Sébastien Michon, Le Val-Ouest, Valcourt, février 2023
La protection des milieux naturels commence à prendre de plus en plus d’importance dans le Val-Saint-François. Des propriétaires privés, la MRC, des municipalités et des organismes de conservation posent des actions très concrètes à cet égard.
Des réserves naturelles issues d’actions citoyennes
Grâce aux efforts de propriétaires privés et d’organismes, la région compte désormais quelques aires protégées, dont des réserves naturelles reconnues par le gouvernement. Par exemples les réserves naturelles du Lac-Brais (Racine), Ruisseau-Gulf (Racine), Rivière-au-Saumon (Racine, Canton de Melbourne et Saint-François-Xavier-de-Brompton) et Annedda (Ulverton).
La plus récente d’entre elles est la réserve naturelle Joseph-Armand-Bombardier. La famille de l’inventeur de la motoneige a choisi de céder à Conservation de la nature Canada un territoire de 440 hectares (1087 acres) le long de la rivière au Saumon ainsi que le marais de Kingsbury.
Des propriétaires travaillent aussi à de nouvelles réserves naturelles qui devraient voir le jour à Cleveland, Ulverton et Maricourt.
Inauguration de la Réserve naturelle Joseph-Armand-Bombardier au coeur du village de Kingsbury. À droite, la mairesse, Martha Hervieux. (photo : Laurent Frey)
« Les organisations locales sont nos yeux et nos oreilles »
L’organisme de conservation Corridor Appalachien est un acteur de premier plan à cet égard. Principalement actif dans les MRC de Memphrémagog et de Brome-Missisquoi, il est tout de même présent sur environ 20 % du territoire du Val-Saint-François. Depuis sa fondation, il y a 21 ans, Corridor Appalachien a permis, en Estrie, la conservation à perpétuité de 16 600 hectares (41 000 acres).
Sa directrice générale, Mélanie Lelièvre, explique que Corridor Appalachien agit en support aux organisations locales de conservation. Avec lesquelles il mène conjointement des projets. « Elles sont nos yeux et nos oreilles. Ce sont elles qui connaissent leurs voisins et leurs conseillers municipaux. Elles voient les opportunités et entendent parler d’une propriété qui est à vendre. Ce sont les meilleures intervenantes pour initier des projets de conservation. »
« Les organisations locales de conservation sont les meilleures intervenantes pour initier des projets de conservation », croit Mélanie Lelièvre, directrice générale de Corridor Appalachien. (photo : Charles Dion ©)
La SCCNRS, active dans le Val
C’est le cas de la Société de conservation du corridor naturel de la rivière au Saumon (SCCNRS). Un organisme qui œuvre depuis une vingtaine d’années dans le Val-Saint-François. Cet OBNL a créé et gère trois réserves naturelles à Racine et dans le Canton de Melbourne. La Société travaille aussi à la création d’une quatrième réserve, celle-là à Cleveland, pour protéger une grande forêt de chênes. Un écosystème forestier jugé exceptionnel.
Laurier Busque est actuellement bénévole pour cet organisme. Il en a aussi été administrateur pendant une quinzaine d’années. « Nous avons protégé ces propriétés-là pour des fins de conservation à perpétuité. Il n’y aura aucun développement ni aucune exploitation forestière ou minière. »
« Nous avons protégé ces propriétés-là pour des fins de conservation à perpétuité», explique Laurier Busque, bénévole à la Société de conservation du corridor naturel de la rivière au Saumon. (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)
La nouvelle génération d’élus, davantage ouverte
Les projets de conservation sont-ils bien perçus des instances municipales? Mélanie Lelièvre répond par l’affirmative. « À quelques exceptions près, la dernière génération de maires et mairesses est très ouverte. Le vent a tourné dans les aspirations environnementales des conseils municipaux et des administrations. Les municipalités savent qu’elles ont un devoir grandissant relativement à la protection du territoire. »
Sherbrooke est en un très bon exemple. La ville s’est dotée, en 2023, d’un ambitieux projet de protéger 45 % de son territoire en milieux naturels avec son Plan nature.
Dans le Val-Saint-François, la MRC s’est quant à elle donné pour objectif de conserver au moins 35 % des milieux humides et hydriques. Pour ce faire, elle a mis en œuvre, en 2022, un Plan régional des milieux humides et hydriques (PRMHH).
La MRC du Val-Saint-François a pour objectif de conserver au moins 35 % des milieux humides et hydriques avec son Plan.
« C’est important de préserver des milieux naturels »
Une orientation qui plait au maire de Saint-François-Xavier-de-Brompton, Adam Rousseau. Il explique que lorsque la MRC a présenté le PRMHH, sa municipalité a voulu aller plus loin. « Nous avons rajouté sur la carte des milieux qu’on voulait protéger », dit-il.
Pour Adam Rousseau, il est possible de tenir compte de l’environnement dans une planification municipale. « Je pense que c’est important de préserver des milieux naturels. Quand on parle de conservation, il faut trouver l’équilibre entre le développement de notre communauté et la protection de la biodiversité. »
Sa municipalité va d’ailleurs bientôt adopter une politique environnementale ainsi qu’une politique de communauté nourricière. Saint-François-Xavier-de-Brompton soutient aussi le projet Le Houppier. Un futur espace de vie intergénérationnel et écologique en plein cœur du village.
« Il faut trouver l’équilibre entre le développement de notre communauté et la protection de la biodiversité », affirme le maire de Saint-François-Xavier-de-Brompton, Adam Rousseau. (photo : municipalité de Saint-François-Xavier-de-Brompton)
L’agrandissement du Parc, une opportunité pour Racine
On entend un son cloche semblable du côté de la municipalité de Racine. Dans son mémoire remis au BAPE lors des audiences publiques de 2023, Racine affirme accorder une « grande importance au maintien de son couvert forestier ainsi qu’à la protection de ses lacs, milieux humides et cours d’eau. »
Bien que l’agrandissement du Parc ampute cette municipalité de 30 % de son territoire, les élus considèrent qu’il s’agit d’une opportunité. Ils souhaitent que le Parc serve de levier majeur au développement économique et communautaire de Racine. Par exemple en développant un volet nature et plein air, en collaboration avec l’école primaire Notre-Dame-de-Montjoie et l’école secondaire de l’Odyssée. Ou encore par le développement de tourisme écologique.
Dans son mémoire remis au BAPE, la municipalité de Racine indique qu’elle souhaite que l’agrandissement du Parc du Mont-Orford serve de levier majeur au développement économique et communautaire.
Les 10 prochaines années déterminantes
Selon Mélanie Lelièvre, les 10 prochaines années seront déterminantes. « Il faut accélérer le rythme de conservation », confie-t-elle. Pourquoi? Parce que, selon elle, la protection des milieux naturels permet une plus grande résilience. « Mettre en œuvre un vaste corridor d’aires naturelles protégées est probablement notre meilleure police d’assurances pour se prémunir collectivement face aux impacts des changements climatiques dans la région. »
Elle ajoute : « Il va falloir mettre le maintien de nos écosystèmes à l’avant-plan. Ce sont eux qui supportent la vie. Ils jouent un rôle très important pour l’ensemble de la société. »
« Il va falloir mettre le maintien de nos écosystèmes à l’avant-plan. Ce sont eux qui supportent la vie. Ils jouent un rôle très important pour l’ensemble de la société », rappelle Mélanie Lelièvre, directrice générale de Corridor Appalachien. (photo : Sébastien Michon – Le Val-Ouest)
Ce texte fait partie d’un dossier spécial sur la conservation des milieux naturels dans le Val-St-François :
Il choisit de protéger sa forêt pour les générations futures
La protection des milieux naturels prend de l’importance dans le Val
Qu’est-ce qui pousse un propriétaire à protéger la nature?