Maison-mère du couvent de la congrégation des Sœurs de Miséricorde. (Photo: Camille Vanderschelden, JDV)

Mystère autour de la vente du couvent des Sœurs de Miséricorde à Cartierville

Camille Vanderschelden, Journaldesvoisins.com. Ahuntsic-Cartierville, mars 2024

Le couvent des Sœurs de Miséricorde, situé à Cartierville, a enfin trouvé un nouvel acheteur. Laissé vacant depuis le départ de la congrégation en 2020, le lieu avait fait l’objet de deux ventes depuis 2018 avant de tomber dans les mains d’un syndic de faillite. Malgré la vente, l’avenir du bâtiment reste incertain. 

La saga du couvent de Cartierville continue de faire couler de l’encre. Situé au 12 435, avenue de la Miséricorde, l’édifice reste vacant depuis le départ de la congrégation religieuse en mars 2020. L’avenir de ce bâtiment, à l’emplacement prisé donnant sur la rivière des Prairies, est dès lors resté dans une zone grise.

Selon le registre foncier du Québec, le couvent de Cartierville a enfin trouvé un nouvel acheteur en février 2024. Il s’agit de M. Tahir Hanif, propriétaire des compagnies MultiCargo et Forum Travel situées dans le quartier de Parc-Extension. M. Hanif récupère donc le bâtiment des mains du syndic de faillite BLT Lapointe.

La vente s’est conclue par une somme de 4,7 millions de dollars avec une hypothèque de 700 000 $ dont ledit syndic est créancier. Contacté par le Journal des voisins (JDV) concernant l’avenir du couvent de Cartierville, M. Hanif n’a pas répondu à notre demande d’information.

Historique

Le 12 435, avenue de la Miséricorde a fait l’objet d’une première vente en 2018. L’acheteur, une société à numéro, a acquis le bâtiment auprès de la congrégation religieuse pour 7 millions de dollars. Le projet était alors de construire une résidence pour personnes âgées.

Les travaux de rénovation du bâtiment, largement contaminé par l’amiante, se sont néanmoins transformés en cauchemar. Le chantier avait été estimé à quelque 14 millions de dollars. À l’époque, le bureau d’enquête du Journal de Montréal révélait l’affiliation de certains actionnaires de l’entreprise propriétaire à la mafia et ainsi qu’à certains stratagèmes de financement privé douteux.

La compagnie a finalement déclaré faillite peu de temps après, en automne 2019. Les Sœurs de miséricorde, prises avec de nombreuses dépenses, ont donc regagné le bâtiment à titre de locataire.

La compagnie à numéro, désormais placée sous la protection de la loi sur la faillite, les a en effet laissées avec l’obligation de payer une partie des frais d’exploitation. De nombreux créanciers se sont eux aussi retrouvés sur la paille, dont l’architecte et l’entrepreneur du projet de construction.

La maison-mère des Soeurs de Miséricorde. (Photo: François Robert-Durant, JDV)  

Conclusion

Au printemps de l’année 2020, la quarantaine de religieuses qui y résidaient déménagent à Rosemont, aux appartements Square Angus. Le couvent de Cartierville doit alors fermer ses portes d’ici le 31 mars 2020.

La communauté de Cartierville et la congrégation religieuse sortante ne verront finalement jamais pousser le projet de CHSLD, longtemps souhaité par l’ensemble. Les sœurs voulaient aussi notamment conserver une partie de la mission afin qu’elles puissent être enterrées dans le cimetière adjacent.

La fondatrice de l’ordre, Rosalie Cadron-Jetté, était par ailleurs inhumée sur les lieux à Cartierville. Son tombeau a été déplacé dans la crypte de la cathédrale Marie-Reine-du-Monde, à l’annonce du départ de la congrégation religieuse en 2020. L’avenir du cimetière reste incertain dans le projet du nouvel acheteur, encore dans l’ombre.

L’ensemble conventuel des Soeurs de Miséricordes. (Photo: Camille Vanderschelden, JDV)

Mystère

L’arrondissement d’Ahuntsic-Cartierville ne serait pas au fait du nouveau projet de M. Hanif. La mairesse, Emilie Thuillier, affirmait en effet apprendre la vente du couvent de Cartierville au conseil d’arrondissement du 11 mars 2024.

« Nous ne sommes pas au courant lorsqu’une transaction immobilière a lieu. Cela étant, il y a une différence entre les fonctionnaires et les élus. Les fonctionnaires apprennent plus rapidement la proposition d’un projet, par la demande de permis. Mais nous, les élus, n’avons pas l’œil sur les projets», a déclaré Emilie Thuillier au JDV

Pourtant, la mairesse affirmait suivre le dossier de près à la séance du conseil d’arrondissement de novembre dernier. Le projet doit par ailleurs respecter le règlement d’urbanisme. Si le promoteur ne souhaite pas en faire un couvent, un permis devra donc être obtenu auprès du Comité consultatif d’urbanisme d’Ahuntsic-Cartierville, chapeauté par Jérôme Normand, conseiller de la Ville du district du Sault-au-Récollet. À ce jour, aucune démarche n’aurait été faite dans ce sens, selon Emilie Thuillier.

NDLR: L’historien Stéphane Tessier avait raconté l’histoire de la maison-mère des Sœurs de Miséricorde dans une capsule de l’Opération patrimoine du JDV en 2021.