Sébastien Michon, Le Val-Ouest, Valcourt, mars 2024
On entend habituellement beaucoup parler d’aide alimentaire pendant la période qui précède le temps des Fêtes. Mais comment cette aide s’articule-t-elle le reste de l’année dans la région du «Val-7»?
Une histoire de longue date
Le soutien aux personnes dans le besoin dans la région de Valcourt existe depuis des décennies. Le Valcourtois Clément Beauchemin est l’un de ces témoins de la première heure. Il s’implique dans la communauté depuis 52 ans. Plus particulièrement au sein des Chevaliers de Colomb.
Il se souvient de la situation dans les années 1960. « À l’époque, trois organismes offraient du soutien : la Fondation J. Armand Bombardier, les Filles d’Isabelle et les Chevaliers de Colomb. Ils ont voulu coordonner tout ça ensemble pour ne pas dédoubler l’aide. C’est ainsi qu’ils ont créé, en 1967, l’Oeuvre de bienfaisance de Valcourt. Il y avait ainsi un panier par demande », se rappelle-t-il.
Fin des services de l’Oeuvre de bienfaisance
En 2021, les organismes impliqués se sont à nouveau interrogés sur la façon d’offrir des services dans la région. « La Fondation recevait une demande de l’Oeuvre de bienfaisance et une autre du Centre d’action bénévole de Valcourt et région (CABVER). Nous nous sommes dits : aussi bien que l’Oeuvre se jumelle avec le CABVER », explique Clément Beauchemin.
C’est ainsi que d’un commun accord entre le CABVER et l’Oeuvre, cette dernière a cessé ses activités en décembre 2021. Le CABVER a alors tout naturellement pris la relève.
Louise Girard, qui travaillait déjà pour les deux organismes depuis 2011, est coordonnatrice des services alimentaires. C’est elle qui voit à la bonne marche du jardin communautaire, de la cuisine collective, des repas communautaires, du dépannage alimentaire, des paniers de Noël, etc.
Dépannage alimentaire à l’année
Le dépannage alimentaire est un service offert à l’année, deux après-midis par semaine. Le CABVER offre des aliments à des personnes dans le besoin. Pour garnir les tablettes et frigos du CABVER, quatre couples de la région se relaient à tour de rôle pour aller chercher, depuis 2016, ces denrées au IGA Ouimette Fille et Fils de Valcourt. Clément Beauchemin et son épouse font partie de cette équipe de bénévoles.
Ce service est-il régulièrement utilisé? « C’est très rare qu’une personne vienne chaque semaine. Sauf pour une situation ponctuelle, où, par exemple, quelqu’un aurait perdu son emploi et n’aurait rien devant lui. La plupart des usagers ne viennent qu’une fois par mois ou une fois par deux mois. Selon leur situation », expose Louise Girard. Environ 150 personnes utilisent ces services à un moment où l’autre pendant l’année. Des gens en provenance des sept municipalités de la région de Valcourt.
« Un roulement de nourriture continu »
Deux frigos et deux congélateurs permettent de stocker temporairement les aliments. « C’est un roulement de nourriture continu. Le CABVER est l’intermédiaire de ce que les bénévoles nous rapportent du IGA. Si on en reçoit beaucoup, nous en redonnons beaucoup. Et vice versa. Nous donnons ce que nous avons. Et les gens sont très conscients de ça », ajoute-t-elle.
Elle précise que c’est de l’aide alimentaire et non pas une « épicerie ». « Les personnes ne savent pas ce qu’ils vont recevoir. Ce n’est pas la première qualité non plus. Par exemple de la viande arrivée à échéance qui a été congelée ou encore des fruits « poqués » qui ont été retirés. »
Utiliser des aliments abîmés demande de savoir bien les cuisiner. « Je donne souvent aux gens des conseils du genre : n’oubliez pas de faire de la compote de pommes. Ou encore : vous pourriez préparer un bon potage avec cette courge-là. J’offre mes services, au besoin », indique Louise Girard.
Les surplus de dons en argent, remis lors de la campagne des paniers de Noël, permettent, tout au long de l’année, de compléter l’offre alimentaire. Le CABVER peut ainsi acheter certaines denrées comme du lait, de la margarine, des œufs, des céréales, du riz, etc.
Jardin communautaire
Au service de dépannage alimentaire s’ajoute le jardin communautaire. «Nous offrons des parcelles de jardinage à prix modique. En priorité aux résidents de l’Office municipal d’habitation (OMH). Le jardin est d’ailleurs situé non loin de la Place Jeanne-Mance. Nous leur fournissons aussi une trousse de semences et de petits plants déjà démarrés. »
L’an dernier, environ 75 % des espaces disponibles ont trouvé preneur. « Ça fonctionne moins bien qu’à Montréal, où il y a une forte densité de population. Là-bas, il y a des listes d’attente pour avoir accès à une parcelle. Ce n’est pas tout à fait comparable », reconnaît-elle.
Le jardin communautaire de Valcourt fonctionne bien, mais tous les espaces disponibles ne réussissent pas à trouver preneur. (crédit photo : CABVER)
Repas communautaires
Il y a aussi les repas communautaires offerts aux personnes isolées, vulnérables ou à faible revenu. « Une fois par mois, le vendredi midi, nous offrons un repas à 3 $ pour environ 25 personnes. Une activité qui est rendue possible grâce au soutien de Centraide. »
Cuisine collective pour tous
La cuisine collective est quant à elle une activité ouverte à tout le monde. «Nous mettons à la disposition de la population un espace culinaire, incluant tous les accessoires. Certains groupes viennent aux deux semaines alors que d’autres viennent une fois par mois. »
Louise Girard explique qu’il s’agit d’une activité de socialisation qui permet aussi d’économiser des sous. « Grâce à Centraide, nous offrons des denrées sèches pour les recettes : farine, sucre, riz, cassonade, épices, etc. Les groupes se répartissent entre eux les coûts des autres aliments qu’ils décident de cuisiner ensemble. »
L’activité de cuisine collective, offerte à toute la population, permet de socialiser, tout en économisant des sous. (crédit photo : CABVER)
Récupération des réserves d’un « survivaliste »
Au fil des 30 dernières années, Clément Beauchemin a été témoin de toutes sortes de situation. Il se rappelle entre autres d’un événement survenu il y a une dizaine d’années. « Un homme de Maricourt avait dans son sous-sol un «bunker». Il amassait une grande quantité d’aliments pour survivre en cas de catastrophe. Après son décès, son neveu a contacté le CABVER pour tout nous offrir. Il est venu avec une van pleine. »
« Nous étions alors situé sur la rue Champlain, à Valcourt. Je ne disposais que d’un petit bureau avec une étagère et un congélateur pour mettre les denrées. Clément s’est donc offert pour entreposer toute cette nourriture chez lui. Nous avons fait une liste et on lui demandait, au fur et à mesure, de nous apporter tel ou tel aliment », complète Louise Girard.
La maison située sur la rue Champlain, à Valcourt, utilisée par le CABVER de 1992 à 2015. « Je ne disposais que d’un petit bureau avec une étagère et un congélateur pour mettre les denrées », se rappelle Louise Girard. (Crédit photo : CABVER)
« C’est tout naturel de m’impliquer »
Clément Beauchemin n’est pas prêt de quitter son rôle de bénévole. Il a d’ailleurs reçu, en 2021, une médaille du lieutenant-gouverneur pour son engagement. « C’est tout naturel de m’impliquer. Et je vais continuer de le faire. Tant que ma santé va me le permettre », confie-t-il.