Prie-t-on dans votre hôtel de ville ?

Geneviève Gélinas, Graffici, Gaspésie, février 2011

L’automne dernier, l’abandon de la prière aux séances du conseil de la MRC Rocher-Percé a suscité un vif débat. GRAFFICI s’est demandé si des municipalités de la région perpétuaient cette pratique. La réponse est oui. En Gaspésie, 16 maires sur 42, soit plus du tiers, récitent la prière avant de commencer une séance publique.

Plusieurs maires interrogés par GRAFFICI disent prier simplement pour maintenir la coutume ou pour imposer le silence en début de séance. Mais pour le maire de Saint-Godefroi, Gérard Raymond-Blais, l’invocation au Seigneur Jésus qu’il récite signifie beaucoup plus. « Ce que j’appelle l’Être suprême ne peur que nous aider à prendre de bonnes décisions », juge-t-il.

À Port-Daniel-Gascons, le maire Maurice Anglehart récite le Notre-Père devant une assemblée debout. Selon lui, la salle du conseil est « la plus belle pour prier parce que publiquement, tu reconnais ton Dieu et tu lui demande de t’aider. » À ceux qui ne seraient pas d’accord, il répond : « Qu’ils se présentent comme maires. S’ils gagnent, ils feront ce qu’ils voudront. »

L’automne dernier, la préfète de la MRC Rocher-Percé, Diane Lebouthiller, a remplacé la prière récitée par son prédécesseur par un moment de réflexion, estimant que l’Église et l’État doivent restés séparés. La nouvelle élue a invoqué un jugement du Tribunal des droits de la personne, rendu en 2006. Ce tribunal a ordonné au conseil municipal de Laval de cesser la prière, estimant que cette pratique portait atteinte à l’exercice de la liberté de religion et de conscience de la plaignante, Danielle Payette.

Bernard Stevens, le maire de Grande-Rivière, a adopté ce « temps de recueillement » dans sa propre municipalité, même s’il se décrit comme « un catholique très pratiquant ». « Je dis le Notre Père dans ma tête, dit-il. Je ne suis pas plus mauvais si ne professe pas ma foi en beuglant. »

L’abbé Tony DeBlois, curé de Sainte-Thérèse, Val d’Espoir et Percé, avait protesté contre l’abandon de la prière à la MRC Rocher-Percé. Il persiste et signe. « Un temps de silence, c’est mieux que rien, mais non, ça ne me satisfait pas, dit-il. On est une société chrétienne, c’est une des dimensions qui ont fondé notre peuple. Pourquoi serait-ce à nous de s’effacer, d’enlever toute trace de spiritualité dans le débat? »

Ailleurs, l’abandon de la prière s’est fait sans heurts, Joël Côté, maire de Madeleine, a cessé de la réciter après être arrivé au pouvoir en novembre 2009. « Personne ne s’est plaint », dit-il. Même chose à Carleton-sur-Mer, au début des années 2000, où le maire de l’époque, Marc Tétreault, a arrêté de prier à la demande des citoyens. « Il n’y a pas eu de tollé », rapporte-t-il.

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