Maureen Jouglain, Journal des voisins, Montréal, avril 2024
Le 3 avril, une trentaine de résidents de Youville et de membres d’organismes de solidarité se sont réunis à l’Espace des Possibles dans l’arrondissement Ahuntsic-Cartierville pour entamer une discussion sur les besoins alimentaires du quartier.
« On veut générer quelque chose », explique Florence Brochu, membre du collectif Solon à l’origine de l’événement. Entre présentation du projet et échange plus informel, la rencontre visait à prendre le pouls des habitants du quartier.
Il faut dire qu’un an après la fermeture de l’épicerie Les Marchés Tradition, rue Lajeunesse, l’offre alimentaire est toujours limitée dans Youville. Alors que le secteur se rapproche d’un désert alimentaire, un projet d’épicerie solidaire pourrait répondre aux besoins de sécurité alimentaire.
Une autre façon de faire
Une épicerie solidaire ou autogérée vise à offrir un accès à des aliments sains à un coût abordable. Elle « se situe entre les supermarchés traditionnels et les banques alimentaires. Les aliments qui y sont offerts coûtent généralement moins cher que ceux à la valeur du marché » peut-on lire dans un rapport de l’organisme Territoires innovants en économie sociale et solidaire (TIESS).
L’idée d’une épicerie autogérée prend racine dans la coopération et le partage des responsabilités. Contrairement aux modèles commerciaux traditionnels, où la rentabilité prime souvent sur les besoins de la communauté, cette épicerie sera dirigée et gérée par ses propres membres, garantissant ainsi une implication directe dans les décisions et les opérations.
Comité de pilotage avec (de gauche à droite) : Martine Picard, Jean-François St-Onge, Patrice Potvin-Martel, Daphnée Le Templier et Florence Brochu (en bas). (Photo : Maureen Jouglain)
On pourrait y trouver, entre autres, des fruits et légumes frais, des produits secs ainsi que des produits hygiéniques. « Je serai en charge des frigos à bière », assure Jean-François St-Onge, membre de Solidarité Ahuntsic, qui fait parti du comité de pilotage.
Le Détour, un exemple qui fonctionne
Patrice Potvin-Martel était également présent lors de la rencontre pour partager son expertise. Son nom est bien connu dans le milieu des épiceries solidaires puisqu’il a géré Le Détour, un exemple de réussite dans le quartier de Pointe-Saint-Charles.
Ouverte depuis plusieurs années, l’épicerie Le Détour compte sur le dévouement d’au moins 250 bénévoles, qui offrent environ 3 heures de leur temps par mois : ranger les produits en rayon, tenir la caisse, faire le ménage après les heures d’ouverture, le travail est fourni par les membres pour s’assurer de répondre au besoin de la clientèle et de maintenir les prix plus bas.
Une trentaine de personnes assistaient à la rencontre d’information pour le projet d’épicerie autogérée dans Youville. (Photo : Maureen Jouglain)
Bien qu’un tel projet demande du travail non rémunéré de la part de ses membres, pour Patrice Potvin-Martel, ce n’est pas un travail comme les autres. C’est surtout un lieu social où les membres cherchent souvent à rencontrer de nouvelles personnes du quartier et tisser de nouveaux liens.
Et pour la suite?
Pour l’instant, le projet en est encore à ses balbutiements. Le comité de pilotage ou « groupe cœur » comme le nomme affectueusement Daphnée Le Templier aussi membre du collectif Solon, compte déjà 6 personnes. « Maintenant, on a besoin que d’autres s’emparent du projet », souligne-t-elle.
Mais l’idée semble plaire. Haroun Bouazzi, député de la circonscription de Maurice-Richard, s’était d’ailleurs déplacé pour l’occasion : « je sens de la magie dans cette salle », a-t-il dit, avant d’apporter son soutien au projet.