François Di Candido, Échos Montréal, Montréal, mai 2024
Les critiques à son sujet sont bien connues. La ville est sale. Des détritus jonchent bon nombre de ses rues et l’itinérance y est omniprésente. Beaucoup de commerces ont fermé depuis la pandémie et les finances de la ville sont peu reluisantes, plombées par une administration dépensière malgré ses promesses électorales. Et partout la Crise du Logement sévit, avec des loyers plus dispendieux que jamais. Et à tous ces problèmes, on dirait que l’administration municipale n’a pas de solutions, avec une mairesse impopulaire qui semble ne pouvoir compter que sur l’appui de la tranche démographique que l’on appelle la communauté bo-bo (bourgeois-bohèmes).
On parle bien sûr ici de la mairesse… de Paris, Anne Hidalgo.!. Hehehe, soyez honnêtes, hein, levez la main ceux qui pensaient que l’on parlait de la mairesse de Montréal Valérie Plante.!.?. Il faut quand même avouer que les similitudes sont frappantes entre les mairesses montréalaise et parisienne. Insalubrité grandissante, nombre de commerces en déclin, présence itinérante devenue endémique, impression de favoritisme exagéré à l’égard des cyclistes et au net détriment des automobilistes, sentiment de déconnexion avec la population, sévère pénurie de logements abordables, administrations dépensières et des finances publiques en bien plus mauvais état maintenant qu’avant leur avènement au pouvoir.
Comme quoi, on peut peut-être se consoler en se comparant. En tous les cas, pour se sortir de notre propre morosité municipale, je me suis dit que l’exercice serait intéressant de comparer les tribulations de Montréal avec les problèmes qui peuvent sévir dans d’autres grandes villes du monde, en commençant ainsi par Paris. D’une manière générale, outre les éléments susmentionnés, les grandes villes françaises souffrent d’une diminution du sentiment de sécurité citoyenne, avec une recrudescence des incidents de violence, causée notamment par un afflux migratoire mal maîtrisé et qui se conjugue avec un appauvrissement général de la population et de la classe moyenne, deux éléments toujours explosifs lorsque rassemblés sur une trop longue période.
Si on fait maintenant un tour du côté de l’Espagne et plus particulièrement Barcelone, on notera des préoccupations très similaires, dont une sérieuse problématique en ce qui concerne la propreté. Disons-le sans ambages, la capitale catalane sent mauvais, alors que les odeurs d’urine et de poubelles y « embaument » chaque quartier, une dégradation notamment due à une surabondance de touristes, dont le respect pour l’espace urbain semble s’être amenuisé comme peau de chagrin depuis le nouveau millénaire. Et de manière similaire à Montréal, la ville doit résoudre tout un lot de problématiques économiques, allant de d’une hécatombe de commerces obligés de fermer boutiques face à une économie inflationniste, à la difficulté à s’adapter aux changements climatiques, en passant par les frais administratifs grandissant d’une administration municipale boursoufflée. Et tout ça avec en arrière-plan un climat d’insécurité grandissant face à la croissance des incidents de violence, des vols à l’étalage et de la présence de drogues dans les rues.
On pourrait essentiellement prendre la même recette et la répéter pour se rendre dans plusieurs villes d’Italie. Les coûts du bâti immobilier y ont explosé, rendant les loyers de plus en plus inabordables et l’acquisition d’une propriété pratiquement inaccessible pour les ménages issus de la classe moyenne. Les commerces ayant pignon sur rue ont de plus en plus misère à subsister, les restaurants et les entreprises souffrent de carences en personnel et doivent composer avec de nouvelles générations qui n’ont plus l’emploi parmi leurs priorités principales. La collecte des déchets y souffre d’importantes déficiences (Naples, Florence) et certaines administrations municipales sont par ailleurs à nouveau gangrenées, même en notre ère moderne 2024, par une augmentation de la corruption bureaucratique.
Tiens, si on se déplaçait de l’autre côté de la planète, au pays des kangourous et de la « Land down under ». Peut-être plus que partout ailleurs dans le monde, l’Australie a été frappée de plein fouet par les changements climatiques et par une Crise du Logement qui échappe à tout contrôle. Ainsi, après les importants incendies et feux de forêts qui y ont dévasté près de 15 millions d’hectares de végétation et détruit près de 80 % du couvert forestier des Blue Mountains, ce sont les inondations qui ont plus récemment accablé le continent austral, un phénomène récurrent et directement relié aux changements climatiques. La ville de Sydney notamment, a été en 2022 la proie des pires inondations de son histoire moderne, engendrant le débordement massif de ses rivières Nepean et Hawkesbury, et causant le déversement de l’important barrage Warragamba, principale source d’eau potable de la ville.
Quant à l’immobilier, on le mentionnait, les prix se sont multipliés à l’exponentiel, pour atteint des sommets stratosphériques n’ayant plus aucune mesure avec la capacité de payer des citoyens. Nous avons nous-même publié un article relatant l’inaccessibilité croissante pour pouvoir se loger dans la majorité des villes canadiennes et dans plusieurs endroits de la planète. Le Journal de Montréal mentionnait récemment le cas d’un appartement 3 ½ tout à fait banal au prix de 1650$ par mois Plateau Mont-Royal et pour lequel une centaine de personnes ont fait la file pour pouvoir le visiter. C’est quelque chose qui est entré dans la norme en Australie, avec des files d’attente considérables pour le moindre appartement qui offrirait un prix « d’aubaine » sous les 3 000 $ australiens dans le centre-ville de Sydney, où le coût moyen d’un appartement une pièce frôle maintenant allègrement les 3300 $ australiens. (pour info : 1 $ canadien = environ 1,10 $ australien). Et la situation n’est guère plus reluisante à Melbourne ou à Adélaïde.
Bon, il semblerait que le proverbial gazon ne soit pas nécessairement plus vert ailleurs. Mais peut-être du côté de nos voisins américains.?. Hum… pas vraiment si on regarde du côté de New York City Manhattan. On ne parlera même pas des loyers, c’est un des marchés les plus inabordables au monde. Mais pour le reste, là aussi la présence itinérante a connu une montée fulgurante, le budget municipal est au point de rupture et la salubrité de la ville est presque un sujet de blague, plusieurs affirmant que c’est la surpopulation de rats qui gouverne maintenant la ville. Peut-être plus préoccupant encore est une certaine remontée de l’insécurité urbaine et des actes criminels et de violence depuis une décennie, alors que New York avait acquis une réputation enviable de parfaite sécurité touristique au tournant des années 2000.
Bref, on est à même de le constater, il suffit de regarder plus loin que notre propre horizon pour réaliser que beaucoup d’autres villes souffrent souvent des mêmes problèmes que nous. Ce qui, cela dit, n’excuse en rien l’incompétence d’une hypothétique administration au pouvoir depuis maintenant 7 ans, ni d’une hypothétique mairesse qui aurait pu, par exemple, se décrire comme « l’homme de la situation » avant son arrivée au pouvoir.