De l’empathie et non du mépris dans nos CHSLD

Sylvain Lirette, Le Mouton Noir, Rimouski, Décembre 2022

 

Je connais le milieu de l’hébergement et de la gériatrie depuis les années 1980, d’abord à titre de bénévole puis comme intervenant en zoothérapie. J’y ai ensuite œuvré professionnellement comme technicien en loisirs et éducateur spécialisé. Hélas, je l’ai aussi connu personnellement lors de l’hébergement de mes grands-parents. Depuis maintenant dix ans, à titre de syndicaliste, je ne compte plus mes sorties médiatiques et mes interventions politiques auprès des personnes dirigeantes, toujours pour la même raison et avec la même passion : faire de ces milieux de soins anonymes des milieux de vie plus humains.

Avec la mésaventure de la pandémie de COVID-19, je croyais ne plus avoir à sensibiliser la population ET les instances politiques au manque de qualité et d’humanité de nos services d’hébergement…

J’apprenais dernièrement que le Québec est la troisième société la plus vieillissante au monde! Il est aussi bien connu que le Bas-Saint-Laurent est l’une des régions les plus vieillissantes au Québec. On pourrait et devrait être des précurseurs dans les soins et les services à offrir, on leur doit bien ça, à nos bâtisseurs et bâtisseuses!

Dans les CHSLD de tout le territoire, nous sommes à une éternité des bonnes pratiques pourtant élaborées par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS). L’ingrédient de base pour offrir des services de qualité et un milieu de vie adéquat en CHSLD est simple : de la stabilité. Sans entrer dans les détails puisque je l’ai fait à plusieurs occasions dans d’autres sorties médiatiques et politiques, le CISSS-BSL, par l’entremise de sa direction des ressources humaines et de ses relations de travail, va en sens contraire en traitant son personnel en bouche-trous : trop de routes de travail différentes et des horaires excessivement instables.

Paradoxalement, l’une des valeurs phares du personnel soignant en CHSDL, mise de l’avant à chacune des interventions, est une qualité humaine indispensable : l’empathie.

Cette valeur représente la plus grande lacune de l’employeur à l’heure actuelle. « Faites ce que je dis, pas ce que je fais! » J’ai entendu ça souvent dans des institutions autoritaires, voire militaires. Hélas, c’est pourtant la culture d’entreprise d’un système de santé monolithique, et c’est particulièrement vrai au Bas-Saint-Laurent.

En mai 2022, le ministre Christian Dubé disait qu’il souhaitait faire du MSSS un employeur de choix. En juin 2022, nous, du Syndicat canadien de la fonction publique, avons présenté nos doléances à son chef de cabinet dans leurs jolis bureaux de Québec. Depuis, silence radio malgré la campagne électorale et malgré la victoire de la CAQ dans Rimouski. Pourtant, il y aura bientôt un changement de garde à la tête du CISSS-BSL au poste de PDG : l’occasion rêvée pour faire la job qui s’impose si le ministre est vraiment sérieux dans son désir…

Selon ma pratique, mes espoirs et mon idéal, et vous serez sûrement d’accord avec moi, on doit ajouter de la vie aux années et non des années à la vie. Il est alors désespérant de voir notre réseau se désinvestir auprès de ses ressources humaines, et ouvrir le robinet des frais médicaux et pharmaceutiques afin de garder la clientèle bien sage à défaut de bien l’accompagner sur le plan humain. Il est scandaleux de médicamenter tout un chacun comme on le fait aujourd’hui, conséquence directe d’un problème d’instabilité du personnel. Et je ne vous parle même pas du coût de la judiciarisation des relations de travail, puisque l’employeur se fiche complètement de notre opinion et de nos droits. De toute façon, ce n’est pas le chef des relations de travail qui paye pour ce gâchis, mais bien les contribuables.

Pour reprendre les mots de la romancière Rita Mae Brown, « la folie consiste à refaire sans cesse la même chose, mais en espérant un résultat différent ». Alors, je citerai le « cheuf » des fous pendant la campagne électorale : « Continuons! »