Vignette : Andrée Marchand a reçu la Médaille de l’Assemblée nationale du Québec, en 2014, des mains de la première ministre, Pauline Marois, en compagnie de l’abbé Raymond Létourneau, d’Armand Ferland et d’Hélène Bayard. ©Yvan Rancourt

Andrée Marchand, une femme remarquable

Normand Gagnon, Autour de l’Île, Saint-Pierre-de-l’Île-d’Orléans, avril 2024

Andrée Marchand est une figure emblématique de l’île d’Orléans, une femme-orchestre dont l’empreinte se retrouve dans une multitude de domaines au sein de sa communauté.

En effet, elle a œuvré sur le territoire de l’île à un nombre impressionnant de projets allant de la sauvegarde du Manoir Mauvide-Genest à la création de l’Espace Félix-Leclerc en passant par la présidence du Centre local de développement (CLD) de l’Île d’Orléans. Ses qualités d’administratrice et sa formation universitaire dans ce domaine ont été, bien sûr, un atout de première importance pour elle, mais c’est toute la communauté orléanaise qui a finalement bénéficié de ses compétences et de son implication bénévole durant plus de 50 ans.

Impliquée dès les débuts de sa carrière d’enseignante

Dès ses premières années d’enseignement (1968-) au Collège Marguerite-Bourgeois, où elle enseigne aux filles les mathématiques et la comptabilité, elle se distingue par son implication dans les activités parascolaires dont, notamment, le tutorat, la mise sur pied d’une caisse d’économie scolaire et les Jeudis artistiques. Elle collaborera également à la Fondation Georgette-Lavallée qui prend ses racines dans cette institution et qui se destine à soutenir les enfants de milieux défavorisés.

Par la suite (1972-), au cégep F.-X. Garneau cette fois, elle mettra en place un programme d’étude en bureautique, spécialement dédié aux femmes de plus de 35 ans, visant leur réintégration au marché du travail. Elle sera aussi la chef de ce département durant huit années pendant lesquelles, selon une de ses collègues de l’époque, Louise Lasnier, elle réussira, grâce à sa « détermination et à ses convictions, à amener finement ses collègues […] vers la réussite ».

Une femme de projets

Son influence ne se limitera toutefois pas au domaine de l’éducation. Au début des années 2000, le constat est fait de la dégradation avancée du Manoir Mauvide-Genest. Sollicitée par l’historien et photographe Pierre Lahoud, elle se lance, avec les organismes du milieu voués à la mise en valeur de l’île et à la conservation du manoir, dans la sauvegarde du bâtiment historique, coordonnant avec succès une campagne de financement et de mobilisation communautaire pour le restaurer.

Son leadership est également manifeste dans la création du théâtre Paul-Hébert, de Saint-Jean (1982-) où elle joue un rôle clé dans l’administration et la gérance du projet de construction avec Hélène Bayard aux relations publiques. Deux pionnières qui, dans la foulée de ce premier projet, vont en initier deux autres, soit une billetterie de forfaits de produits touristiques de l’île de même que la mise en place, avec Mado Tremblay notamment, de visites guidées de l’île et d’excursions pédestres à Sainte-Pétronille et à Saint-Jean.

À l’Espace Félix-Leclerc, elle sera responsable des budgets pour la construction de l’édifice et membre du C.A. et responsable des finances jusqu’à la mise en place de l’organisme (2002-).

Andrée Marchand ne se contente pas de s’impliquer dans des projets culturels. Rappelons sa présence aux C.A. de la SMVIO (voir les notes), de la Chambre de commerce, de l’Office du tourisme de Québec (C.A. et exécutif) et de la Conférence régionale des élus de la région de Québec (exécutif).

Malgré ses succès, Andrée Marchand reste humble et reconnaît que tous les projets auxquels elle a participé n’ont pas toujours rencontré le succès escompté ; elle cite particulièrement ceux de la piste cyclable et de la requalification de l’entrée de l’île.

Un passage remarqué au CLD

Son engagement au CLD de l’Île d’Orléans, où elle préside le conseil d’administration pendant plusieurs années, est particulièrement impressionnant. Cette période aura vu émerger quelques projets de haute volée comme le forum Vision 2020 (CLD/MRC, 2008) qui a eu le grand mérite de brosser, sous plusieurs aspects (patrimoine, agriculture, milieu de vie, tourisme et affaires), un tableau d’ensemble de la situation et d’esquisser nombre de nouveaux projets dont plusieurs sont encore en gestation (un centre culturel (!), un fonds d’intervention pour les équipements culturels, un marché public), en cours de réalisation (l’entrée de l’île) ou réalisés (programmation commune des loisirs, politique du patrimoine).

C’est elle qui, d’ailleurs, encouragera Chantale Cormier, actuelle directrice générale de la MRC de L’Île-d’Orléans, à soumettre sa candidature à ce poste. Cette dernière nous dira avoir été, surtout au début de sa carrière, « privilégiée d’avoir pu compter sur une femme mentor aussi chevronnée et [être] à même de témoigner de ses qualités personnelles et professionnelles ».

Énergique et empathique

Bien que l’énergie déployée par Andrée Marchand ait pu en désarçonner plusieurs, il appert que ceux et celles qui l’ont côtoyée de près ont aussi apprécié sa générosité et son humanité. Une voisine de Sainte-Pétronille, Violette Goulet, n’hésite pas à parler d’elle comme d’une « amie qui ne s’invente pas » et fait état d’événements où, sensible et attentive aux autres, elle a manifesté une grande disponibilité envers des proches souffrant de solitude. D’autres encore ont souligné le plaisir de discourir avec le couple Marchand-Turgeon, notamment de leur grand attachement au territoire de l’île, le tout, souvent, dans la bonne humeur et les fous rires.

Des signes de reconnaissance

Même si elle n’a pas toujours occupé le devant de la scène, la participation « intensive » d’Andrée Marchand à la vie et à l’animation du territoire n’a tout de même pas échappé à ses concitoyens. En plus de récolter en 2000 une mention spéciale pour le Grand prix de la fierté orléanaise, elle recevra, en 2014, des mains de la première ministre du Québec, Pauline Marois, la médaille de l’Assemblée nationale avec les Orléanais, Hélène Bayard, Armand Ferland et l’abbé Raymond Létourneau.

En guise de conclusion

Au cours de sa vie, celle qui a géré les destinées de l’Auberge La Goéliche pendant plusieurs années n’aura cessé de faire la preuve qu’une démocratie qui se veut vivante ne peut se passer d’une participation citoyenne, qu’il n’est pas essentiel d’être une élue pour exercer une influence sur le cours des événements et qu’il est possible d’œuvrer au bien commun tout en étant mère de famille et femme d’affaires.

Décidément, une femme remarquable !

Notes

1. Centre Local de Développement

Fondés en 1997 et financés par le gouvernement du Québec, les CLD, des organismes sans but lucratif, avaient alors pour mission de contribuer, au sein des territoires de chaque MRC, au développement local et au soutien à l’entreprenariat en réunissant autour d’une même table tous les partenaires régionaux. Ils ont été abolis en 2014. Source : Wikipédia.

2. Manoir Mauvide-Genest

Aujourd’hui reconnu comme une institution muséale officielle, le Manoir Mauvaise-Genest a connu une histoire agitée. On se réjouit maintenant des investissements importants pour la conservation du bâtiment de même que d’un cadre financier lui assurant non seulement la stabilité, mais aussi une programmation annuelle variée de même que l’animation culturelle du milieu.

3. Société pour la mise en valeur de l’île d’Orléans (SMVIO)

Cette société, fondée en 1981 par l’Abbé Raymond Létourneau, est un OSBL qui a pour mission, notamment, de contribuer à la promotion et au respect de la vie des habitants de l’île d’Orléans.