Vincent Di Candido, Échos Montréal, Montréal, novembre 2024
Le départ de l’actuelle mairesse de Montréal, Valérie Plante, qui ne souhaite pas représenter sa candidature pour un troisième mandat à la Mairie après huit années de gestion montréalaise, semble à mon avis être le signe d’une politicienne qui anticipait déjà avoir peu de chances de se faire réélire face à l’insatisfaction citoyenne considérable, et d’une manière générale le symbole d’un malaise tenace de gestionnaire à l’hôtel de ville montréalais qui semble se répéter maire après maire.
Depuis l’ère de Jean Drapeau, un précurseur qui a fait entrer Montréal dans l’ère mondiale de modernisme contemporain avec ses projets grandioses tels que les Jeux olympiques, le Métro de Montréal, Expo 67 et l’Île Ste-Hélène ; et sa vision d’envergure qui ne laissait pas de place aux ambitions trop petites, on dirait que les maires subséquents ont tous été plus ou moins incapables de gérer la vitalité nécessaire à une ville hétéroclite et cosmopolite comme Montréal, qui doit demeurer vivante, proactive, tout en étant bien gérée
On a certes eu un maire excellent gestionnaire-administrateur comme Jean Doré, ou un maire très sympathique comme Pierre Bourque. Mais sinon la récolte fut plutôt pauvre et aucun en tout cas qui ait l’envergure d’un Jean Drapeau, ou encore moins sa longévité de presque 30 ans à la gouvernance de la métropole montréalaise. Je vous invite d’ailleurs à vous abonner à notre site Patreon où vous pourrez notamment retrouver un intéressant et exhaustif bilan des maires de Montréal depuis plus de 5 décennies. Vous pourrez lire également notre texte sur le maire Drapeau, en page 4 ce mois-ci.
Dans le cas de Valérie Plante, plusieurs observateurs considèrent que son passage à la Mairie fut un des plus difficiles de l’histoire municipale. Le manque de propreté et l’insalubrité des rues ; l’Itinérance endémique ; la sécurité dans certains quartiers ; une crise du logement persistante ; l’extrême congestion dans le trafic routier, avec des chantiers qui pullulent tous azimuts sans la moindre apparence de gestion intelligente et cohérente ; les finances de la ville les plus malmenées depuis des décennies, versus un appareil bureaucratique boursouflé alors qu’elle avait pourtant promis de lui donner un sain régime-minceur.
Et son autoritarisme aussi, symptomatique de son règne dès le début de son avènement à l’hôtel de ville et qui l’amène ponctuellement à un prononcé et récurrent manque d’écoute à l’égard de citoyens qui majoritairement constatent chaque jour la détérioration des rues et l’amenuisement en qualité de vie d’une ville devenue méconnaissable depuis une décennie. Certes, il serait malhonnête de dire que la mairesse n’a rien accompli pendant ses huit années de gouvernance municipale.
Fidèle à son idéologie bienpensante, elle a développé le réseau cyclable plus que n’importe quel maire avant elle… au grand détriment des automobilistes malheureusement, dont le niveau de stress a explosé à l’exponentiel sous l’administration Plante ! Dans le même ordre d’idée, Projet Montréal a aussi probablement été l’administration la plus verte depuis Pierre Bourque.
Cela dit, il est indéniable que quand on pense à Montréal, deux choses nous viennent d’abord à l’esprit : les rues sont sales et mal nettoyées ; et la métropole croule sous les travaux et les chantiers beaucoup trop nombreux, planifiés de manière incompétente, sans aucune cohérence logistique, avec des cônes orange et des barrières dans chaque rue semble-t-il, et ce même quand les équipes de voirie n’y sont pas encore rendues dans leur planning. Même au sein des plus grandes ville du mondes, Montréal se distingue de par l’ampleur que ce manque d’efficacité logistique occasionne.
Très difficile d’éprouver encore de la fierté d’être Montréalais dans une ville devenue invivable pour beaucoup de gens, et plombée par une telle pléthore de problèmes. On s’en voudrait aussi d’oublier de mentionner les scandales ayant marqué ces années, comme par exemple les dépenses pharaoniques de Dominique Ollivier à l’Office de Consultation Publique de Montréal (OCPM), ou encore le fréquent – et choquant – manque de sensibilité de Valérie Plante envers la langue française et la culture francophone. On se rappellera par ailleurs son cynisme opportuniste quand dès les jours suivants sa première élection en tant que mairesse, elle s’était empressée de hausser les taxes municipales malgré sa promesse électorale à l’effet contraire.
Au final, il n’y a qu’une chose qu’il convient de demander : la Ville de Montréal est-elle dans un meilleur état depuis l’arrivée de Valérie Plante qu’avant son règne ? Et la réponse claire et sans équivoque est un retentissant : NON. On ne peut dès lors s’empêcher de penser que c’est surtout la réalisation lucide de son mandat plus médiocre que tiède qui incite la mairesse à ne pas vouloir se représenter dans la prochaine course à la mairie montréalaise.
Malheureusement, on dirait que dès qu’un politicien ou qu’une personnalité publique décide de « prendre sa retraite» ou d’orienter sa carrière sur une autre voie, tous les critiques de jadis deviennent soudainement pleins de miel et de compliments, comme si la fin d’une carrière effaçait l’incompétence ayant pu marquer celle-ci. La vérité franche et crue est que la mairesse ne s’inscrira pas dans l’histoire comme une bonne gestionnaire de la ville, et son parti Projet Montréal n’a pas été, et n’est pas, une bonne administration pour Montréal.
Notre métropole et ses citoyens méritent un(e) vrai(e) bon(ne) gestionnaire, avec une meilleure intelligence logistique, et une réelle vision d’avenir autre qu’un peu de verdure, une obésité de pistes cyclables à l’excès, et des travaux à la petite semaine. Au-delà des quelques opportunistes de carrière parmi ceux qui semblent déjà s’orienter à l’horizon électoral municipal, la prochaine gouvernance de la ville doit être le pivot de la renaissance d’une belle et grande ville, joyau francophone en Amérique du Nord, vibrante et sécuritaire, cosmopolite et dynamique, commercialement viable et politiquement importante, qui nous rendrait fiers partout dans le monde.
Nous devons impérativement administrer plus intelligemment notre ville, réduire son empreinte bureaucratique hypertrophiée, tout en proposant des grands projets novateurs et modernes, en Arts, en Technologies, en Culture. Avoir de l’ambition et se donner les moyens de nos ambitions. Nos prochains politiciens municipaux doivent évoluer, et faire évoluer Montréal.