Jordane Masson, L’écho de Compton, avril 2023
C’est en 2016 qu’Alexis Longpré a décidé de venir s’établir à Compton, sa municipalité d’origine. Conjoint de Virginie Cloutier, le couple attend avec joie leur premier enfant cet été. Alors que Mme Cloutier est infirmière praticienne spécialisée en soins de première ligne, M. Longpré baigne dans un autre volet du système de la santé en tant que paramédic, le diminutif d’ambulancier paramédical. Il fait aussi partie de la brigade des pompiers volontaires de Compton depuis cinq ans. Il nous dévoile les coulisses de son métier pour les services ambulanciers qui est si peu mis de l’avant, mais qui permet de sauver des vies chaque jour.
Qu’est-ce qui vous a amené à devenir ambulancier ?
Comme plusieurs enfants, j’étais fasciné par les lumières, les gyrophares et le côté intense que dégage une ambulance. Je trouvais que le plus beau des métiers d’urgence était celui des paramédics. Ça m’allumait beaucoup. Après le secondaire, je me suis inscrit pour la technique en soins préhospitaliers d’urgence au cégep d’Ahuntsic à Montréal. La première année, avec les changements amenés par le fait de vivre dans une grosse ville, je dois dire que je n’étais pas très assidu dans mes études. J’ai décidé d’arrêter mes cours et je suis parti dans l’Ouest canadien pendant deux ans et demi. À travers mon voyage, il m’arrivait plein de situations où je réagissais comme un paramédic : quand quelqu’un se blessait, j’allais vers lui alors que les autres reculaient, etc. Ça m’a permis de voir que c’était ce métier qui m’appelait. J’ai donc repris mes études pour trois ans à Montréal pour, finalement, obtenu mon diplôme en 2014. Ensuite, j’ai commencé comme paramédic pour la Coopérative des paramédics de l’Outaouais (CPO). Après deux ans, ma conjointe et moi voulions nous rapprocher de notre famille en Estrie, donc j’ai rejoint la Coopérative de travailleurs d’ambulance de l’Estrie (CTAE) en 2016.
Comment sont régis les soins préhospitaliers ?
Les soins préhospitaliers au Québec, c’est du domaine du privé. Par contre, à Montréal, c’est une société d’État gérée par le ministère de la Santé qui s’appelle « Urgence santé ». C’est souvent là que de nouveaux projets sont implantés, puis partagés avec les autres entreprises et organismes dans le reste de la province. Sinon, on retrouve principalement des OSBL et des coopératives de travailleurs pour desservir la population du Québec. À Sherbrooke, où je travaille, c’est une coopérative. On se rend jusqu’à Magog, East Angus, Richmond, Valcourt et Stanstead. De son côté, la MRC de Coaticook est desservie par un OSBL nommé « Dessercom ». C’est le ministère de la Santé qui octroie les permis d’ambulance, un peu comme les compagnies de taxis. Les entreprises sont aussi régies par le gouvernement sur différentes règles, dont le nombre d’ambulances à rendre disponibles par région.
Comment fonctionne un appel au 9-1-1 ?
Quand l’opérateur-répartiteur au 9-1-1 comprend qu’il y a un besoin d’ambulance, il prend les informations de l’appelant, puis transfère l’appel à une centrale de répartition santé. Cet opérateur reste en ligne tout le long et envoie les informations recueillies au répondant médical d’urgence (RMU). Ce dernier va prendre l’appel en charge, demander à l’appelant de répéter ses informations pour confirmer le tout et lui donner des consignes à suivre, s’il y a lieu. Enfin, la demande va être envoyée à l’ambulance affectée au secteur de l’appelant avec l’adresse et le code Clawson qui informe rapidement sur le problème rencontré (arrêt cardiaque, agression, etc.).
Quelles qualités faut-il posséder pour devenir paramédic ?
Ça prend un bon sang froid, énormément de patience et de résilience. Il faut être capable d’accepter beaucoup de choses qui ne font pas nécessairement notre affaire, autant dans le système de santé et son organisation ou les traitements que l’on peut ou non donner. Il ne faut pas ramener tout ce que l’on vit à la maison, donc apprendre à se détacher de tout cela. Ce n’est pas tout le monde qui est prêt à voir et à vivre ce qui touche aux accidents, aux troubles mentaux, aux blessures et aux décès. Bref, il faut avoir une personnalité positive en général et être capable de parler de ce que l’on a vécu, ça aide beaucoup à évacuer la charge psychologique et émotive.
Qu’est-ce que vous aimez le plus de votre travail ?
J’adore le contact humain. En tant que paramédic, j’ai cette chance d’avoir un patient à la fois et de pouvoir lui parler, le mettre en confiance et l’écouter. J’entends son histoire, son passé, et ça me touche. En étant en première ligne, je rentre dans l’intimité de la personne, et ça peut créer des moments incroyables. J’essaie toujours de me donner à fond pour mon patient, d’être présent pour l’aider dans ce qu’il vit. C’est tellement gratifiant d’aider à sauver des vies.
LE SAVIEZ-VOUS ?
Au Canada, il y a trois niveaux de paramédics : soins primaires, soins avancés et soins critiques. Chaque niveau comporte certains actes qu’ils ont le droit d’exécuter, dépendamment des provinces. Au Québec, il y a surtout des paramédics en soins primaires, mais ceux-ci ont plusieurs actes qui leur sont permis de faire, dont l’administration de certains médicaments. De fait, ils sont, au Canada, les soins primaires qui peuvent accomplir le plus de choses. Il y avait, au départ, un besoin moins criant d’avoir des soins avancés et des soins critiques. Cependant, une majeure à l’université a finalement été créée, il y a quelques années, pour permettre de former des paramédics en soins avancés. On en retrouvait seulement à Montréal, mais, depuis deux ans, notre région a la chance d’avoir une équipe de jour. On y retrouve donc deux paramédics en soins avancés de jour, ce qui a permis une augmentation du taux de réanimations et de vies sauvées. Par contre, il n’y a pas de spécialisation en soins critiques au Québec pour l’instant.