Gopesa Paquette, L’Itinéraire, Montréal, le 15 juin 2013
Présent dans l'esprit des Montréalais grâce à son porte-parole Dan Bigras et au fameux Show du Refuge, le Refuge des jeunes de Montréal est avant tout un havre où près de 600 jeunes en difficulté viennent trouver la paix chaque année. Frédérik, 23 ans, a recours aux services du Refuge depuis quatre ans. Au fil des années, la possibilité de venir prendre des moments de répit lui a permis de cheminer tranquillement vers son retour prochain aux études. «S'il n'y avait pas le Refuge, je serais présentement en train de dormir au parc Lafontaine ou au parc Maisonneuve, lance-t-il Le Refuge, c'est une branche lancée au travers d'un ravin qui t'empêche de tomber.»
Pour la directrice générale France Labelle, le Refuge est un territoire neutre. «Ici tu viens prendre une pause de la rue», affirme-t-elle. La rue fatigue et ces jeunes ont besoin de repos, C'est pourquoi le Refuge tente de recréer autant que possible une ambiance domestique. L’encadrement est minimal : un horaire souple et quelques règles fondamentales de respect et de convivialité permettant aux jeunes de souffler un peu.
Une fois les besoins de base comblés (un toit, des repas et de quoi s'habiller), les jeunes peuvent espérer reprendre le fil d'une vie bousculée avec l'aide des intervenants. «La question qui vient tout de suite après, est celle des papiers d'identité et du revenu, précise madame Labelle. Après, ce sont souvent les questions de santé physique et mentale qui vont émerger.» Près des trois quarts des jeunes qui fréquentent le Refuge consomment des drogues, ce qui apporte son lot de problèmes physiques, et environ un tiers présente un problème de santé mentale .
Fondé en 1988 sous l'initiative du Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal, le Refuge offre 45 lits aux jeunes de 17 à 25 ans ainsi qu'une panoplie de services de dépannage et d'accompagnement. Ce sont autant de courts passages de quelques jours pour dépanner que des séjours d'un mois lors desquels les jeunes peuvent se réaligner. «Notre objectif est de les aider à ce qu'il y ait un passage vers autre chose, dit madame Labelle. Certains jeunes nous arrivent en ne sachant même pas quel jour on est.» Pour la plupart c'est du court terme, un lieu où trouver un peu de répit, retrouver ses repères et imaginer des solutions aux problèmes les plus urgents.
Depuis 1999, 18 logements sociaux avec soutien communautaire sont offerts à des jeunes ayant vécu une grande instabilité résidentielle et des problèmes de consommation ou de santé mentale. Avec ceux-ci, un trio d'intervenants fait un travail d'accompagnement à long terme. Ces jeunes ont rarement vécu plus de trois mois au même endroit avant de trouver un logement avec le Refuge. «On veut s'adresser à ceux qui ont connu la plus grande instabilité et pour qui il y a eu le moins de réponse» , explique madame Labelle.
«Je n'ai jamais eu la prétention de réinsérer quiconque, concède-t-elle. La seule prétention que j'ai avec notre équipe, c'est de donner un coup de main, d'accompagner. d'aider, d'essayer de différentes manières de mettre du possible en place et de faire ça avec humanité.» La directrice insiste sur la question de l'humanité, rappelant la nécessité de se défaire du mépris entretenu à l'égard des gens en difficulté et de les aborder avec le même respect qu'on voudrait qu'on nous témoigne.