Pierre Mouterde, Droit de parole, Québec, septembre 2016
Alors qu’un appel d’offre de services a été lancé au cours de l’été par GRT Action-Habitation pour démolir le Centre Durocher; alors donc que tout indique qu’on se rapproche à grands pas de la destruction de ce bâtiment patrimonial situé dans le quartier Saint Sauveur, voilà que le provincial des Oblats, le Père Luc Tardif prend les devants et propose au maire Régis Labeaume, comme aux différents acteurs en présence, un projet de sortie de crise tout à fait prometteur.
De quoi s’agit-il ? D’un exercice collectif de recherche d’une solution bonne et viable pour tous et toutes; une solution qui passerait tout d’abord par l’organisation, sous l’égide des Oblats, d’une réunion le 18 octobre 2016 de tous les acteurs concernés. Cette rencontre viserait à permettre d’assurer en même temps la réalisation d’une Maison de la culture et de la construction de logements sociaux dans un espace qui n’entrainerait pas la démolition de l’édifice patrimonial du Centre Durocher. En fait, il s’agit d’une proposition tout à la fois novatrice et parfaitement viable.
Une proposition novatrice
Novatrice, parce qu’elle est à l’initiative des Oblats, congrégation qui a construit ce Centre dans les années 50 pour en faire un espace social et communautaire destiné au quartier Saint Sauveur, et qui ne l’a cédé dans les années 70 qu’à la condition expresse qu’il puisse poursuivre sa vocation publique et communautaire.
Novatrice aussi, parce qu’elle se veut une proposition apaisante, dans laquelle il n’y a ni gagnant ni perdant. Et dans laquelle on cherche d’abord à rétablir le dialogue, à favoriser la discussion, à ne rien brusquer, en somme à ne prendre aucune décision précipitée et sans retour.
Elle va d’ailleurs dans le sens de la proposition de moratoire avancée en juin dernier par le professeur en architecture de l’université Laval, Jacques Plante, et le professeur émérite en sciences de l’éducation, Antoine Baby. En fait, elle permet de satisfaire tout le monde : ceux qui arguent de la nécessité de logements sociaux, et ceux qui souhaiteraient que le bâtiment patrimonial du Centre Durocher puisse continuer à jouer son rôle d’espace public, culturel et communautaire.
Une proposition viable et bien plus performante
En plus d’être novatrice, elle est aussi tout à fait viable et, dans un sens, beaucoup plus performante que ce qui est actuellement prévu. Tout d’abord parce qu’elle n’implique pas des coûts de démolition et de décontamination d’un bâtiment patrimonial encore en bon état, mais qu’on devrait faire disparaître pour y construire des logements sociaux. Car il y a, tout près du Centre Durocher, un vaste espace de parking appartenant à la ville sur lequel on pourrait même construire plus de logements sociaux que n’en a prévu actuellement le groupe GRT Action- Habitation.
On pourrait ainsi faire d’une pierre deux coups : construire des logements sociaux, et en même temps sauver le bâtiment patrimonial tout en permettant à ce dernier de réactualiser sa vocation de lieu public et communautaire, en y faisant vivre — à des coûts tout à fait raisonnables — une véritable Maison de la culture dont tout le quartier ne pourrait que sortir enrichi.
En somme, cette proposition permettrait à ce qu’on reste fidèle à la mission que les Oblats avaient fixée au Centre Durocher, quand ils l’ont construit à l’aide de levées de fonds populaires dans les années 50, et dont ils ont pris garde de se départir, en 1977 pour un dollar symbolique, que sous réserve qu’on en garde vraiment la vocation initiale.
Comme le rappelle le Père Luc Tardif, provincial des Missionnaires Oblats de Marie-Immaculée : « Le projet de conversion du Centre en une Maison de la culture qu’on m’a présenté constitue à n’en pas douter la version moderne de cette mission » Il y a donc là une manière d’en finir une fois pour toute avec cette infernale saga de démolition qui va non seulement à l’encontre du simple bon sens, mais aussi des aspirations de larges secteurs de la population de Saint Sauveur.
Le comité des citoyens et citoyennes du quartier Saint Sauveur vient de donner son accord à une telle initiative. Il ne reste plus qu’à la conseillère du quartier, Chantal Gilbert, au maire et au GRT Action- Habitation d’emboîter le pas. À travers ce noble geste, ils feraient là oeuvre salutaire et apaisante. Qu’on se le dise : il y a là une solution qui serait bonne pour tous et toutes. Tous les espoirs sont encore permis.