Lac d’Argent à Dudswell : Les citoyens inquiets

Fay Poirier, Le Haut-Saint-François, Cookshire-Eaton, le 2 septembre 2020

Les  citoyens  de  la  municipalité  de  Dudswell  s’inquiètent  de  la  situation  du  lac  d’Argent.  Des  analyses  effectuées  par  le  Regroupement des Associations  pour  la  Protection  de  l’Environnement  des  lacs  et  des  bassins  versants  (RAPPEL)  rapportent  une  présence  élevée  en  phosphore  et  en  coliformes  fécaux  qui  pourraient  être  une menace pour la santé des cours d’eau.

« Les campagnes d’échantillonnage  réalisées  aux  différents  tributaires  en  2016  montrent  que  le  ruisseau  Turcotte  et  le  tributaire  du  chemin  de  la  Presqu’île  constituent une menace pour la  santé  du  lac  d’Argent  »,  explique  le  RAPPEL  dans  son  rapport.  Selon  le  regroupement,  la  charge  en  coliformes  fécaux  rend  la  baignade dangereuse lors des pluies ou après celles-ci près de l’arrivée d’eau au lac. En 2017, d’autres prélèvements démontraient  des  résultats  qui  dépassent  plus  de  30  fois  les  critères  de  qualité  du  ministère  de  l’Environnement  et  de  la  Lutte  aux  changements  climatiques  (MELCC). « Comme nous le mentionnions dans le rapport de 2017, avec des concentrations  en  coliformes  fécaux  telles  qu’observées  dans  la  baie de la Presqu’île, il pourrait y avoir un risque pour la santé humaine », explique le rapport du RAPPEL. Près de trois mois après la réception des  rapports,  l’Association  protectrice  du  lac  d’Argent  de Dudswell (APLAD) n’observe  pas  de  changements.

Ayant effectué d’autres analyses,  elle  affirme  que  la  situation en 2020 est toujours problématique.  «  Au  niveau  des  suivis,  il  y  a  une  politique  qui  a  été  écrite  par  la  municipalité, mais au niveau des actions comme telles, je pense que tout est à faire ou presque  »,  explique  Sylvie  Lupien,  vice-présidente  de  l’APLAD,  faisant  référence  à  la  politique  de  gestion  intégrée de l’eau de la municipalité de Dudswell.

Au cours des dernières années, l’APLAD affirme être intervenue  souvent  auprès  des  autorités  municipales  pour  soulever  les  problématiques  récurrentes.  Parmi  les solutions proposées pour diminuer,  voire  neutraliser,  l’apport  d’eau  avec  des  valeurs  en  phosphore  et  en  coliformes  fécaux,  certaines  sont  de  juridiction  municipale  et  d’autres  interpellent  la  collaboration  des  producteurs agricoles du bassin versant et du groupe-conseil agricole  de  la  région.  Selon  l’APLAD,  respecter  une  largeur minimale des bandes riveraines et l’aménagement d’un  marais  filtrant  pourraient  avoir  un  impact  sur  la  qualité  de  l’eau  du  lac  d’Argent. Pour Mme Lupien, il serait important de mettre en application les règlements municipaux  déjà  en  place  pour l’environnement.

De  son  côté,  Mariane  Paré, mairesse de Dudswell, explique  qu’il  faut  nuancer  un  peu.  Selon  elle,  les  analyses anormales ont été prélevées dans une partie du lac où l’eau est stagnante et peu profonde. « Il y a eu des analyses  hors  normes  dans  une  partie du lac, à l’entrée d’un ruisseau.  Par  contre,  pour  toute la plage, celles qui sont faites  par  le  ministère  de  la  Santé, c’est coté A, c’est très bon », affirme-t-elle, ajoutant avoir conscience que ça peut être plus inquiétant pour les riverains  près  des  secteurs  stagnants. La vice-présidente de  l’APLAD  confirme  que c’est coté A, mais déplore que le  ministère  n’évalue  que  la  plage publique. « Il y a deux sections dans le lac où tu ne peux vraiment pas te baigner et  il  y  en  a  une  troisième  et  une  quatrième  où  sont  en  train de se former des zones où  les  gens  ne  peuvent  plus  entrer dans l’eau », explique-t-elle,  ajoutant  que  sur  la  plage  publique,  le  seul  test  qui  est  fait,  selon  elle,  c’est  pour  les  coliformes  fécaux. Le  gouvernement  ne  teste  pas  les  cyanobactéries  et  le  myriophylle  à  épis  qui  sont  très  présents,  estime  Sylvie    Lupien. La  municipalité  a  reçu  les  recommandations  de  l’APLAD  et  Mme  Paré  précise  que  «  c’est  entre  les  mains  du  comité  environnement.  Les  membres  se  rencontrent  prochainement  et ce sera à l’ordre du jour. »

Outre  le  taux  élevé  de  phosphore  et  de  coliformes  fécaux, les citoyens craignent également  l’envahissement  de  la  moule  zébrée  dans  les  cours  d’eau  de  la  municipalité,  puisqu’elle  peut  causer divers problèmes tels que  l’obstruction  des  canalisations  et  des  barrages,  la  prolifération  des  algues  et  la  perturbation  de  la  chaîne  alimentaire.  Présentement,  les  lacs  de  Dudswell  n’en  contiennent  pas,  explique  la  mairesse,  «  c’est  un  risque  qu’il  y  en  ait,  comme  tous  les lacs de la province. » Ce qui  préoccupe  les  résidents  est le fait que le lac d’Argent est  plus  vulnérable  à  son  implantation,  notamment  en  raison de son taux de pH et de calcium élevé qui contribue à la survie et la reproduction de la moule. L’humain demeure le  principal  responsable  de  l’implantation  de  ce  mollusque.  S’accrochant  à  la  coque des bateaux, la moule est  promenée  à  travers  les  lacs  de  la  province  si  les  embarcations  ne  sont  pas  bien  nettoyées.

L’APLAD  a  d’ailleurs proposé à la municipalité  d’interdire  l’accès  à  celles  provenant  de  l’extérieur, mais aussi d’ajouter un service  de  location  de  chaloupes à son offre de kayaks et de planches aux résidents et aux touristes. L’APLAD est un regroupement  composé  de  bénévoles  qui  vise  notamment  à  conserver la beauté naturelle du lac d’Argent ainsi que la qualité de ses eaux.