Le chemin de l’assimilation

Vincent Di Candido, Échos Montréal, décembre 2020

À la lumière des dernières enquêtes journalistiques où des reporters indiquaient avoir visité plus de 200 boutiques et commerces à Montréal en y constatant l’incapacité de se faire servir en français, il appert que la Francophonie  Québécoise  se  dirige  vers  une  assimilation  croissante,  au  profit d’une anglicisation tous azimuts qui a beau jeu devant notre apathie collective.

C’est un constat navrant mais dont on ne peut plus nier la réalité ou l’urgence, quand on analyse la tendance comportementale des nouveaux venus issus de l’immigration, de concert avec la complicité tacite des gens d’affaires, le tout conjugué à l’inertie complaisante de beaucoup de nos politiciens.

Malgré les lois en place pour faire respecter le Français, celles-ci demeurent majoritairement non appliquées et on laisse dans une indifférence navrante l’anglais gagner sans cesse du terrain. Qu’on songe à la Loi 101, qui avait perturbé le paysage québécois après sa mise en place par le regretté Camille Laurin, ainsi que la plus récente Loi 21. Il n’y a pourtant rien d’irréversible là-dedans, il suffit de se remuer un peu le derrière et d’arrêter de nier les faits comme si l’on était issu de la philosophie trumpiste.

Pour  plusieurs  et  en  particulier  pour  les  adolescents  et  les  18  –  29  ans,  c’est  une  réalité  qu’il  faudrait  tout  bonnement  accepter,  étant  au  sein  de  ce  continent        nord-américain        largement  anglophone  et  en  raison  de  la  domination  de  la  langue  de  Shakespeare  pour  tout ce qui concerne l’électronique, incontournable en cette ère moderne où les enfants apprennent  à  manipuler  un  téléphone  intelligent  de  plus  en  plus  jeunes.  Cette  tranche  d’âge de la population est d’ailleurs celle qui est la plus indifférente au phénomène du recul du Français, leur langue d’héritage, qu’ils semblent considérer comme une chose du passé, alors que paradoxalement ils sont les premiers à se prétendre les défenseurs des droits de toutes les minorités culturelles « opprimées » de la planète.

En  attendant,  cette  mentalité  je-m’en-foutiste  se  reflète  abondamment  dans  les  commerces  de  Montréal,  qui  n’hésitent  plus  à  identifier  leur  boutique  avec  une  seule  appellation  anglaise  et,  pire  encore,  à  n’avoir  des  vendeurs  qui  ne  parlent qu’anglais malgré l’obligation légale de ceux-ci de respecter le droit de la majorité francophone au Québec à se faire servir en Français. On peut également réaliser de plein fouet notre mollesse collective à cet égard quand on constate le comportement des vagues d’immigration québécoise qui, paraissant trouver au Québec l’équivalent d’une république de pacotille et devant le manque de mordant de nos institutions, se contentent maintenant pour la plupart du simple apprentissage de la langue anglaise comme langue de choix.

De sorte que les entorses à la langue française sont désormais plus nombreuses que jamais, et pas seulement dans l’Ouest ou sur la rue Sainte-Catherine, qui historiquement ont toujours été plus laxistes quant au respect de la condition québécoise francophone. Ce mépris de la langue de Molière semble en effet maintenant se propager à toute vitesse vers l’Est et le Nord de Montréal, comme par exemple sur le Boulevard Saint-Laurent, avec des  noms  de  commerces  à  seule  connotation  anglophone  tels  que  :  Citizen  Vintage, Kitsch’n Swell, Oppen’s, Dime, Artgang, Off The Hook, Schreter, Jet-Setter et le Vieux-Montréal n’échappe pas à cette tendance avec des noms de commerce comme Franklin’s, Wolf & Workman, White Montreal, etc…

Devant  cette  marée  qui  prend  de  plus  en  plus  les  allures  d’une  hécatombe,  le  gouvernement  de  la  CAQ  se  doit  de  réagir  très  rapidement,  et  sévèrement.  Premièrement  en  n’hésitant pas à pénaliser les boutiques récalcitrantes, et deuxièmement en imposant aux nouveaux arrivants qui désirent s’établir en sol québécois l’obligation d’apprendre le Français. De plus, il serait pertinent d’offrir aux élèves de meilleurs cours d’histoire pour leur inculquer  quelques  notions  du  passé  plutôt  que  de  les  laisser  se  contenter  d’un  simple  pitonnage informatique anglicisé à tous vents, en leur soulignant les efforts innombrables de nos ancêtres depuis 400 ans pour sauvegarder l’héritage de cette magnifique et riche langue qu’est le Français, 5e langue la plus parlée au monde, mais 3e langue la plus répandue si l’on tient compte du fait que le Mandarin et l’Hindi détiennent les 2e et 3e rangs de  ce  classement  en  raison  de  la  massive  prépondérance  démographique  de  leurs  pays  d’origine.  C’est une fierté qui doit habiter tous les Québécois, afin de lutter contre l’annihilation qui nous menace et avant qu’il soit trop tard. Car, n’en doutons pas, en Amérique du Nord, ce sont nous les Québécois qui constituons une minorité menacée.

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