Progrès de la pandémie, ou pas

Colin  Griffiths, L’Écho de Cantley, mai 2021

« Ce n’est pas fi ni tant que la grosse dame n’a pas chanté. »Et  elle  n’a  même  pas  encore  commencé à faire ses vocalises. Ce proverbe de langue anglaise signifie  qu’il  ne  faut  jurer  de  rien  :  on  ne  peut  prédire  le  dénouement de la pandémie en cours avant qu’elle ait atteint sa conclusion. Nous  sommes  confrontés  à  un  torrent  furieux  de  cas  de  Covid-19  dans  l’Outaouais.  Nous  ne  parvenons  pas  à  maîtriser  la  pandémie;  nous  ne  parvenons  pas  à  aplanir  la  courbe.  La  troisième  vague  est  la  pire  jusqu’à  présent.

Je  ne  pense  pas  que  nous  devrions nous en étonner. Cette maladie est différente de toutes celles  que  nous  avons  connues  récemment.  Elle  se  propage  facilement,  elle  met  du  temps  à  se  manifester  pleinement,  et  nous  continuons  à  vivre  comme  nous  le  souhaitons,  malgré  l’isolement.

Mais  je  doute  que  nos  dirigeants  tiennent  compte  correctement  des  conseils  de  nos  épidémiologistes.  Je  ne  suis  pas  un  spécialiste,  mais  je  suis  capable  de  comprendre  et  d’interpréter  ce  qu’on  nous  dit.  Nous  ne  faisons  pas  tout  ce  qu’il  se  doit,  et  nous  faisons  des  choses  que  nous  ne  devrions  pas  faire.

Le  virus  du  SRAS  se  propage  dans  l’air.  C’est  dans  l’air  immobile  qu’il  se  propage  le  mieux,  dans  des  endroits  peu  ou  pas  ventilés.  Dans  les  espaces  ouverts,  il  n’y  a  pratiquement  pas  de  transmission  :  on  rapporte  qu’un  pourcentage  très élevé des cas sont contractés dans des espaces intérieurs. Il  est  donc  très  raisonnable  de  contrôler  l’accès  aux  espaces  intérieurs,  aux  endroits  qui  favorisent  les  contacts  étroits.  Il  est  très  raisonnable  de  pratiquer  l’hygiène  des  mains  et  le  port  de  masques,  même  chez  nous.

Par  contre,  il  est  peu  judicieux  de  limiter  l’accès  aux  espaces  extérieurs  et  aux  activités  de  plein  air.  Le  virus  ne  se  transmet pas dans ces circonstances. Nous ne devrions pas nous priver  d’activités  qui  contribuent  énormément  à  nous  maintenir  en  bonne  santé  physique  et  mentale.

Les  vaccins  vont  modifier  la  situation, mais il faut du temps avant qu’ils ne soient efficaces. Cependant, il ne faut pas croire que  c’est  la  réponse  à  tout.  Il  s’agit  d’un  virus  qui  mute,  comme  le  montre  l’incidence  de  nouveaux  variants,  qui  prennent  rapidement  le  dessus.  Nous  devons  nous  attendre  à  l’apparition  de  nouveaux  variants  à  mesure  que  la  pandémie  se  poursuit.  Jusqu’à  présent,  les  vaccins  semblent  réussir  à  combattre  les  mutations, mais rien ne garantit que les  vaccins  existants  continueront  à  le  faire.

L’une  des  choses  que  nous  devrions  faire  est  un  meilleur  triage. Nous introduisons enfin, dans  des  situations  limitées,  l’utilisation du test rapide. Pour les  personnes  qui  traversent  la  frontière  à  Buffalo,  le  test  rapide  est  maintenant  requis,  suivi  de  l’auto-isolement.  Il  s’agit  d’un  progrès  considérable  par  rapport  à  l’obligation  d’isolement  dans  un  hôtel,  à  un  coût  individuel  très  élevé,  pour les voyageurs arrivant par avion  à  Toronto.

Le  test  rapide  n’est  pas  aussi  précis  que  le  test  PCR  complet,  bien  qu’il  s’agisse  de  deux  tests  différents.  Le  test  rapide  recherche  une  protéine  virale,  tandis  que  le  test  PCR  recherche  l’ARN  viral.  Le  test  PCR est plus coûteux. Si la fiabilité du test PCR est évaluée à 9 sur 10, celle du test rapide est peut-être  évaluée  à  8.  Mais  le  test  rapide  est  moins  cher.

Les  deux  tests  présentent  de  faux  positifs  et  de  faux  négatifs.  Il  y  aura  plus  de  faux  résultats  avec  les  tests  rapides  qu’avec  les  tests  PCR.  Mais  le  problème n’est pas là. Si le test rapide  donne  de  vrais  positifs,  alors nous avons réussi à identifier  dans  la  population  testée  un  nombre  important  d’individus contagieux. Peut-être 95 % d’entre  eux  par  le  test  rapide,  alors  que  le  test  PCR  peut  en  identifier  98  %.  Dans  les  deux  cas, le triage est réussi et réduit le facteur R, un objectif majeur des mesures de santé publique.

En  l’absence  d’une  utilisation  généralisée du test rapide, nous devrions effectuer des contrôles de  température  partout  où  les  gens  doivent  accéder  à  des  bâtiments  publics,  comme  les  écoles,  les  bibliothèques,  les  lieux  de  travail,  les  centres  commerciaux,  les  théâtres  et  les  arénas.  La  perte  d’accès  aux  piscines  publiques  est  un  problème  grave  pour  de  nombreuses  personnes  qui  ont  besoin de la natation quotidiennement  pour  se  maintenir  en  bonne  santé.

Nous en faisons trop et nous ne faisons  pas  les  bonnes  choses.  C’est  l’une  des  raisons  pour  lesquelles  la  pandémie  n’est  pas  près  de  se  terminer.  Nous  ne faisons tout simplement pas assez  pour  limiter  sa  propagation  dans  nos  communautés.

Ce  n’est  pas  fi  ni,  loin  de  là.