin de répondre à une demande croissante, venant à la fois de Fermont et du Labrador, Pousse-Partout! a fait l'acquisition de nouveaux équipements et a agrandi son terrain. Aussi, elle a démarré la construction de plusieurs serres tunnel qui devraient être achevées au printemps prochain, soit un investissement de près de 10 000 dollars.

 

Surmonter les défis du Nord

 

Développer une entreprise horticole au nord du 52e parallèle présente de nombreux défis que Francine Marcoux a dû surmonter. Le premier concerne le climat. La Fermontoise explique : « À Fermont, la saison démarre plus tard. On se retrouve souvent avec les restants des pépinières. Vu que les achats sont plus tardifs, les insectes ont le temps de se développer. Aussi, la possibilité de gelées au mois de juin peut grandement fragiliser les plantes. »

Tenant compte de la spécificité du climat, l'entreprise horticole s'est adaptée. Ainsi, un maximum de végétaux est produit sur place, réduisant par la même occasion les importants couts de livraison. Au fur et à mesure, Pousse Partout! a développé une expertise dans l'horticulture nordique. Les clients reçoivent des conseils adaptés à la réalité du milieu. Pour l'établissement des gazons, l'entreprise utilise la technique de l'hydro semis, favorisée par un climat frais et humide.

Parmi les autres défis se pose le recrutement du personnel. « Arrivé à la mi-aout, je perds mon réservoir de travailleurs étudiants » constate Francine. L'essentiel du chiffre d'affaire de l'entreprise se fait dans l'espace de trois mois.

Malgré les contraintes évidentes que pose le développement d'une entreprise horticole en région nordique et éloignée, Francine Marcoux n'a pas flanché. Par sa fibre entrepreneuriale, sa passion et sa persévérance, la Fermontoise a fait de Pousse Partout! un modèle de réussite.
 

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