Des deuchistes sur la TransQuébec-Labrador

Éric Cyr, Le Trait d’Union du Nord, Fermont, Septembre 2022

 

Des passionnés de voitures françaises Citroën 2 CV ont mené une expédition le long de la route interprovinciale TransQuébec-Labrador, qu’ils ont arpentée en caravane de quatre automobiles sur une distance de près de 1800 kilomètres (routes 389, 500 et 510) à bord de leurs véhicules en parcourant la fameuse boucle, inachevée du côté québécois, qui se termine en cul-de-sac à Blanc-Sablon sur la Basse-Côte-Nord où ils ont dû embarquer leurs automobiles à bord d’un navire afin de rejoindre la route 138. Le groupe de camarades a pris le départ à Victoriaville, le 25 août dernier, et leur long périple s’est terminé, le 16 septembre, à leur point d’origine.

Issus de différents endroits, les huit aventuriers, des retraités pour la plupart, ont effectué plusieurs voyages ensemble : le tour de la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine et la Maurice. Ces derniers ont aussi déjà participé à un grand rassemblement de Citroën 2 CV à New York. Ils sont fiers d’être les premiers à avoir réalisé ce parcours sur la Côte-Nord et au Labrador en deudeuches. Alain Grégoire et Nicole Sheinck de Brossard, Gaëtan St-Arnaud et Hélène Boulanger de Victoriaville, Freddy Pfeuti originaire de France près de la frontière suisse qui habite aujourd’hui à Coaticook, Bruce Grant d’Ottawa, Gabriel Aubertin de Knowlton en Estrie et Gilles Pelcot du village de Saint-Cyr-sur-Mer en Provence dans le sud de la France, ont relevé le défi de parcourir ce trajet nordique de plus en plus fréquenté par les touristes.

Selon les amateurs de ce type de mécanique, le moteur bicylindre refroidi à l’air d’une cylindrée de 375 cm3 à 602 cm3, selon les modèles et les années, est muni de cylindres opposés ce qui permet une facilité d’entretien déconcertante. Les deux pattes sont équipées d’une suspension légendaire molle qui fait leur spécificité.

« Les propriétaires de 2 CV sont accessibles et n’idolâtrent pas leur voiture. C’est une bagnole qui n’a rien en sa faveur, mais qui a conquis le cœur de ses adeptes et qui permet de créer des liens sociaux durables. C’est en quelque sorte un catalyseur de rencontres intéressantes et un vecteur de bonheur », confie Alain Grégoire, qui se fait un devoir, tout comme ses compagnons de route, de discuter avec les curieux qui viennent à la rencontre du cortège automobile en offrant même de petites promenades à l’occasion.

Bref historique

C’est en 1935 que le fabricant français de pneumatiques Michelin rachète Citroën alors en faillite. En 1937, le dirigeant de l’entreprise, l’ingénieur Pierre Boulanger, a l’idée de concevoir une voiture destinée aux classes sociales du monde rural et à faible revenu tout en ayant pour objectif de stimuler la vente de pneus de la maison mère Michelin. La même année, ce qui n’est certainement pas une coïncidence, le dirigeant nazi Adolf Hitler donne l’impulsion à la fondation de Volkswagen, ce qui signifie voiture du peuple en allemand, afin de permettre aux familles allemandes de posséder une première voiture. À l’aube de la Deuxième Guerre mondiale, Boulanger ordonne la destruction des prototypes 2 CV de type A déjà construit en 1939. Pendant l’occupation, il refuse de fournir les plans du véhicule au gouvernement allemand contrôlé par le dictateur fasciste. Un ingénieur n’ayant pu se résoudre à détruire le fruit de quatre années de travail avait caché un exemplaire des plans qui referont surface à la fin du conflit, ce qui permettra à Citroën de présenter un exemplaire du 2 CV lors du salon de l’automobile de Paris de 1948. Ce modèle sera commercialisé en France jusqu’en 1987 puis au Portugal jusqu’en 1990.