Nicolas Michaud, Journal des citoyens, Prévost, novembre 2023
Cumulant près de 30 années d’expérience en tant que superviseur de projets liés au traitement des eaux, le sagace capitaine de l’organisme Fondation Rivières, Alain Saladzius, se dit prêt à affronter d’autres tempêtes tout en gardant toujours le cap sur son trésor le plus précieux : H2O !
Récemment honoré par l’Université du Québec en Outaouais (UQO), l’ingénieur de profession se remémore l’émotion qu’il avait ressentie lors de cette journée fort spéciale : « C’est un sentiment de fierté qui est important puis aussi un bon encouragement à poursuivre encore quelques années dans la meilleure voie possible. Avec l’expérience acquise puis la reconnaissance, c’est sûr que ça nous donne une crédibilité quand on intervient auprès des municipalités et des organisations. » Profitant de la tribune médiatique engendrée par la remise de cette mention, le lauréat tient à évoquer les projets qui attendent la Fondation Rivières au cours des prochaines années.
Projet Certification
Grâce à l’expertise professionnelle de son équipe dévouée, la Fondation Rivières délivrerait une certification pour toute municipalité qui répondrait adéquatement à une série de critères sur la protection de l’eau. Ces critères concerneraient notamment la transparence informationnelle des autorités locales envers leur population au sujet des méthodes de gestion des eaux potables, usées et pluviales; l’efficacité du réseau hydraulique dans l’atteinte des objectifs fixés; et l’investissement financier dans l’entretien, la réfection ou la construction de ces infrastructures. Ce projet établirait une comparaison, voire une saine compétition entre les municipalités ou les bassins versants qui tenteraient d’améliorer leurs performances afin d’acquérir cette certification.
En attendant le moment opportun pour déployer ce plan, Alain Saladzius se montre avisé : « Je pense que les municipalités doivent être accompagnées, elles doivent être guidées dans tout ça. On comprend que les municipalités sont à court de ressources, c’est-à-dire en termes de personnel puis de priorités aussi. Il y a beaucoup de défis auxquels les municipalités sont confrontées, donc, pour la gestion de l’eau, je pense qu’il faut que les élus aient d’abord un bon portrait de la situation parce que si c’est déjà bien connu auprès des employés et des gestionnaires municipaux, je ne sais pas à quel point c’est le cas avec les élus. »
Projet AuditEAU
Développé par la Fondation Rivières, ce logiciel d’aide à la gestion des eaux usées municipales au Québec valorise la multitude de données d’exploitation, produites par les quelque 800 stations d’épuration et 4 600 ouvrages de surverse, qui sont collectées par le système informatique du Suivi des ouvrages municipaux d’assainissement des eaux usées (SOMAEU) du ministère de l’Environnement (MELCCFP). L’application AuditEAU permet de consulter, de visualiser, de comparer, de catégoriser et d’organiser ces millions de données brutes en un tableau de bord qui se comprend facilement.
Ce diplômé de l’École Polytechnique en génie civil ne cache pas sa fierté : « Donc, à partir d’AuditEAU, on peut sélectionner la rivière du Nord, par exemple. On peut sélectionner n’importe quelle rivière du Québec, on va avoir le portrait de performances de toutes les stations d’épuration et de tous les ouvrages de déversement sur la rivière avec un historique de 2017 à 2022. Donc, ça permet vraiment de voir les endroits où des améliorations sont possibles (les endroits où ça va bien, les endroits où ça va moins bien), mais avec la perspective de bien identifier, de bien cibler les investissements parce qu’il faut prioriser les meilleures interventions : celles qui rapportent le plus, qui coûtent le moins cher, qui procurent le maximum de gains environnementaux. AuditEAU permet de faire ça. »
Dans les Laurentides, seule la Régie d’assainissement des eaux usées de Piedmont, Saint-Sauveur et Saint-Sauveur-des-Monts (RAEU) en aurait fait l’acquisition, il y a quelques mois, pour évaluer ses performances. Le président de la Fondation Rivières espère que le cas de Piedmont incitera d’autres municipalités de la région à faire de même.
Projet ColiMinder
Conçu par Vienna Water Monitoring Solutions, le ColiMinder est un appareil de mesure et d’analyse de la qualité microbiologique de l’eau qui permet de suivre automatiquement l’évolution et le niveau de contamination dans une rivière en temps réel. Une information digne d’intérêt pendant la période estivale « si on veut avoir de la baignade, des activités nautiques », selon Alain Saladzius, parce qu’« à un endroit, il peut y avoir un débordement qui se passe à dix kilomètres en amont puis ça va vraiment prendre une journée avant que ça se rende à l’endroit où l’on est ». Certes, le prix de cette technologie innovante reste assez élevé; or, le cofondateur de Fondation Rivières suggère aux municipalités de se regrouper pour en assumer les coûts, et ce, au bénéfice de tout un chacun. Ces coûts n’ont d’ailleurs pas empêché plusieurs villes, régions et pays de se doter de cette machine : l’ingénieur honoré rapporte que la Ville de Paris a également l’intention d’utiliser cet appareil pour surveiller la qualité de l’eau de la Seine pendant les prochains Jeux olympiques d’été en 2024.
À propos de la rivière du Nord, cet humain hydrophile s’offusque de l’état de ce cours d’eau qui s’étend sur une centaine de kilomètres à travers les Laurentides : « Comme ingénieur en assainissement, c’était ma première rivière. J’ai travaillé sous plusieurs municipalités et la conception des stations d’épuration a été faite pour qu’on puisse se baigner dans la rivière du Nord. Partout ! Là, on est rendu en 2023, et il y a des problèmes, il subsiste des problèmes. » Juste-ment, pour pallier ce problème, l’expert propose d’installer de tels appareils à certains points stratégiques de la rivière afin de détecter les périodes propices aux activités nautiques. Sur cette idée, le principal intéressé va plus loin en souhaitant que les données transmises par cette technologie soient bientôt accessibles au grand public, soit au moyen d’une application mobile ou d’un site Web.