Louis-Serge Gill, La Gazette de la Mauricie, Trois-Rivières, mai 2019
On ne peut forcer le destin. À l’âge de 18 ans, Yann Mathieu devient paraplégique à la suite d’un accident de voiture. Contre toute attente, ce passionné de sport garde la forte conviction qu’il pourra, dès après son congé de l’hôpital et la fin de sa convalescence, demeurer actif physiquement.
Il faut convenir qu’au milieu des années 1990, des athlètes comme le marathonien André Viger et la championne d’athlétisme handisport Chantal Petitclerc se révèlent être des sources d’inspiration inestimables. Par conséquent, c’est en rêvant à ces modèles que Yann Mathieu s’accroche à l’idée de pratiquer un sport, quel qu’il soit.
Le hasard ne joue pas que des mauvais tours. Un jour, par l’entremise d’un article de journal, il apprend l’existence d’un groupe qui joue au tennis en fauteuil roulant… à Montréal. Aussitôt, ses parents l’encouragent vivement à saisir cette initiative, même si la famille habite alors à Grand‑Saint-Esprit.
Hormis faire du sport, le garçon souhaite aussi socialiser et rencontrer d’autres jeunes paraplégiques aspirants athlètes. Sans hésiter, Mathieu se trouve un entraîneur pour l’accompagner dans cette nouvelle pratique sportive. Au fil des entraînements, il se découvre un talent certain, que viennent consolider une mobilité inattendue et une bonne force de frappe.
Gagner en confiance
Une première victoire dans le cadre d’un grand tournoi en Floride lui donne une formidable confiance et lui attire l’estime du milieu. En 2000, Yann Mathieu se joint à l’équipe nationale. Selon les propos du principal intéressé, cela se traduit par un plus grand soutien (entraînement continu et professionnel, terrain payé, etc.), mais surtout par un appui sur le plan de la motivation afin qu’il aille jusqu’au bout de sa détermination et de son talent.
Entre 2000 et 2007, il dispute des matchs dans pas moins de 20 tournois par année ! À chaque joute, son objectif demeure le même : renforcer sa confiance en lui jusqu’à obtenir une participation aux Jeux paralympiques. Après sept années, soit en 2008, son rêve ultime se concrétise : il s’envole pour les jeux de Beijing.
Redonner à sa communauté
Charles Loranger, instructeur chez Tennis 3R, connaît Yann Mathieu depuis près de 10 années. Il n’hésite pas à reconnaître en son collègue un « fier compétiteur, un joueur de tennis très intelligent avec beaucoup de talent », tout autant qu’un homme attachant par son « côté chic type et son humilité ». En somme, lui et toute l’organisation en sont très fiers.
Et ils ne sont pas les seuls. Au fil des entrevues et des articles publiés au sujet de Yann Mathieu, un conseiller municipal de Grand-Saint-Esprit propose de nommer le terrain de tennis de la municipalité en son honneur. Touchant, cet hommage se trouve pleinement justifié par les multiples contributions de l’ex-athlète à sa communauté.
En effet, maintenant à la retraite, Yann Mathieu se consacre à l’enseignement de son sport aux athlètes paraplégiques tout comme aux personnes qui jouent debout. De plus, il coordonne des tournois d’athlètes en fauteuil roulant, une fois par mois, avec des joueurs provenant de partout au Québec. Cela, tout en chérissant un nouveau rêve, celui d’entraîner des joueurs de tennis qui pourront atteindre les sommets des joutes nationales et internationales. Autrement dit, dénicher un « Rafael Nadal en fauteuil roulant », comme il l’affirme si bien avec humour.