Le CACI, un phare pour les immigrants et réfugiés

Amine Esseghir, Journaldesvoisins, Ahuntsic, Mai 2022

 

Le Centre d’appui aux communautés immigrantes, le CACI, installé à Cartierville depuis bientôt 30 ans a voulu célébrer le 30 mai l’ouverture de son nouveau siège et ses trois décennies d’existence. Élus, partenaires: du beau monde a été réuni pour une réception haute en couleurs dans l’édifice du nouveau siège du CACI, boulevard Laurentien. Au moment où le Québec s’apprête à accueillir quelques centaines de réfugiés ukrainiens et augmenter le nombre d’immigrants, le rôle de cet organisme est plus que jamais d’actualité. Sa directrice, Anaït Alexanian fait le point de la situation avec Journaldesvoisins.com.

Jdv : Un deuxième avion est arrivé le 29 mai à Montréal avec 306 réfugiés ukrainiens, allez-vous les accueillir?

Anaït Alexanian : C’est sûr. Nous sommes déjà avec eux à l’hôtel pour faire une évaluation des besoins et faire un plan d’action. Ils arriveront ici, forcément. Nous avons réservé des appartements à la maison CACI [un OBNL d’habitation]. Nous allons les inscrire pour les cours de français, pour faire les démarches pour les logements, pour l’école.

Votre nouveau bâtiment est prêt depuis un peu plus de deux ans, mais c’est maintenant que vous l’inaugurez.

À cause du contexte sanitaire, nous n’avons vraiment pas eu de chance. D’un autre côté on s’estime heureux. Si nous n’étions pas dans nos nouveaux locaux, nous n’aurions pas pu donner de services en présentiel. Tout le bâtiment était fonctionnel. Nous avions l’espace nécessaire et nous avons pu installer des cabines sécurisées et poser des plexiglas.

Dans nos anciens bureaux [sur la rue de Salaberry], nous étions déjà tellement tassés que nous n’aurions rien pu faire avec les mesures sanitaires.

Vous voulez dire que lorsque tout le monde était en télétravail, les gens étaient au bureau au CACI ?

Quand tous les organismes étaient fermés, nous avons gardé nos locaux ouverts. Toute l’équipe était présente et tous ceux qui nous sollicitaient pouvaient venir nous voir, sauf s’ils étaient en quarantaine ou ne pouvaient pas se présenter parce que trop âgés, par exemple.

Vous avez fait construire votre nouveau bâtiment après plus de 25 ans d’activité. C’est carrément un immeuble sur mesure pour vous.

Nous avons dessiné le bâtiment sur papier, puis sur Excel. Nous avons dit voici ce que nous voulons. Combien de salles, de quelles grandeurs, quelle cuisine, quels bureaux puis nous avons donné cela à l’architecte. Donc ça prend de la vision. Il ne suffit pas d’avoir des rêves. Il fait aussi travailler très fort, pas seulement pour avoir le financement, mais il faut aussi de l’audace, parce que s’embarquer dans un projet de construction, ce n’est pas évident.

Combien de personnes le CACI dessert-il annuellement?

Cette année, nous avons compté 24000 personnes. Nous pensions que nous allions avoir une diminution de la clientèle avec la fermeture des frontières [le CACI a reçu presque 20000 personnes en 2020-2021]. Nous avons reçu des gens qui ne pouvaient pas trouver de services ailleurs.

Au CACI vous donnez des cours de français, vous aidez des immigrants et des réfugiés à trouver un emploi ou un logement, vous avez des activités très diverses, mais comment êtes-vous perçu par les gens qui vous sollicitent?

Ce qui nous identifie, c’est notre mission. Ce n’est pas de jolies phrases à mettre dans nos rapports. Plus encore, nous nous assurons que toute l’équipe partage cette idée de la mission. Durant la COVID, toute l’équipe était stressée. La mission veut dire que nous sommes essentiels que nous sommes présents, que nos portes sont ouvertes. C’est être toujours en première ligne lors de catastrophes humanitaires, d’arrivées massives de réfugiés. C’est aussi répondre quand le ministre ou le gouvernement a besoin de nous. Nous sommes là aujourd’hui pour accueillir les Ukrainiens. Nous avons été là pour accueillir les Syriens, les Irakiens, les Kosovars.

Nous sommes essentiels et cela veut dire aussi que nous devons nous sacrifier un petit peu. C’est cela l’identité du CACI.

Mais que trouve chez vous l’immigrant ou le réfugié ?

Nous voulons offrir un continuum de services parce que très rapidement, nous nous sommes aperçus qu’on ne peut pas dire à une personne qui vient suivre des cours de français, tu dois laisser ton enfant dans une garderie dans un autre coin de la ville, ou bien nous ne pouvons pas faire ton CV, ou te trouver un logement c’est pas notre travail. Pour un vrai service à la clientèle, il faut fournir aux nouveaux arrivants une prise en charge complète. Nous sommes le plus gros organisme au Québec. Il y a 97 personnes qui travaillent ici et nous avons toujours des besoins. Nous manquons de ressources.

Vous êtes une sorte de guichet unique. Pendant combien de temps une personne qui arrive au Québec peut-elle avoir besoin du CACI?

Les rythmes sont différents d’une personne à une autre selon son âge, son parcours migratoire, son pays d’origine, ses connaissances linguistiques. L’important pour nous, c’est de respecter le rythme de chacun. Nous avons des clients qui nous suivent depuis 30 ans. Ils viennent encore nous voir.