Richesse et diversité de nos patrimoines

Pierre Pruneau, Autour de l’île, l’île d’Orléans,  mars 2012

Le 27 février dernier, au Musée de l'Amérique française, se tenait le Rassemblement des patrimoines de demain, sous l'égide du Conseil de la culture des régions de Québec et de Chaudière-Appalaches. Sous la présidence d'honneur de l'historien Jean Provencher, plus de 120 participants tant artisans qu'étudiants en ethnologie ou en histoire ou directeurs d'organismes à vocation patrimoniale ont participé avec enthousiasme à cette rencontre. Le but était de permettre de définir les patrimoines de demain et de mieux comprendre les implications de la nouvelle loi sur le patrimoine culturel qui entrera en vigueur en octobre prochain.

M Provencher, récipiendaire du Prix Gérard-Morisset 2011, a déclaré d'entrée de jeu que «de patrimoine n'a rien de ringard, Il est la prise au sol essentielle pour se projeter vers l'avenir.» Il a convié tous les participants à une journée de solidarité et d'échange en soulignant les nouveaux défis auxquels ils seront confrontés pour définir le patrimoine immatériel et les paysages culturels patrimoniaux.

La journée a débuté par la présentation détaillée de trois projets patrimoniaux exceptionnels. D'abord, celui de Tristan Le Breton intitulé Territoires dans lequel son auteur, photographe de formation, a suivi pendant 10 ans l'évolution (?) d'un espace privé au coeur de la ville de Brossard donnant naissance à la création d'un power center d'une aliénation évidente. Ces photos noir et blanc montrent crûment comment on peut développer de façon anarchique des lieux sans ancrage avec nos traditions architecturales. Comment relancer ces espaces urbains? Quelles politiques du paysage doit-on mettre de l'avant pour empêcher de perpétuer de telles inepties?

Puis, Mme Magali Lavigne, de la Fondation Saint-Roch, est venue exposer un projet de chantier-école des métiers traditionnels du bâtiment. Ce projet vise à relancer les métiers traditionnels, à offrir des chantiers aux artisans et à faire reconnaître leurs compétences par l'UNESCO. Le presbytère de Saint-Roch serait le coeur du projet. Comme au Moyen Âge, l'apprenti deviendrait artisan puis maître après avoir fait son tour du Québec et reçu sa formation de maîtres qui pourraient même venir de l'étranger.

Enfin, M. Mario Duchesne, urbaniste impliqué dans la mise en valeur des bovins de race canadienne, est venu nous révéler l'existence dans Charlevoix, depuis 2007, d'un troupeau d'authentiques vaches de race canadienne. Cet animal, qui a quarre siècles d'existence, produit actuellement un fromage exclusif fait du lait de ce bovidé dont le cheptel, qui était de 300 000 têtes en 1850, était en voie de disparition. Même en France, la race d'origine s'est perdue et nous pourrions devenir ceux qui vont la réimplanter en Bretagne et en Normandie. La vache canadienne pourrait reprendre sa place dans notre décor et peut compter sur Fabienne Thibault, artiste québécoise de renom, pour faire la promotion de cette noble cause

Ensuite, on a présenté les grandes lignes de la Loi sur le patrimoine culturel du Québec qui contient plus de 265 articles. La raison d'être de cette loi est de rétablir une plus grande symétrie entre les pouvoirs du ministre et celui des municipalités, d'intégrer les communautés autochtones et de favoriser la participation des citoyens dans le processus décisionnel. Viennent se greffer à ces considérations administratives de nouvelles notions déjà en application en Europe touchant un élargissement du concept de patrimoine: en plus des objets strictement matériels, le patrimoine s'applique aussi au savoir-faire, aux pratiques transmises de génération en génération, aux événements et lieux historiques, bref à des concepts immatériels dont ceux de paysages humanisés et culturels patrimoniaux dont l'identification demeure encore nébuleuse pour plusieurs d'entre nous.

Le patrimoine immatériel devra être d'abord reconnu par la communauté et faire l'objet d'un accord municipal avant de passer à l'échelon ministériel. Ainsi, un paysage culturel patrimonial devrait répondre à l'un ou plusieurs des critères suivants: un territoire reconnue par une collectivité pour ses caractéristiques paysagères remarquables, présentant un intérêt historique, emblématique ou identitaire et qui témoigne d'une activité humaine significative. C'est sur la recommandation de la municipalité ou de la MRC que le gouvernement octroierait le classement. La municipalité serait responsable de l'administration du site nouvellement classé.

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