Jean-Claude Côté et Anne Poitras, Le Phare, L’Autre vision, Grande-Vallée, octobre 2014
Quand on fait le tour de nos villages, on trouve à coup sûr, le nom de quelqu’un qui fait figure de légende. Depuis sa tendre enfance, jusqu’à un âge avancé, cette personne s’est démarquée de mille façons dans sa communauté. Fred Pellerin le dit dans un langage imagé de gens de son village. Il en est ainsi de notre concitoyen Lucien Minville.
Lucien Minville est né en 1941, dans un camp de bois rond, dans la colonie de Grande-Vallée à quelque trois kilomètres du golfe St-Laurent. Il faut dérouler son ADN et celui de sa femme Marie-May pour retracer les aptitudes artistiques de ses deux enfants et de ses cinq petits-enfants. Lucien a l’intelligence et l’amour du travail en même temps qu’un sens de l’humour qui fait de lui une personne allumée. Souvent, il blague pour voir la réaction de ses auditeurs. Son sens de l’humour, c’est la base de son talent de conteur. Il puise dans son riche vécu pour en extraire des histoires et des anecdotes que son excellente mémoire a su conserver précieusement. Mais aussi, grâce à ses registres dans lesquels il consigne religieusement les naissances, les décès, les mariages et évènements qui trament la vie quotidienne.
Son destin a été de vivre dans les bois pour la conduite d’hommes qu’on nomme « les bûcherons ». Lucien a été contremaître quelques années pour les entreprises suivantes : Charles-Eugène Bélanger, Julien Chicoine puis, il a pratiqué son métier durant trente ans pour la Compagnie Gaspésia de Chandler. Il a ainsi développé un amour pour les arbres de toutes espèces. Même les arbres généalogiques qui ont de moins en moins de secrets pour lui.
Lucien est entièrement dévoué à la vie de son village. Ainsi, il a été échevin et marguillier. Sur le plan social, notre ami s’est engagé pendant de nombreuses années, à la cause du Club Lions. Présentement, il fait partie du Conseil d’administration du Club FADOQ de sa paroisse. Propriétaire d’une érablière, il a participé pendant une douzaine d’années au comité du festival des sucres, il en a même assumé la présidence. À sa cabane à sucre, on retrouve les modèles et les pratiques d’antan, mais, aussi, une connaissance moderne, fine des pratiques sucrières. Rien n’est meilleur que le sirop, la tire, le beurre et le caramel d’érable de monsieur Lucien. Tout près de son érablière, l’été, il fait revivre avec son grand jardin de légumes et de petits fruits, le passé agricole récent de la colonie de Grande-Vallée. Ses produits faisant l’envie de ses visiteurs (et des ratons laveurs!), monsieur Lucien affiche sa générosité en distribuant souvent le fruit de son labeur.
Membre fondateur du comité Espace Esdras Minville, il a créé un musée à la mémoire d’un grand homme. Ce musée est toujours sous sa responsabilité. Il s’est lui-même imposé la tâche de rechercher et de recueillir les objets, les artefacts, les livres et autres documents relatant la vie d’Esdras Minville et l’histoire des bâtisseurs de son village.
À Grande-Vallée, les Minville font partie des familles souches. Là encore Lucien s’est senti interpellé. En 1997, il a organisé, ici à Grande-Vallée, un rassemblement de la grande famille des « Descendants de Pierre Minville » et il fait toujours partie de cette Association dont le conseil d’administration provincial siège à Québec. Écrire un livre ? Pourquoi pas ? Lucien a rédigé un livre sur les Minville de Grande-Vallée, enracinant leur descendance. Il contribue ainsi à la petite histoire de son village. Selon une rumeur, il projetterait pour bientôt une réédition enrichie.
Lucien est un homme de foi au cœur d’or. Encore et toujours généreux dans son implication, rendre service occupe une bonne partie de ses journées. Comme le disent les gens de son village, monsieur Lucien, c’est un livre vivant que l’on consulte comme référence sur une base régulière lors des obstinations, des interrogations et autres palabres qui animent le quotidien de ses pairs. La connaissance de la forêt, de la généalogie, de l’histoire, du patrimoine et sa collection de vieilles photographies font partie des passions qu’il sait partager. Il met tout son talent à conserver vivants ces trésors enfouis dans ses souvenirs afin d’enrichir la mémoire collective des générations actuelles et de celles à venir.