Diane Seguin

Diane Seguin : Encore et toujours passionnée de cuisine fraîcheur !

Jocelyne Aird-Bélanger, Ski-se-Dit, Val-David, juillet  2020

Diane Seguin est native de l’Abitibi, où elle a vécu une enfance heureuse avec sa famille. Ses parents priorisaient les études pour leurs deux filles. Diane a terminé son cours classique à Rouyn avant de poursuivre des études universitaires à Montréal. Elle a définitivement quitté l’Abitibi à 18 ans pour continuer ses études en lettres à l’Université de Montréal, où elle est arrivée en pleine effervescence de l’Expo 67’. Quel contraste et quelle vie excitante comparativement à celle trop calme de son coin de pays si éloigné de tout! Elle qui se trouvait là-bas privée de distractions intéressantes et d’expériences culinaires et gastronomiques, elle ne perdit pas un instant pour combler ce manque en fréquentant assidûment l’Expo et les nombreuses activités culturelles offertes tout naturellement dans la grande ville.

Après quatre ans à l’université, diplôme en linguistique en poche, elle commence à travailler au ministère de l’Éducation à Montréal, où elle passera une bonne dizaine d’années comme agent de développement pédagogique, puis poursuivra sa carrière dans une maison d’édition spécialisée en matériel scolaire, le Centre Éducatif et Culturel, où elle agit comme formatrice auprès des enseignant(e)s. Ce travail, dont l’horaire est en concordance avec le calendrier scolaire, lui laisse de longues vacances chaque été. Elle en profitera pour voyager intensément en Europe et faire nombre de rencontres intéressantes. C’est ainsi qu’un été, elle fit un stage de 4 mois auprès du chef renommé d’un restaurant gastronomique à Albi, dans le sud-ouest de la France. Elle fit le tour des postes en cuisine et en salle au service des tables, mais surtout, elle eut la chance d’accompagner le chef au marché lors des achats pour son restaurant. Elle apprit ainsi à discerner les meilleures offres et les producteurs fiables et à découvrir la valeur de la production locale. Elle s’initia également sur place aux soins apportés à la culture de produits de première qualité. Pour développer son goût et parfaire sa formation, ce chef exigeant et réputé l’invitait parfois à partager son repas dans divers restaurants de la région et lui faisait découvrir les maintes notes subtiles de chaque plat. À la fin de son séjour, elle fut même nommée « Chevalière de l’Ordre de Gaillac », un titre honorifique qui lui permit de participer à des jurys lors de concours locaux de vins. De gourmande, Diane est alors devenue une gastronome passionnée qui voudra un jour partager ce plaisir avec tout un village. Mais cela sera pour plus tard…

De retour au pays, elle fonde sa propre entreprise d’édition, qui crée du matériel scolaire d’appoint pour le primaire et le secondaire. Elle continuera à diriger sa maison d’édition et produira pendant des années un projet de connaissance et de perfectionnement en français pour les élèves de 11-12 ans intitulé « Jeunes pour rire ».Il s’agissait de réaliser un numéro d’humour avec la collaboration du personnel technique professionnel de Juste pour rire, en mettant l’accent sur la qualité du français : le jeu et la langue se devaient d’être impeccables pour réussir cette étape. Les choses changeaient et il devenait de plus en plus difficile de trouver des commanditaires pour ces projets qui s’étendaient à toute la province.

Un changement s’imposait et il fut majeur! En 1998, Diane déménagea pour de bon à Val-David, qu’elle connaissait grâce à son conjoint, avec qui elle travaillait déjà à Montréal. Il lui fallut alors se redéfinir et trouver un autre champ d’action pour combler son besoin d’activités créatrices. Poussée par sa fibre gourmande et gastronome, elle découvrit peu à peu, au cours de ses déambulations dans la région, nombre de producteurs locaux intéressants et aussi passionnés qu’elle par une agriculture biologique de qualité. Et cela, c’est tout un exploit dans notre région aux sols plutôt pauvres et peu fertiles! Lors d’une visite à un petit marché fermier à Mont-Laurier, elle demanda aux exposants s’ils viendraient à Val-David un jour si un marché se développait là-bas. Bien sûr qu’ils viendraient!

Et c’est ainsi qu’en 2000, le premier «Petit Marché» vit le jour dans le stationnement à côté du Metro, pour le plus grand plaisir des citoyens de Val-David et de nombreux visiteurs attirés par des produits frais provenant directement d’une quinzaine de fermes ou de producteurs spécialisés. Pour l’administrer, Diane a mis sur pied Les Marchés d’ici, un organisme à but non lucratif qui offre aux producteurs comme aux visiteurs un espace professionnel bien géré répondant aux normes rigoureuses du MAPAQ (ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec). Les 160 marchés publics québécois fonctionnent sur cette base.

Animée par son esprit d’entrepreneurship, formée aux exigences concrètes du milieu des affaires, Diane Seguin s’est impliquée pendant plus de 16 ans dans l’Association des marchés publics du Québec, dont elle fit d’abord partie du CA et devint ensuite présidente pendant 3 ans. Sérieuse et passionnée, Diane prend à cœur ses responsabilités pour offrir ce qu’il y a de mieux à ses concitoyens tout en défendant les producteurs d’ici. Avec la construction de la pharmacie sur le terrain où avait lieu le marché fermier jusqu’alors, il a bien fallu changer d’emplacement. Tout le monde suivit — producteurs de fruits, de légumes, de pintades, de fromage, de miel, de produits fins, et les visiteurs aussi! Même qu’ils sont venus de plus en plus nombreux, profitant de cette visite au marché pour compléter leurs emplettes à l’épicerie, à la boulangerie ou dans les différentes boutiques et terminer leur tournée dans les divers restaurants du village. Il y a quelque chose de festif et de joyeux dans la fréquentation d’un marché fermier en plein air : entourés de fruits, de fleurs, de légumes et de gens heureux de tous âges, on rencontre des amis, on échange avec les producteurs qui en viennent à reconnaître leurs clients, et on a vraiment l’impression de contribuer à sa propre santé et à celle du milieu agricole en achetant des produits bio dont on connaît la provenance.

Les marchés publics peuvent souvent compter sur l’appui des municipalités où ils se déploient, comme c’est heureusement le cas à Val-David. Ce n’est pas simple de faire fonctionner ces marchés qui dépendent de tant de variables — le climat qui facilite ou non les agriculteurs et la tenue des marchés, les divers intervenants publics et privés dans ces activités, bref de multiples facteurs qui nécessitent une action qui va bien au-delà de l’événement lui-même. Diane Seguin y travaille 12 mois par année, soutenue par son expérience et sa passion contagieuse pour la qualité et la diversité des produits que nous mangeons quotidiennement. Plutôt discrète, entourée d’une équipe motivée et efficace, digne héritière du courage et de l’énergie de son grand-père prospecteur ou de son père pilote de brousse, formée par des gens endurants et travaillants, Diane Seguin tire de ses origines abitibiennes et de sa carrière fructueuse à Montréal une force, parfois même explosive, qui profite à tous ceux qui fréquentent les marchés publics qu’elle organise année après année pour plus de soixante-quinze producteurs courageux et de bonne foi et leur clientèle comblée. Même lors d’un marché en version réduite comme en cette année si particulière, producteurs et visiteurs sont nombreux et bien heureux de se retrouver les samedis matins!