Mario Dufresne, Le Cantonnier, Disraeli, avril 2025
D’abord un bref retour, histoire de savoir de quoi il en retourne. Grosso modo, le géant américain de l’enfouissement de déchets dangereux, Stablex, convoite un nouvel emplacement afin d’élargir ses activités à Blainville, au Québec.
Jusque-là rien de trop grave. Les déchets, surtout s’ils sont dangereux, il importe de s’en débarrasser le plus vite possible. Rapidement oui, mais pas n’importe comment. Et la méthode de coffrage utilisée par l’usine Stablex est de plus en plus remise en question, même le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) recommande au ministère de l’Environnement et de la Lutte aux changements climatiques (MELCC) de ne pas autoriser le réaménagement de la cellule 6 (la cellule supplémentaire pour recevoir plus de matières dangereuses qui est au cœur du litige) et c’est là une des premières inquiétudes de la Municipalité de Blainville, située non loin de Montréal, qui fut l’heureuse élue pour accueillir Stablex.
Mais, attention on n’est pas ici face à un nouvel épisode du syndrome « pas dans ma cour ». L’endroit choisi, c’est le gouvernement du Québec qui en a décidé l’emplacement, malgré les nombreuses protestations venues de toutes parts, mais et surtout, de l’Union des municipalités du Québec (UMQ) qui s’y est opposée dans son mémoire transmis récemment en Commission parlementaire. L’UMQ a ainsi réitéré son opposition au projet de Loi en demandant rien de moins que son retrait.
Car, c’est là que le bât blesse, un tel comportement de la part d’un gouvernement, quel qu’il soit, est inacceptable. C’est en quelque sorte bafouer les bases même de la démocratie. C’est faire fi des pouvoirs des instances municipales pourtant les mieux placées pour savoir ce dont elles ont besoin. C’est aussi ne pas tenir compte que ces personnes sont élues démocratiquement et, qu’au lieu de leur imposer quoi que ce soit à n’importe quel prétexte, on devrait a minima les consulter. Et ce sans parler des possibles conséquences écologiques sur la santé des populations environnantes.
D’ailleurs, comme le soulignait fort à propos l’UMQ dans son communiqué, « L’aménagement du territoire est une compétence municipale que le gouvernement du Québec se doit de respecter. En plus d’être une atteinte sérieuse à l’autonomie municipale, ce dépôt de projet de loi compromet également les efforts de protection des milieux naturels et remet en question les engagements du gouvernement du Québec en matière de préservation de la nature et de lutte contre les changements climatiques ».
Le projet de loi 93 a été adopté sous bâillon le 28 mars dernier, à une heure du matin. Blainville et la Communauté métropolitaine de Montréal ont déposé une demande en cour supérieure, qui a été rejetée. Retour à la case départ. Depuis 1983, 40,6% des matières enfouies venaient des USA. Quant au projet de cellule no 6, il nécessitera 50 hectares de boisés et 9 hectares de milieux humides.
Et si tout ça, demain, c’était chez nous ? C’est un peu, à mon avis, cette crainte qu’a exprimée aussi l’UMQ dans son soutien unanime à Blainville.