Éric Cyr, Trait d’union du Nord, Fermont, février 2024
Un harfang des neiges a été secouru grâce à la vigilance d’un couple qui travaille pour la minière Arcelor Mittal qui s’est aperçu que quelque chose clochait dans la cour de leur maison de la rue Ericson à Fermont, le 26 janvier 2024, après qu’un grand corbeau s’est posé au sol dans une côte enneigée. En observant plus attentivement la scène, ils ont constaté que le rapace blanc de la famille des strigidés demeurait immobile sur la neige avant d’essuyer une violente attaque de l’énorme corvidé, le plus lourd des passereaux.
Mélissa Ayala a vu qu’un combat s’amorçait entre les deux volatiles avant de signaler la situation à son conjoint, William Dubé, qui s’est précipité dehors pour tenter d’intervenir. À son arrivée à proximité, un autre grand corbeau s’était posé afin de prêter renfort à son congénère. L’oiseau de proie en mauvaise posture avait réussi à emprisonner celui au plumage noir en le serrant entre ses griffes, mais risquait un double affrontement alors que le premier grand corbeau, qui lui avait picossé les yeux, tenait fermement son bec. À l’approche de l’homme, le complice ailé a choisi de mettre fin aux hostilités et s’est envolé en abandonnant les deux rivaux à leur sort. Constatant que l’altercation n’était pas terminée, M. Dubé, habitué dans sa jeunesse à manipuler des coqs et des poules dans le poulailler d’un oncle, s’est interposé entre les deux adversaires en écartant tranquillement le grand corbeau à l’aide de ses pieds avant de secourir le harfang des neiges. Le charognard au coassement lugubre a finalement secoué la tête en signe de résignation avant de déguerpir dans les airs, ce qui a mis fin à la bataille.
Sentant la détresse et la nervosité du prédateur aérien au regard hypnotique, les yeux jaunes du harfang se distinguent par la présence d’une troisième paupière en diagonale qui les protège du vent froid et du soleil aveuglant, le sauveteur improvisé lui parle calmement avant de réussir à empoigner ses deux pattes aux crocs acérés et à immobiliser ses ailes avant de le déposer minutieusement dans une boîte et de le transporter jusqu’à son garage afin de constater s’il avait des blessures et pour lui permettre de récupérer et de se réchauffer. Il remarque un petit filet de sang dans ses yeux et émet l’hypothèse qu’il aurait possiblement pu percuter la clôture du parc municipal, ce qui l’aurait assommé et déstabilisé, ou que cela pourrait avoir été causé par le picossement de bec du grand corbeau. À la suite d’une tentative infructueuse de joindre un agent de la faune par téléphone, un ami, qui passait par là, suggère d’appeler la Sûreté du Québec afin de rapporter la situation. Des policiers se rendent alors sur place et conseillent de tenter de libérer le harfang afin de voir s’il peut s’envoler, ce qui fut fait avec leur aide.
Originaire de L’Isle-Verte, M. Dubé, qui habite à Fermont depuis 13 ans, a souvent aperçu des harfangs des neiges au Bas-Saint-Laurent, mais c’est la première fois qu’il en voit localement. Mme Ayala confie : « Je suis heureuse d’avoir peut-être contribué à sauver ce bel oiseau. »
Quelques faits
La vision du harfang des neiges, que les Inuits nomment ukpik, est à la fois diurne et nocturne. Les couples de harfangs se forment habituellement pour la vie. Cette espèce est rattachée au genre Bubo, qui regroupe aussi les hiboux grands-ducs. Le harfang des neiges représente l’emblème aviaire du Québec depuis 1987. Il existe un conte inuit traditionnel intitulé Le grand corbeau et le harfang des neiges.