Coupe de ruban pour le Réseau Express Vélo (REV), le jour de l’inauguration citoyenne. Photo : Philippe Rachiele

Inauguration de REVe

Carla Geib, Journaldesvoisins.com, Ahuntsic-Cartierville, le 12 novembre 2020

Ce samedi 7 novembre a eu lieu l’inauguration citoyenne du premier axe cyclable du Réseau Express Vélo (REV) montréalais, l’occasion de profiter d’une météo exceptionnelle pour découvrir une nouvelle piste sécuritaire qui s’étend du coin Berri/Gouin jusqu’au croisement entre Des Pins et Saint-Denis.

Le projet du Réseau Express Vélo avait été présenté par la Ville de Montréal en 2018, s’est précisé en 2019, et a débuté en 2020 afin de mettre en fonction en novembre le premier axe cyclable nord/sud du REV, un projet qui se déploiera sur l’ensemble de la ville et s’étendra à terme sur 184km.

Grâce à ces neuf kilomètres de pistes longeant Berri, Lajeunesse, et Saint-Denis, vous pouvez désormais traverser l’île du nord au sud, été comme hiver.

 

La promesse de trajets plus sécurisés

« C’est un nouvel accès protégé vers le centre-ville », annonce Frédéric Bataille, porte-parole du regroupement citoyen Ahuncycle pour qui cette nouvelle piste quatre saisons est une véritable aubaine.

Le point de départ de ce premier axe étant situé dans l’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville, de nombreux résidants se réjouissent de ce nouvel aménagement qui rendra les déplacements en vélo plus sécuritaires.

« C’est extraordinaire, ça fait dix ans que je l’attends. Je ne pensais pas le voir de mon vivant. Ça fait longtemps qu’on veut des artères rapides et sécuritaires », se réjouit Cynthia Falaise, riveraine et professeure au collège Ahuntsic.

Cet événement n’est pas sans rappeler la collision entre un vélo et une automobile ayant causé le décès du cycliste Clément Bazin. Ce tragique accident a eu lieu en septembre 2018 à l’intersection Lajeunesse et Crémazie, zone désormais protégée par le REV. Les membres du collectif Vélo fantôme Montréal présents à l’inauguration ont d’ailleurs déposé des fleurs auprès des trois vélos blancs disposés sur le parcours en mémoire des cyclistes victimes d’accidents de la route.

 

Un déneigement prévu l’hiver

Le déneigement sera l’un des apports fondamentaux du REV pour les cyclistes. L’objectif est de rendre les pistes praticables les douze mois de l’année. Un point qui soulève néanmoins quelques questionnements.

Cynthia Falaise, venue en compagnie de son compagnon et de leur enfant, se dit désormais plus encline à se mettre en selle en toute saison : « Je n’ai jamais fait de vélo d’hiver et la seule raison était que je ne trouvais pas ça sécuritaire ».

Laurence Bozec et Damien Levrard, postés devant leur maison rue Berri en attendant d’apercevoir leur fils au milieu du cortège de cyclistes, sont emballés par ce REV qui passe devant chez eux. Ils se questionnent néanmoins quant à la manière dont sera assuré le déneigement des pistes une fois l’hiver installé.

« On va voir l’impact que ça va avoir pour nous en tant que résidants pour sortir l’hiver », explique cette mère de famille qui se demande où sera déplacée la neige retirée de la piste cyclable.

Damien Levrard se dit préoccupé par le comportement des cyclistes qui seront de fait plus nombreux à circuler non loin de son domicile : « Il faudrait civiliser les cyclistes, qu’ils aient au moins une lumière devant, parce que quand on sort le soir on ne les voit pas arriver, c’est dangereux ».

Selon ce riverain, les efforts doivent autant provenir des automobilistes que des cyclistes si l’on souhaite une amélioration de la sécurité sur les routes.

 

Montréal, ville cyclable ?

« Le vélo c’est la solution, le vélo ne coûte rien, le vélo n’endette personne, le vélo ne tue personne, le vélo améliore la santé avec un bilan carbone zéro, comme le piéton », affirme Jacques Desjardins, militant et co-fondateur du mouvement Le Monde à Bicyclette fondé en 1975.

Du point de vue de Jacques Lebleu, membre du comité citoyen Mobilisation Environnement Ahuntsic-Cartierville (MEAC), ce projet « structurant » participe notamment à la lutte contre le trafic envahissant et constitue un véritable « squelette, une colonne vertébrale à travers la ville ». Ce citoyen espère que le volume d’automobiles diminuera progressivement au profit de ce que l’on nomme la mobilité douce.

C’est d’ailleurs le propos de Laurent St-Cyr, propriétaire du Club Expresso Bar, un lieu qui accueille aussi bien les amateurs de café que les aficionados du vélo.

« Tout le monde qui a voyagé dans les villes un peu plus progressistes – si on peut dire comme ça – comme Copenhague ou Amsterdam, peut voir les bienfaits de ce genre d’aménagement », souligne ce commerçant de la rue Saint-Denis.

Aux yeux de Suzanne Lareau, présidente-directrice générale de Vélo Québec, ce n’est pas uniquement le quotidien des cyclistes qui sera favorisé grâce à ce nouvel aménagement, la rue sera apaisée « pour tous les usagers, que l’on soit piéton, cycliste ou automobiliste ».

 

Un événement mobilisateur

Sous un tel soleil, nombreux étaient les participants qui étaient attendus. Et nombreux, ils sont venus!

« Il fait extrêmement beau, c’est la recette parfaite », assure un agent du Service de Police de la Ville de Montréal chargé d’encadrer l’événement avant d’estimer à 3000 le nombre de personnes réunies.

Toujours dans le respect des règles sanitaires, de nombreux participants sont venus accompagnés de leur famille ou de leurs amis, ce qui n’a pas manqué de réchauffer le cœur de certains dans une période où chaque occasion de se retrouver est précieuse.

« Ça fait longtemps que je n’ai pas vu autant de gens, c’est tellement beau », s’est réjoui le commerçant Jacques Nacouzi ravi du succès de cette inauguration citoyenne dont il est l’organisateur.

Laurent St-Cyr, habitué à organiser des sorties entre cyclistes, a participé à l’organisation de l’événement. L’équipe du Club Expresso Bar attendait impatiemment l’implantation de ce projet qui constitue l’une des raisons pour lesquelles ils ont choisi de s’établir sur la rue Saint-Denis. Selon lui, ce changement va permettre de « retrouver une rue plus à l’échelle humaine ».

 

Une inauguration citoyenne « positive »

Dans une lettre ouverte publiée en août dans La Presse, des commerçants se sont opposés fermement au projet, mentionnant notamment la disparition sur la rue Saint-Denis de deux voies de circulation ainsi que d’un certain nombre de places de stationnement.

Jacques Nacouzi, organisateur mais également copropriétaire du Code & Café, a souhaité montrer les bienfaits du projet REV sur les enseignes de la rue Saint-Denis.

« J’étais un peu tanné que les gens parlent négativement du Réseau Express Vélo et que certains commerçants s’y objectent. Donc j’ai voulu créer un événement positif et ramener les gens sur la rue. »

Selon Laurent St-Cyr, ce nouvel aménagement est un moyen pour les utilisateurs de la piste cyclable de prendre le temps de découvrir – ou redécouvrir – certains commerces. Au regard des contestations qui se sont élevées contre le projet, il invite à « travailler ensemble » afin de faire bonifier cette rue qui a l’occasion de prendre un nouvel élan.